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3.89/5 (sur 9 notes)

Nationalité : Roumanie
Biographie :

Andreia Roman est maître de conférences à l'Institut national des langues et civilisations orientales de Paris. Elle est spécialiste de la langue et de la littérature roumaines


Source : Bibliomonde
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Bibliographie de Andreia Roman   (6)Voir plus

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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Destin à billes (de Leonid Dimov)

Le vieux bateau avec ses roues énormes
Vogue sous les ponts par les cités mornes
Et dames de humer sur son pont lavé
Des liqueurs bleues, jaunes, vert décoloré.
Cavalier en frac, en tubes mauves
Tiennent en laisse des billes de bois fauve :
Rondes, rouges, avec des dessins subtils
Ovales, vertes rangées sur noirs fils
Avec grelots, avec frange ou lumières
Avec des lys peints et des roses altières
Avec des valses, du lilas sentant bon,
Chinoises avec des monstres, des dragons,
Françaises, aux couples dansant la gavotte
Barbare, avec des images wisigothes.
Rire des dames sur le pont sont tissés
Chapeaux et rubans sont vite dénoués
Quand devant quais déserts et palais l'on passe
Où monstres, aux baies éclairées, montrent leur face.
Alors, à la relève de la garde dans la nuit
S'allument visions de billes et de colliers aussi
Et les messieurs sanglés dans leurs frac, en haut-de-forme
Se taisent, omniscients et sourient ou tout comme
Et dames de rire plus fort et de déguster
Dans les gobelets d'ivoire mat leurs cafés.
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[Ion] Heliade Rădulescu esquisse même une explication de cette préférence pour la représentation du chef charismatique dans une ébauche timide de sociologie littéraire. Chez les peuples «adolescents» qui «commencent à avoir une attirance vers l'histoire», «cette histoire doit être remplie de mythes. Et si ses acteurs ne peuvent être que des humains, ceux-ci ne séduisent pas en tant qu'hommes communs, doués de qualités humaines : ce sont des empereurs, des chefs militaires, des géants, des demi-dieux, des mages (...) qui se promènent dans des chars et chevauchent des chevaux de feu, des coursiers ailés, des hippogriffes et des Pégases, et qui sur leur chemin terrassent le mal, humanisent les sauvages, civilisent les barbares, fondent des sociétés, inventent les sciences et les arts et le ciel les reçoit de leur vivant, en les rendant immortels.»

(p. 177)
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Le Renard libéral

Le renard criait
À tous les échos :
Depuis que l'éléphant règne sur les forêts
Tout le monde pâtit, tout s'en va à vau-l'eau !
Il est bien injuste
Que soient répandus
Pour la table auguste
Tous nos revenus.
Dès qu'on lui apporta cette information,
L'éléphant, redoutant une rébellion,
Dépêcha par le lièvre un billet au renard.
Invité à la Cour, il y vient sans retard.
Le roi l'embrasse et dit :
« J'ai appris, mon compère,
Que tu as grand talent.
Aussi je te veux faire,
En signe d'agrément,
De tous nos poulaillers, le superintendant :
C'est un vaste département :
Sois bien à ton affaire ! »
L'orateur répondit : « Compte sur moi vraiment »
Puis du monarque ayant baisé la patte,
Il retourna à ses pénates.
Le lendemain, il vint, comme à l'accoutumée,
Prendre sa place sans l'assemblée,
Mais tout emmitouflé, la tête emmaillotée,
Dans un vaste fichu noué sous le menton.
« Qu'as-tu donc ? » lui demande-t-on.
« Je suis mal, dit-il au plus mal !
Cela m'a pris hier. Des affaires publiques
Je ne puis m'occuper.
Mais le roi s'y applique !
Il pense sans relâche au bonheur général !
Adieu ! Je suis malade : un os
S'est mis en travers de ma gorge… »

Moi je connais beaucoup de libéraux :
Ils se pavanent et rengorgent.
Chacun dépasse l'autre en discours
Mais à la fin voilà qu'ils tournent court :
Ils ont un os en travers de la gorge.

[fable de Grigore Alexandrescu (1814 ?-1885), adaptation de Jean Rousselot, p. 233-235]
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Je sors dans la rue, je marche sur les feuilles jaunies qui recouvrent l'asphalte. Il est très tôt dans la matinée, à peine neuf heures. Je ne me presse pas pour rejoindre mon nouveau logement, les gens l'arrangeront selon leur goût, car je n'ai aucun sens de l'initiative. Il faut tout d'abord que je me prenne une chambre d'hôtel. Je connais très bien Bucarest, et depuis très longtemps, cependant je n'ai eu jamais l'occasion d'entrer dans un hôtel. J'ai l'impression que l'hôtelier s'amuse de me voir demander une chambre de si bon matin, sans bagages, sans donner l'impression d'arriver de quelque part. Une liaison peut-être… Mais voici que je sors de nouveau rapidement dans la rue, car je n'ai de patience pour rien. Un cinématographe dans lequel débute le spectacle. J'entre et suis le seul dans la salle. La représentation commence, malgré tout, à l'heure. J'ai l'impression d'être Louis II de Bavière à quelque représentation wagnérienne…
(fin de "Mélancolies à la Saint Démètre" d'Anton Holban, traduction d'Isabelle Radigon, page 351)
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Grigore Alexandrescu (1814 ?-1885), extrait du poème « L'année 1840 » dans lequel le poète exprime son espoir dans le progrès pacifique et éclairé des « temps modernes » :
[...]
Les fondements du monde se meuvent et chancellent,
Vieilles institutions s'effacent sous la rouille ;
Un esprit bout dans le monde et l'homme qui pense
Accourt vite vers toi, car les temps sont venus !

Des ombres de peuples sont ici gouvernées
Par des ombres de lois foulées aux pieds, violées
Par d'autres plus petites, insignifiants nabots,
Et tous les sentiments élevés, généreux,
Nous paraissent des contes de fées merveilleux,
Et tout l'enthousiasme source d'idées mesquines.

La politique profonde n'est que fanfaronnade,
La science de la vie n'est qu'égoïsme affreux ;
De la grandeur de l'homme, rien ne donne la preuve,
Et seul le despotisme est bien consolidé.

An nouveau ! J'attends ton miracle comme une voix céleste ;
Pourtant si le pasteur que tu nous vas choisir
Sera comme ceux dont nous n'en avons que trop,
Laisse alors comme elle est la tyrannie ancienne,
Devant tes cadeaux, moi, je n'éprouve aucune joie,
Nous en avons assez du mieux qui n'est pas bien…

Quel bienfait sortira d'un pareil changement ?
Que peut faire de pis l'étoile, grande comète,
Qui brûlerait le globe et tous ses habitants ?
Et qu'importent au troupeau, toujours si malheureux,
De savoir quelle main viendra le massacrer
Et s'il aura un seul ou plusieurs oppresseurs ?

Je ne demande rien qui ne soit que pour moi ;
Mon sort, je le voudrais à ceux de tous unis ;
Et si sur moi tout seul qui tu ne peux rien de bien,
Je ris de ma douleur et la déconsidère.

Après tant de souffrances le cœur devient de pierre ;
D'une chaîne éternelle nous oublions le poids :
Le mal devient nature, la conscience, inertie
Je vis dans la douleur comment en mon élément.
Je voudrais bien voir le jour prédit au monde,
Et voir souffler un air plus dégagé, plus pur,
Perdre la triste idée renforcée par les siècles,
Qui dit que nous sommes le jouet des événements.
[...]

(traduit du roumain par Andrée Fleury)
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La différence entre le produit culturel et le produit littéraire se joue au niveau du style et de l'impact émotionnel de l'écriture. Vers le milieu du XVIIe siècle, les textes historiques et religieux deviennent des ouvrages « d'auteur ». Bien que circulant à l'état de manuscrit, les premières éditions datant seulement du milieu du XIXe siècle, ces ouvrages sont loin d'être conçus comme « littérature de tiroir ». Individualités puissantes, les chroniqueurs s'érigent en directeurs de conscience, attribuant à l'écriture un pouvoir sacré. Miron Costin dit que « dans la vie des hommes il n'y a pas loisir plus beau et plus utile que la lecture des livres » et, dans sa « Chronique polonaise », il déclare que la mémoire conservée par son œuvre peut survivre à l'existence même de son peuple : « soit que le peuple moldave parvienne à lire ma chronique, soit qu'il périsse avant, pourvu qu'au moins le souvenir de notre peuple demeure ».
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La littérature roumaine est connue en France presque dans sa totalité, à travers les écrivains de l'exil. Pour un lecteur non avisé, l'image qui en découle est sinon déformée, du moins incomplète. Elle procède d'un préjugé selon lequel seuls les auteurs ayant vécu dans l'espace d'une grande culture et s'étant exprimés dans sa langue sont porteurs de l'esprit européen.

(p. 9, avant-propos)
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Le Bucarest bohème et dépravé des « Les Seigneurs du Vieux-Castel » de Matei Caragiale devient triste et miséreux dans le ghetto de Văcăreşti du roman homonyme de Isaac Peltz (1899-1980).
Globalement, le réalisme caractérise la production romanesque de l'entre-deux-guerres. La matière narrative s'affine grace à l'analyse psychologique mais continue de fonctionner – excepté chez Anton Holban et Max Blecher, entièrement axés sur l'introspection – en lien étroit avec la problématique sociale.
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Voyage (de Leonid Dimov)

Sois prête. Les rues désertes
Se rejoignent en un chant d'amour mystérieux.
Dans un instant, nous monterons
Dans un véhicule invisible.
Nettoie encore la crotte de mailles rouillée,
Redresse mon heaume
Et vois pourquoi le char n'arrive pas
Avec les cavaliers que j'attends,

En chemin, sur mon écu,
Tu reprisera la soie des ténèbres.
Te guidera le dé
D'un métal inconnu

(traduit du roumain par Pierrette Ganet)
[pp. 163-165]
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L'embrigadement de l'écrivain est institutionnalisé. L'Union des écrivains, créée en 1949, fonctionne comme une entreprise productive qui attribue des subventions substantielles et autres privilèges à ceux qui en font partie, à condition que leurs œuvres glorifient la politique du régime. À cette fin, un puissant appareil de censure est mis en place, dirigé par des propagandistes dont les critères ont peu à voir avec les véritables valeurs de la culture.
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