AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

4.17/5 (sur 30 notes)

Né(e) : 1975
Biographie :

Arno Calleja a étudié la philosophie et a commencé à publier en revues au début des années 2000.

Il vit dans le sud de la France. Ses textes se caractérisent par une parole libre, déraillante, saisie avant toute censure et laissée à son auto-engendrement. Sans majuscule ni ponctuation, sa langue avance en spirales et en éclatements. S’alléger du poids du temps, recouvrer le flux du monde dans un flux langagier, voilà l’ambition de cette parole qui de toute pulsion fait texte.

Il co-dirige la revue "Muscle" avec Laura Vazquez.

Ajouter des informations
Bibliographie de Arno Calleja   (13)Voir plus

étiquettes

Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Puis je vais lire un livre mouillé et je ne sentirai rien du livre. Et je donnerai le livre à un mort. Et je prendrai un soleil à la place. Je vais ouvrir ma maison dans ma tête pour qu’un soleil entre. Et le soleil me refera le sang par le cul. Je serai neuf.
Je vais perdre ma maison. Et un soleil va me mettre le compte. Ce sera une super partie tragique. Et je dirai mesdames messieurs ma maison est à vous dans la tête. Et tout le monde m’entrera par le cul. Et dansera en soleil toute la nuit. Une super partie tragique.
Et quelqu’un m’oubliera son paquet de clopes au dedans et je ne dirai rien.
Les morts me referont le sang. Les morts sont des ouvriers très occupés. Des abeilles que je gobe bouche ouverte. Qui me refont tout l’intérieur.
Je vais être indifférent aux travaux.
Commenter  J’apprécie          40
Je vais faire une page. Mais pas une vraie littérature. Juste un bruit sur ton crâne, sur ta foule. Un gros bruit de pluie, de salive, d’humeurs, tout ce qui coule.
Je vais faire une page sans ombre, qui coule. Ensuite il ne faut pas s’en approcher. Personne personne. À part toi. Je vais faire une page, que personne la boive. C’est ta rivière maintenant. Que personne y mette son bec, ses pattes.
Je vais faire une foule qui te fera un bruit au crâne, un gros boucan de tonnerre. Un grand moulin qui claque. Un réel qui tourne.
Je vais faire et ce sera réel.
Je vais faire une grosse douleur qui t’emplira le poumon. Une grosse douleur de gros bruit de page. Et pas le petit bruit d’une vraie littérature, non, juste le gros bruit de pluie d’une page sans rien.
Je vais faire une page comme on fait une montagne. Comme on perd son enfant dans le lac.
On ne fait pas une montagne, en vrai. Mais on perd son enfant dans le lac, en vrai.
Je vais faire la page comme montagne est sortie de terre. Comme elle s’est faite elle-même. très lentement. je vais faire une très lentement page.
Je vais étouffer la maladie parlante jusqu’à ce qu’elle démoule sa forme à la page. Lentement qu’elle éclose. Je vais appeler les morts et ils vont venir et ils vont refaire le sang humain à partir. Je ne vais rien dire. Je vais me déshabiller avec les morts et ils vont me refaire le sang à partir de ce qu’ils ont vu dans la mort. Et je nagerai.
Commenter  J’apprécie          30
Et puis vient le jour où tu fais le voyage. Tu pars au Mexique. Et malgré le groupe d’amants et malgré la troupe d’amis tu pars seule, tu pars seule au Mexique faire le voyage. Tu baisses un peu le régime d’alcool et tu marches des jours et des jours, la frénésie. Tu achètes des chaussures bleues, des chaussures fortes pour aller aux cailloux, et tu marches.
À ce moment venu tu ne parles plus. Tu remarques alors que la marche beaucoup, que l’alcool moins, et que la parole plus du tout, font tomber l’angoisse. Alors tu souris et les mollets pompent la route, et tu avances.
Aussi tu poses la question. Comment, pourquoi l’angoisse tombe dans la solitude qui avance aux cailloux traversant les couleurs et la langue étrangère, espagnole, c’est la question tu te la poses. Le soir sous la tente. Pourquoi l’angoisse de la mort dans le sein, qui me bouffe, me quitte ici dans la marche, dans la solitude, dans la bière le soir, un peu. Tu sors les pieds des chaussures bleues, c’est le soir sous la tente et tu fais la question.
Et c’est la question je le sais qui t’a ouverte, les derniers jours, en marchant, tu étais, tu es, complètement ouverte, complètement dépliée, devant la montagne de Taxco, et tout toi regardais, je veux dire, tu regardes tout devant, ouverte, à fond ouverte une dernière fois, devant la montagne, le trois novembre deux mille un, avant que tu meures, trente heures plus tard, le cinq novembre, dans un hôpital de Mexico, le cœur dans le sang nécrosé les métastases, à l’arrêt, donc, une dernière fois.
Commenter  J’apprécie          20
Je vais faire un poème qui tombe. Au début il tient. C’est à la fin qu’il tombe. C’est normal.
Au début le poème il a un renard dans la gorge. Ensuite le poème il a un loup dans le ventre. Des fourmis dans les couilles et des hirondelles dans les ovaires. Le poème. Il avance un moment avec toute sa faune. Puis il arrive face à la montagne. Les uns s’enfuient, les autres s’envolent. C’est là qu’il tombe, face à la montagne.
Maintenant, je vais dire le récit de la domestication.
Au début il n’y a que des loups. Ils se déplacent en meute. Il y a un chef de meute, il décide. Un jour arrivent les hommes. Les hommes encerclent la meute. Avec des pierres des bâtons les hommes tuent le chef de meute. Ils ne gardent que les petits. Les petits sont nourris au lait de femmes. En grandissant, les petits ne sont plus des loups, ils deviennent des chiens.
Voilà, c’était le récit de la domestication.
C’est un vrai récit qui n’est pas un poème. Je vous l’ai dit.
Commenter  J’apprécie          20
Chez lui on ne parlait jamais de moi il ne me posait jamais de question et j’aimais ne pas parler de moi à ce moment de ma vie je me sentais inintéressant en général et inintéressant en particulier en rapport à Benoit. Qui m’avait beaucoup impressionné depuis nos 13 ans comme je l’ai dit et à qui j’étais soulagé de ne pas parler de ma vie de magasinier célibataire à Marseille. Où je ne connaissais personne. Dans la ville. Et où j’avais peur. Une peur de sortir et particulièrement une peur de sortir le soir qui était une peur générale des gens et une peur particulière des filles et une appréhension à l’idée de rencontrer une fille et je n’aimais pas boire dans des bars de toutes façons. À ce moment de ma vie j’étais vierge et je ne vois pas le problème de l’écrire. Alors je ne lui parlais pas de moi et il ne le remarquait même pas. Séparer comme je viens de le faire les gens et les filles dans deux catégories est une façon étrange de percevoir l’altérité je viens de m’en rendre compte en l’écrivant. Parce qu’après avoir rencontré par hasard Benoit dans la rue d’Endoume et après s’être revus une seconde fois dans son studio je m’étais mis à écrire moi aussi dans un cahier à moi et en écrivant j’avais commencé de percevoir mon étrange façon de percevoir les choses. Quand je relisais. L’écriture me montrait mes façons étranges et mon orthographe fausse et ma difficulté dans les phrases et mon absence d’imagination. Par exemple je pouvais seulement décrire ma journée pour pouvoir faire une phrase. Je ne pouvais noter qu’une phrase descriptive de journée. Mais pas une phrase de pensée. Je ne pouvais pas décrire ma pensée en une phrase de pensée. Je ne pouvais écrire que des choses vécues et descriptibles de ma journée dans une phrase inintéressante mais que je me forçais pourtant de noter dans mon cahier. Écrire une phrase d’imagination ou de pensée ou de question je n’y arrivais pas. C’était un exercice. Je m’appliquais. J’avais tenu cet exercice d’écriture pendant 3 mois. Du jour qui avait suivi ma rencontre avec Benoit jusqu’à aujourd’hui. Mais aujourd’hui j’écris pour une raison différente. Une raison précise. On va comprendre pourquoi.
Commenter  J’apprécie          10
Finalement, à l’analyse, je fais partie de ceux qui ne respirent pas au bon endroit de la phrase, c’est ça. C’est un truc qui me suit depuis l’enfance, il m’a toujours manqué ce recul, du fait que je suis confondue à la phrase sans respiration. Je ne vis pas dans un milieu, comme vivent les abeilles par exemple, mais je suis le milieu même dans lequel je vis. C’est ce que j’ai trouvé à faire pour survivre, j’ai fait mon milieu, m’y suis fondue, j’ai fait un avec ma vie collée dans mon appartement sans pensée, avec les garçons parfois mais toujours sans pensée. Il y a des gens qui font de l’aérophagie et qui restent la bouche ouverte au beau milieu du salon, moi je suis de celles qui ont toujours parlé sans distance et sans aération de pensée entre soi et la phrase. C’est comme ça.
Commenter  J’apprécie          20
Voilà, c’est chez moi. C’est grand, oui. J’ai toute la place. Il y a la ville autour. Tout le ciel dessus. On voit tout. À des kilomètres. Oui c’est très très beau. On me le dit souvent. C’est très harmonieux, très contenant. Immense et contenant, c’est un peu ça l’idée. Et réconfortant. C’est le principe. Oui, très très beau, merci.
Et mon rôle, parce qu’ici j’ai un rôle, c’est d’être là. Passer, et être là. Voilà mon rôle. C’est assez simple. C’est aussi assez singulier. C’est un rôle pour la ville. Pour les gens. On est nombreuses dans le monde, on est connues dans le monde entier. Mais moi, ici, je suis particulière. Je ne sais pas, c’est ce qu’on dit.
Je passe, constamment et calmement. Calmement mais, attention, avec beaucoup de puissance en dessous : je peux turbiner un maximum. Il faut faire attention.
On vient de loin pour me voir. Ma constance, ma douceur, mon silence. Je ne fais pas d’histoires. On vient de loin et on me regarde, un long moment, puis on s’en va. C’est mon rôle. Je suis impassible. On me pisse dedans si on veut, ça m’est complètement égal.
Et puis on me confie des choses que vous n’imagineriez jamais. On dépose en moi tout un bordel, quand j’y pense.
Les maboules m’aiment beaucoup, j’ai remarqué. Ils aiment venir me regarder. C’est un fait connu. On peut lire beaucoup de choses sur ce phénomène. Les schizophrènes. Ils aiment venir me voir. Parce qu’ils ont l’impression que je suis immobile et que c’est eux qui passent. C’est intéressant. Ils sont intéressants. Je les remarque ils arrivent le soir, ils se posent, ils me regardent. Parfois ils veulent me mettre la main. Je ne leur en veux pas.
Mais on me dépose des choses que vous n’imagineriez vraiment pas. Je reçois tout un bordel, quand on y pense, quelle histoire.
Je distingue deux choses, on est obligé de distinguer les choses, sinon on devient fou. Je distingue deux choses : il y a moi, avec tous mes attributs, mes propriétés. Et puis il y a tout le bordel qu’on me jette dedans. C’est deux choses différentes et je fais bien la distinction.
Commenter  J’apprécie          10
Le côté coincé du cul et coincé du mental des bourgeois presque ça leur donne un charme une sorte d’aura à eux, alors que les prolos ce n’est pas un charme que ça leur donne leur coince mais c’est un poids, et c’est un poids pathétique et qui n’est pas charmant du tout comme poids. Parce que le pathos que ça leur donne aux prolos leur coince du cul et du mental est un gros pathos flippant qui fait qu’avec un pareil pathos qui leur coince tout ils ne pourront jamais les prolos, et c’est ça qui est terrible, ils ne pourront jamais relever la tête c’est terrible. Parce qu’il faut quand même un peu d’élan, et un peu de légèreté pour relever la tête et se sentir l’envie de vivre de manière moins lourde et moins pathétiquement lourde mais là, aux prolos, leur grosse coince du cul et leur grosse coince du mental et du social elle plombe tout le monde et le monde jamais ne pourra se relever d’une pareille plombe qui est pire qu’une cuite de gueule de bois de plomb qui est pire que tout finalement c’est terrible.
Commenter  J’apprécie          10
Au début je voulais tout comprendre. Toutes les pistes. On a fait tous les prélèvements possibles, les empreintes, les recherches de témoins, tout. Puis évidemment, tu te dis, sans le nom, tu n’as rien. Il suffit de trouver son nom. C’est la bobine. On déroule tout à partir du nom. Le nom c’est son adresse, l’adresse de son école, le nom de son père, le nom de sa mère, sans doute le nom de son meurtrier, l’adresse de son meurtrier, qui est sans doute l’adresse même de ses parents, le mobile du meurtre, l’arrestation du meurtrier, le jugement du meurtrier, ou des meurtriers, et une destinée, une destination finale pour cette enfant, une tombe, une vraie tombe avec dessus ton nom, et tes dates.
Ça fait trente ans qu’on cherche son nom. Trente-trois ans. Mais elle n’a toujours pas de nom. Elle aurait dans les trente-huit ans aujourd’hui. Mais elle n’a pas encore de nom.
Commenter  J’apprécie          10
Voilà ça a repris à l’affaire de l’enfant sans nom.
Migraine et troubles visuels.
Décoordination du son et de l’image.
C’est un corps humain d’accord, tout est conforme, mais la taille. C’est si petit. Et le visage, comme la paume de ma main, pas plus grand. Quelle histoire. Après ça on ne regarde plus. On ne regarde plus rien pareil. Même un nuage, tu ne le regardes plus pareil. Tu le regardes tu te dis « il est immense ». Et violent. Tout est plus violent. Même les nuages passent plus violemment.
La rivière a continué de couler. J’y allais souvent, le soir. Je fumais. Parfois, que la rivière continue de couler, je me disais, c’est ça l’injustice. À un moment donné il faudrait que la rivière s’arrête. J’avais des pensées comme ça. Des moments de confusion.
Commenter  J’apprécie          10

Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Arno Calleja (38)Voir plus

Quiz Voir plus

Ils ont écrit sur des écrivains....

Ronsard a écrit trois volumes de vers pour trois femmes différentes. La première et la dernière, Cassandre et Hélène, ne l’approchèrent point ; l’une parce qu’elle était trop belle et l’autre parce qu’elle était hideuse. C’est du moins ce qu’en disent ceux qui les ont connues ; mais Ronsard, ne voulait rien d’elles que leurs noms à mettre en sonnets, fit Cassandre plus belle encore que Cassandre, et daigna donner à Hélène tout ce que Dieu lui avait refusé. Aussi nous les voyons toutes deux incomparables.

Emile Zola
Jules Barbey d’Aurevilly
Pierre Louÿs
Charles Baudelaire
Victor Hugo

10 questions
49 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur
¤¤

{* *} .._..