Il fallait avancer, voire, peut-être, un jour, refaire ma vie. Oh, ils n'avaient pas tort, ma vie était bel et bien défaite, ça ne faisait aucun doute. Mais la refaire? Qu'entendait-on par là exactement ? Fallait-il tout reprendre du début? Tout redessiner? Opter pour une voie plus sage que la composition musicale ? Entreprendre des études en école de commerce ou de médecine? Devenir avocat ou notaire? Comptable ou infirmier? Jardinier ou commerçant? Choisir, donc, une profession honorable, avec un salaire, un vrai, des garde-fous, une assurance chômage, une retraite ? Oublier d'être porté par des rêves, une mélodie, des odeurs, des couleurs à réinventer... Oublier d'être dans la lune, ou ailleurs, toujours un peu. Oublier d'être heureux, en somme.
Oui, refaire sa vie. Le désir m'en manquait et m'en manque toujours. Je ne refais rien, même quand je réinvente la voix de Liv. Car, bien sûr, Laïcely n'est qu'un succédané, une pâle imitation de Liv. Mais parfois, maintenant, elle m'est plus réelle que celle qui a partagé ma vie, ma couche, et a emporté avec elle une partie de mon cœur.
Il n'est rien de plus fou et de plus merveilleux que cette alchimie entre l'amour, le talent et la jeunesse.