Le duo mère-fille d'artistes Manon Barbeau et Anaïs Barbeau-Lavalette s'est prêté au jeu d'un questions-réponses complice et authentique à l'occasion de l'exposition « Vues du fleuve » présentée à la Grande Bibliothèque par BAnQ et @lotoquebec jusqu'au 4 juin 2023. Rencontre en vidéo.
Plus d'informations sur l'exposition « Vues du fleuve » : https://www.banq.qc.ca/exposition-vues-du-fleuve/
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La musique réussit à percer le gris des jours et, d'un bord à l'autre, les pas suivent le rythme et s'enfoncent dans la terre.
Le paysagiste ne peut pas être arrogant. Le passage de celui qui cohabite avec la nature doit se faire discret; sa main guidée par l’acuité de son regard, doit faire émerger du paysage ce qu’il recelait déjà en son armure.
Parce que je suis en partie constituée de ton depart. Ton absence fait partie de moi, elle m'a aussi fabriquée. Tu es celle à qui je dois cette eau trouble qui abreuve mes racines, multiples et profondes.
Ainsi, tu continues d'exister.
Dans ma soif inaltérable d'aimer.
Et dans ce besoin d'être libre, comme une nécessité extrême.
Mais libre avec eux.
Je suis libre ensemble, moi.
On confie notre peine au hasard de ce qui peut la porter.
J'ai quatorze ans et je butine les garçons en chantant Alegría.
Les chanterelles apparaissent comme des pépites d’or dans une griffe de lumière entre deux fougères.
Le paysage se déroule et s'éloigne, tu avales tout des yeux tranquillement. Tu sens que tu es à ta place, pour la première fois. Installée dans le mouvement des choses.
Les arbres ont un grand pouvoir de consolation.
L'homme de ma vie frôle les murs. Il cherche des fentes, des brèches pour s'y cacher. Il se sent traqué, pris au piège. Il cherche un espace pour se perdre en lui, mais en lui il n'y a plus de place. C'est complet. Ses doigts craquent, sa tête craque, et la colère coule sur cette petite surface où nous devons nous protéger. Sa rage et sa peine collent à mes pieds, je ne peux plus courir. Je dépose ma main sur sa poitrine et j'essaie d'être une ancre. On découpe des bouts de jour, on lui fabrique une solitude, mais elle étouffe entre les mâchoires de ses parenthèse. La lumière veloutée du jour le pique et le heurte, il voudrait un terrier sans bruit et sans lumière où enfin pourrait exister le début d'un silence, le début de son silence, au bout duquel, peut-être, il saurait ce qu'il cherche.
Parce que je suis en partie constituée de ton départ. Ton absence fait partie de moi, elle m'a aussi fabriquée. Tu es celle à qui je dois cette eau trouble qui abreuve mes racines, multiples et profondes.
Ainsi, tu continues d'exister.
Dans ma soif inaltérable d'aimer.
Et dans ce besoin d'être libre, comme une nécessité extrême.
Mais libre avec eux.
Je suis libre ensemble, moi.