La nostalgie, c’est beau et minable, essentiel et stérile, merveilleux et douloureux.
Paul est-il seulement là ? Je ne l'entends pas.(...)
Affolée tout à coup par cette incertitude, je me retourne.
Le rideau opaque des corps s'ouvre alors lentement et je sombre dans son regard. J'entre dans une nouvelle dimension où le temps semble s'arrêter, où les autres n'existent plus.
Leurs ombres mouvantes et colorées s'agitent au ralenti, inattentives à ce que nous sommes en train de vivre, stupidement inconsciente de la fusion magique de notre échange.
Ne sommes nous pas des privilégiés absouts de toute condamnation lorsque les sentiments que nous ressentons et que nous inspirons s'approchent à ce point des étoiles ?
J'ai eu ce que je voulais, et il le sait. Il est vaincu. Je l'ai vaincu !
J'ai peur de moi. Il a peur pour nous. Je l'aime et l'ai dévoré.
J'ai gagné !
Il la trouva belle, obscure et lumineuse, mais parce qu’il faisait nuit, parce que la lune l’irradiait, parce que la pluie déposait sur sa peau ce voile gras et translucide qui la faisait briller. Elle n’était qu’illusion. Elle n’était que Mado. Elle n’avait toujours été que cela. Son accidentelle, celle que même le plus cruel des destins n’aurait pas osé admettre lui avoir promis. »
La seule chose qui semblait égayer Mado et allumer un peu de lumière et d’éclat dans ses ténébreuses prunelles, c’était des bêtises de magazines féminins. Et ces futilités-là ne poussaient guère au labeur. Elle pouvait passer des heures plongées dans son satané Midinette, et ses romans-feuilletons.
même si j'ai su, dès notre première rencontre, qu'inévitablement je ressentirais de l'amour pour lui, je refuse de m'attacher, de me lier, de me perdre dans la fusion dépersonnalisante de cette idée terrifiante du couple qui voudrait que nous ne fassions qu'un. Je veux rester moi-même et libre. Et pour garder l'admiration que j'ai pour lui, je veux que Sam reste cet homme affranchi d'attaches et férocement indépendant.
(...)
Nous sommes particuliers et uniques, ensemble et séparément. Et notre relation sincère mais détachée, passionnée mais non fusionnelle intrigue beaucoup les adeptes sans imagination de l'amour conventionnel, et invente le mythe intriguant de notre couple atypique.
Ces émotions extrêmes n’étaient pas habituelles chez lui. Il était bien sûr fréquent pour Gus de s’extasier sur la beauté des femmes, comme d’ailleurs de se concentrer avec passion à leur conquête. Mais jamais il n’avait ressenti ce coup de poing-là.
Elle lui avait ouvert les portes de l'amour fou, de la passion, de la déraison. Elle s'était donnée à lui comme si toute sa vie en dépendait. Il s'était donné à elle comme si ce don constituait son unique chance à lui de vivre au-dessus de ses rêves.
L'homme pour moi est dénué des appas romantiques que lui trouve la grande majorité de mes pareilles. Il ne doit pas être l'aboutissement, le but, le bonheur atteint, l'épanouissement, mais plutôt le matériau obligatoire d'une normalité nécessaire.(...)
Ce que j'ai pu entrevoir de l'amour n'a jamais rien eu de délicieux. Et je refuse l'attente, l'instabilité, la douleur. Je veux la maîtrise.
Pas pour dominer l'autre, seulement pour protéger mon intégrité et mon estime personnelle de cette avilissante fragilité dont les élans bouleversants et pathétiques m'angoissent.