Hawking va encore plus loin que Bekenstein : son raisonnement lui permet de déterminer l'expression mathématique de la température de surface d'un trou noir en fonction de sa masse. C'est cette remarquable formule qu'on peut voir gravée sur sa tombe à l'abbaye de Westminster, à Londres. Outre la température (T) et la masse (M), on y retrouve quatre des plus importantes constantes fondamentales de la Nature, associées aux trois grandes théories de la physique : G (constante de Newton) et c (vitesse de la lumière) pour la relativité générale, k (constante de Boltzmann) pour la thermodynamique, et h (constante de Planck) pour la mécanique quantique.
Une reconnaissance tardive
Depuis 2018, la loi de Hubble de 1929 porte officiellement le nom de « loi de Hubble-Lemaître », après un vote des membres de lUnion astronomique internationale. En effet, l'article original de Lemaître, écrit en français en 1927, avait été traduit en anglais en 1931, mais la section où était décrite le lien entre ses modèles et la fuite des galaxies n'avait mystérieusement pas été incluse, et donc ignorée de la majeure partie de la communauté. Justice a donc été rendue aux travaux du cosmologue belge. Une belle alliance entre observation et théorie.
Ainsi, en l'espace de quelques mois, Hawking a écrit un article critiquant un point technique du modèle d'univers stationnaire, et a réalisé un travail d'importance sur les modèles dynamiques (singularité au temps zéro). Cette démarche est peu ordinaire pour un jeune doctorant dont le directeur de thèse défend un modèle concurrent (l'état stationnaire), dans son propre fief qui plus est. Or le nom donné au modèle auquel s'est particulièrement intéressé Hawking dans ses deux premiers travaux, c'est par une ironie du sort Hoyle qui l'a trouvé : Big Bang, soit « grand boum ». Une expression que ce dernier a prononcée dans une émission radio de 1949 pour tourner le modèle en dérision. Peine perdue : l'expression a fait mouche... À la fois parlante marquante pour le grand public, courte et efficace pour les cosmologues, elle s'est immédiatement imposée malgré ses limites à exprimer correctement l'essence du modèle.
Quoi quil en soit, les mesures actuelles, incluant celles réalisées avec le fond diffus cosmologique, Convergent vers une même représentation. Dans l'Univers actuel, la densité totale d'énergie (en considérant que la matière est une forme d'énergie) est égale à la densité critique, qui correspond à un Univers plat. Environ 70% de cette énergie se trouve sous forme d'énergie noire ; bien que de nature inconnue, elle domine largement le bilan énergétique de l'Univers actuel. La matière noire n'est pas en reste, car elle représente 25 % (un quart) de l'énergie totale, bien qu'on n'en connaisse pas non plus la nature. La matière ordinaire, finalement, ne représente pas plus de 5 % de l'énergie totale ; et il faut ajouter que les étoiles ne représentent elles-mêmes que 6% de ces 5 %, c'est-à-dire 0,3 % de l'énergie totale... Que de noir passé si longtemps inaperçu !
Là où s'arrête la relativité
Que faire quand on aboutit aux limites d'une théorie. ici la théorie de la relativité générale ? Heureusement les physiciens sont optimistes, et quand une théorie trouve ses limites, c'est donc qu'il faut la généraliser. Ici, cela supposerait de proposer une théorie plus générale qui s'applique lorsque la densité est si grande que les lois de la physique classique ne fonctionnent plus, parce qu'elles se frottent à l'infiniment petit. Or, ces échelles sont le royaume de la mécanique quantique, qui décrit le comportement pour le moins étrange de la matière à l'échelle des particules élémentaires. L'idée serait ainsi de marier la relativité générale et la mécanique quantique dans une nouvelle théorie, qu'on appellerait «gravité quantique», par exemple. Il est intéressant de noter que dès les années 1930, Georges Lemaître avait eu l'intuition de l'importance d'effets quantiques à l'approche du fatidique temps zéro où l'espace est extrêmement contracté. Cependant, la tâche n'est pas aisée. Malgré les efforts déployés depuis plusieurs décennies, incluant des travaux menés par Hawking, force est de constater qu'aujourd'hui encore, aucune théorie ne parvient à rapprocher relativité générale et mécanique quantique de manière pleinement satisfaisante.
Les découvertes astronomiques ont inévitablement entraîne une révolution philosophique: l'être humain perd la place centrale qu'il pensait jusque-là occuper dans l'Univers, la Terre se retrouvait reléguée au simple statut de planète, au même titre que Vénus ou Jupiter. Au XVIIIe siècle, la découverte de nombreux autres objets célestes confirme cette situation, et au XIXe siècle, l'idée que le Système solaire lui-même fait partie d'un ensemble plus vaste, la Voie lactée, s'impose. L'anthropocentrisme a fait son temps.
Hawking n'est pourtant pas retenu par Hoyle pour faire partie de son pool d'étudiants. Malgré sa déception, il se résigne et accepte la direction d'un autre membre de la faculté, Dennis Sciama, dont la sollicitude lui sera en définitive d'un grand secours lorsque sa maladie sera diagnostiquée, au tout début de sa thèse. Après plusieurs mois à broyer du noir, Hawking se ressaisit et change d'attitude. Il s'engage dorénavant corps et âme dans son travail de thèse.
Comme il s'agit d'un phénomène ondulatoire, la longueur d'onde de la lumière est aussi affectée par la vitesse relative entre l'émetteur et le récepteur. Ainsi la lumière émise par un corps qui se rapproche de nous sera décalée vers le bleu (les fréquences sont augmentées, les longueurs d'ondes raccourcies), et au contraire s'il s'éloigne, sa lumière sera décalée vers le rouge. Puisqu'on a mesuré en laboratoire la fréquence propre des radiations émises par un grand nombre d'atomes et de molécules présents dans les astres, on peut déduire de leur décalage en longueur d'onde leur vitesse par rapport à nous. C'est le principe de la mesure des distances par effet Doppler-Fizeau, devenue absolument indispensable en astronomie. La lumière, les ondes radios, les micro-ondes, les rayons X, bref, toute radiation électro-magnétique est implacablement soumise à sa loi.
Comme le soutien alors Galilée contre la position aristotélicienne, le ciel n'est pas immuable, et la Lune, le Soleil et les planètes sont bien sujets aux changements, de même qu'il sera prouvé, plus tard, que les étoiles naissent, vivent et meurent.
Après les théories galiléennes, le cosmos ne présentera jamais plu le même visage. L'instrument de cette révolution ? Un tube creux, aux extrémités duquel sont placées deux lentilles de verre : une simple lunette.