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Citation de NICETTE


HUMANISME page 280
Historiquement, c'est d'abord un courant intellectuel de la Renaissance (ceux qu'on appelle les humanistes: Pétrarque, Pic de La Mirandole, Érasme, Budé...), fondé sur l'étude des humanités grecques et latines et débouchant sur une certaine valorisation de l'individu. Mais le mot, en philosophie, a un sens plus large : être humaniste, c'est considérer l'humanité comme une valeur, voire comme la valeur suprême. Reste à savoir si cette valeur est elle-même un absolu, qui se donne à connaître, à reconnaître, à contempler, ou bien si elle reste relative à notre histoire, à nos désirs, à une certaine société ou civilisation... On parlera dans le premier cas d'humanisme théorique, lequel peut être métaphysique ou transcendantal, mais tend toujours à devenir une religion de l'homme (voyez L'homme-Dieu, de Luc Ferry) ; dans le second, d'humanisme pratique, qui ne prétend à aucun absolu, à aucune religion, à aucune transcendance : ce n'est qu'une morale ou un guide pour l'action. Le premier est une foi ; le second, une fidélité. Le premier fait de l'humanité un principe, une essence ou un absolu ; le second n'y voit qu'un résultat, qu'une histoire, qu'une exigence. La vraie question est de savoir s'il faut croire en l'homme (humanisme théorique) pour vouloir le bien des individus, ou si l'on peut vouloir leur bien (humanisme pratique) quand bien même on aurait toutes les raisons de ne pas s'illusionner sur ce qu'ils sont. Tel était l'humanisme de Montaigne. Tel aussi celui de La Mettrie. "Je déplore le sort de l'humanité, écrivait-il, d'être, pour ainsi dire, en d'aussi mauvaises mains que les siennes". Ce n'est pas une raison pour l'abandonner à son sort, puisque ces mains, précisément, sont les nôtres. En bon matérialiste, La Mettrie ne voit dans les êtres humains que de purs produits de la matière et de l'histoire (c'est la thèse fameuse de l'homme machine, qui fonde un anti-humanisme théorique). Mais le médecin qu'il était aussi n'a pas renoncé pour cela à les soigner, pas plus que le philosophe à les comprendre et à leur pardonner. "Savez-vous pourquoi je fais encore quelque cas des hommes ?, demandait-il. C'est que je les crois sérieusement des machines. Dans l'hypothèse contraire, j'en connais peu dont la société fût estimable. Le matérialisme est l'antidote de la misanthropie." Humanisme sans illusions, et de sauvegarde. Ce n'est pas la valeur des hommes qui fonde le respect que nous leur devons ; c'est ce respect qui leur donne de la valeur. Ce n'est pas parce que les hommes sont bons qu'il faut les aimer ; c'est parce qu'il n'y a pas de bonté sans amour. Enfin, ce n'est pas parce qu'ils sont libres qu'il faut les éduquer : c'est pour qu'ils aient une chance, peut-être, de le devenir. C'est ce que j'appelle l'humanisme pratique, qui ne vaut que par les actions qu'il suscite. Ce n'est pas une croyance ; c'est une volonté. Pas une religion ; une morale. Croire en l'homme ? Je ne vois pas ce que cela signifie, puisque son existence est avérée, ni pourquoi ce serait nécessaire. Pas besoin de croire en l'homme pour vouloir le bien des individus et le progrès de l'humanité. Au reste, nous partons de si bas qu'il doit bien être possible de nous élever quelque peu. C'est où l'on retrouve le premier sens du mot humanisme, qui renvoie aux études, à la culture, à l'étude attentive et fidèle du passé humain. C'est la seule voie pour l'avenir, si l'on veut qu'il soit acceptable. L'homme n'est pas Dieu. Faisons au moins en sorte, et l'on n'en a jamais fini, qu'il soit à peu près humain.
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