AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

4.58/5 (sur 6 notes)

Nationalité : France
Né(e) : 1986
Biographie :

Arthur Dénouveaux, né en 1986 et diplômé de l’École polytechnique, est entrepreneur. Survivant de l’attentat du Bataclan, il préside l’association de victimes «Life for Paris : 13 novembre 2015».

Source : https://tracts.gallimard.fr/fr/t/contributor-490170
Ajouter des informations
Bibliographie de Arthur Dénouveaux   (5)Voir plus

étiquettes
Videos et interviews (5) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de

C à vous https://bit.ly/CaVousReplay C à vous la suite https://bit.ly/ReplayCaVousLaSuite — Abonnez-vous à la chaîne YouTube de #CàVous ! https://bit.ly/2wPCDDa — Et retrouvez-nous sur : | Notre site : https://www.france.tv/france-5/c-a-vous/ | Facebook : https://www.facebook.com/cavousf5/ | Twitter : https://twitter.com/CavousF5 | Instagram : https://www.instagram.com/c_a_vous/ Invités : Arthur Dénouveaux - Rescapé du Bataclan, président de l'association « Life for Paris » Charlotte Piret - Journaliste au service Enquêtes et Justice de France Inter Maître Xavier Nogueras - Avocat de la défense dans le procès du 13 Novembre 2015 • le survivant, la journaliste et l'avocat de la défense • 3 voix pour un procès • Procès du 13 novembre : un récit à 3 voix

+ Lire la suite

Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Arthur Dénouveaux
« Sombre jour, sombre nuit » (Écrit deux jours après le 13 novembre 2015 )


13 novembre 2015, le ver est entré dans le fruit ou la ronde de l’espoir pour chasser l’ombre de la mort.

Le peuple unanime a dit :
« Sombre jour, sombre nuit,
Le ver est entré dans le fruit.
Nous n’irons plus au bois
Cueillir des bouquets de primevères,
Ni fleurir de lilas les anniversaires,
Mais porter au cimetière,
À nos frères et à nos amis,
Des fleurs aux feuillages éplorés
Dont l’ombre leur sera légère. »

Sombre jour, sombre nuit,
Le peuple s’est terré dans son cœur.
Au fil des journaux, la terreur a craché ses rumeurs.
Quelqu’un a dit : « Que le peuple reste chez lui !
Puisque le jour est sombre, et sombre la nuit,
Qu’il n’aille plus au bois
Cueillir des bouquets de primevères,
Ni fleurir de lilas les derniers et tristes anniversaires,
Ni écouter au bois les cors mélancoliques
Qui claironnent à tout-va :
« Le ver n’a pas quitté le fruit ».

Le peuple désolé a dit :
« Sombre jour, sombre nuit,
Les étoiles ont fui vers les lointains horizons de l’univers,
Et les réverbères, craignant d’être dénoncés à la Terreur,
Se sont éteints ou se sont cachés
Autour desquels tournoyaient les « éphémères » … humains ».
D’une voix douce, quelqu’un a dit :
« Un seul ver a suffi pour tuer le fruit » … et tutti frutti.
Et un autre, d’une voix qui tremble, avec une violence contenue :
« C’est un expert en tueries
Venu de la lointaine Syrie, ou de je ne sais quelle étoile
Tombée du profond et sombre azur.
Il se cachait « courageusement » derrière une femme vêtue comme un fantôme,
Avant de viser au cœur nos pauvres enfants,
Nos enfants morts innocents ».

Et un autre citoyen, avec une colère dévastatrice :
« Ô journée de deuil. N’a-t-il pas un cœur, ce maudit pirate
Qui écume Paris pour remplir les cimetières ?
Et arrache la mère à son enfant et les enfants à leur mère.
Peut-il donc être Français,
Celui qui vient de France et s’en revient doucettement en France,
Sa mère nourricière,
Pour verser le sang de ses frères, de ses cousins et de ses nièces, et de tutti quanti ?
Mais, vous qui osez chanter … que viennent donc faire dans cette affaire les lilas et les primevères ? ».
Le peuple plus sinistre que sombre a redit :
« Sombre jour, sombre nuit,
Comme un jour sans pain, comme une nuit sans fin,
N’allons plus au bois, mes amis,
Cueillir des bouquets de primevères,
Pour fleurir de lilas les derniers des derniers anniversaires,
Ou écouter dans les bois les cors mélancoliques
Qui claironnent à tout-va
– les entendez-vous » :
« Le ver n’a pas quitté le fruit.
Nous ne rirons plus,
Et nos chants montant de notre cœur
Resteront au fond de notre gorge
Pour ne pas trahir notre angoisse ».

Quelques citoyens désabusés :
« Rien ne serait donc perdu ? Mais tout finit !
Notre roi en a décidé ainsi :
« Le bois de Vincennes restera fermé, de jour comme de nuit,
Que le jour soit clair ou que la nuit finisse,
Aussi longtemps que le ver ne sera pas sorti du fruit …
Tout fruit est un fruit défendu !
Car le poison du ver contamine tous les fruits ».
Et puis, une citoyenne se ressaisissant :
« Que nous veulent ces lâches et féroces assassins ! Qu’on leur réserve les derniers supplices ! ».

Le peuple tout entier a redit :
« Sombre jour, sombre nuit ».
Certains, avec un cri rentré dans la gorge, ont dit :
« Nous ne voulons plus du ver à aucun prix !
Qu’il reste ou qu'il quitte le fruit, que nous importe,
Nous ne retournerons plus aux bois
Cueillir des bouquets de primevères,
Ni, s’il en reste, les derniers lilas aux fleurs éteintes,
Pour refleurir les derniers des derniers, les tout derniers anniversaires,
Ceux qui viendront comme ceux qui sont déjà échus.
Puis parcourant nos villes et nos villages, la mort aux trousses,
Pour nos frères et pour nos amis, vivants et morts,
Nous dessinerons sur les murs de leurs antiques maisons
Des primevères et des lilas aux feuillages éplorés
Pleurant de tristesse les beaux jours évanouis.
Et notre drapeau sera en berne et Notre-Dame pleurera nos rêves déchus
Au vent glacé de la réalité ».

Un père à ses enfants, ne pouvant plus crier, a dit mezza-voce :
« NON ! RÉSISTONS et que le jour cesse d’être aussi sombre,
Et que s’enfuie la nuit noire plus noire qu’une tombe !
Et que notre sourire s’étale au fronton des églises,
Et aux minarets des mosquées « françaises »,
Et au front de nos nobles défenseurs.
Partout la joie sera vainqueur ».
Puis, avec une soudaine vigueur, cet inconnu, retrouvant son cri :
« NON ! Nos ennemis ne feront pas la loi dans nos foyers !
Et leurs flèches, visant nos cœurs, vibreront et voleront par-dessus nos maisons,
Avant de tomber en cendres dans nos prés et nos jardins.
Et nous crierons : restons debout ; seuls les morts sont couchés ! ».
Le peuple a répondu : « OUI, cessons d’arborer des visages sombres comme des tombes.
C’est bien assez que le jour ancien et la nuit prochaine soient si clairement sombres. »

Un Français, un patriote peut-être, dressé sur la statue de la République, a chanté :
« Le jour redevient lumineux, la prochaine nuit sera claire.
Pourquoi réserverions-nous à ces cohortes étrangères de « Français »
Les derniers supplices ? Chassons-les …
Ce n’est pas l’Apocalypse !
Contre les mots sanglants, levons-nous, comme on se lève contre les fous sanguinaires et les lâches incendiaires. »

Une Française, berçant un poupon dans ses bras :
« Et après tout, pourquoi un fruit serait-il défendu ? ! S’il vous plaît, pas de turlutaine.
Je veux croquer à pleines dents le fruit, s’il est défendu, surtout s'il est défendu …
Mangeons notre pain quotidien, ou les quelques miettes qui nous restent,
Pour qu’aucun jour ne soit un triste jour sans pain,
Et qu’aucune nuit ne soit désormais une tombe muette.
Car, plus jamais le ver ne pourrira le cœur du fruit.
Plus jamais la bouche d’ombre ne dévorera un fruit pourrissant sur la branche inerte.
L’espoir refleurira et nous rallumerons nos cierges et nos réverbères …
Aux clartés de l’espoir pour illuminer les cœurs et les visages
De ceux que nous aimons, de ceux qui nous haïssent.
Et nous leur porterons les doux lilas et les joyeuses primevères
Pour fleurir tous les anniversaires.
Mais nous n’oublierons pas de porter au cimetière,
À nos frères et à nos amis,
Des fleurs aux feuillages éplorés. Écoutez d’avance le chant du poète :
« Leur pâleur en est douce et chère,
Et leur ombre sera légère
À la terre où ils dormiront ».

Et alors, la foule, doucement d’abord, puis s’enhardissant fit s’élever de ses milliers de voix ce cri unanime et assourdissant :
« Et alors le jour cessa d’être sombre,
Et la nuit même cessa d’être une ombre.
Et nous ne marchons plus comme des ombres !
Et les morts quittent leurs tombes ».

Perché sur les épaules de Marianne, ce nouveau colosse – le mélancolique optimiste entonna la « Ballade de celui qui chanta dans les supplices » :
« Et si c’était à refaire
Je referais ce chemin
Une voix monte des fers
Et parle des lendemains … » (Aragon. « Ballade de celui qui chanta dans les supplices »).

Et en un refrain repris par toutes ces gorges profondes, depuis le plus petit des Français jusqu’au plus grand, depuis le plus jeune jusqu’au plus vieux, du plus triste jusqu’au plus compatissant, du plus calme au plus inquiet, ils chantèrent avec une ferveur toute neuve :
« Une voix monte des fers
Et parle aux hommes de demain …
Et parle aux hommes des lendemains de nouveau fleuris,
Où nous pourrons de nouveau aimer
Car le Ciel sera de nouveau haut et paisible
Et Paris et la France seront de nouveau Paris et la France, libérés ». (D’après Aragon)

VIVE LA FRANCE, VIVE LA RÉPUBLIQUE
Commenter  J’apprécie          00
Arthur Dénouveaux
Comment revendiquer la reconnaissance et faire entendre sa voix sans se trahir ? C’est la principale préoccupation des victimes. Ne rien faire, se taire, c’est se renier et céder à la tentation de se retirer du monde. En faire trop, c’est se déconsidérer et risquer d’être mis sur le même plan que son agresseur, de sombrer à terme dans l’indifférenciation violente de la vengeance. Demander trop ? C’est s’exposer à être accusée d’agir par intérêt. Maudire son bourreau ? C’est risquer de se voir reprocher de l’expulser de l’humanité sous prétexte de vouloir y rentrer. La voie est étroite, on le voit, et l’on a vite fait de basculer d’un côté ou de l’autre…
Commenter  J’apprécie          01
Arthur Dénouveaux
La victime ne naît pas victime, elle le devient. Mais peut-elle cesser de l’être ? Dans le rôle que lui assigne la société, la victime « est » mais ne peut pas devenir autre chose. Elle a été baptisée par un acte fondateur qui a déchiré son identité précédente. Sa reconnaissance se borne en quelque sorte à la qualité qui semble la caractériser : la souffrance [...] Pour que la rémission puisse devenir guérison, il faudra que la société accepte que la victime redevienne anonyme. L’incognito sera le signe qu’elle l’a, à nouveau, accueillie pleinement en son sein.
Commenter  J’apprécie          00
Arthur Dénouveaux
Les autorités françaises ont très tôt reconnu aux victimes d’actes de terrorisme le statut de vic-times de guerre. Mais de quelle guerre s’agit-il ? Pas d’une guerre interétatique, ni même d’une guerre asymétrique mais plutôt de la guerre de tous contre tous qui ne doit pas se con-fondre avec la guerre civile. La guerre civile oppose des factions constituées et non des indivi-dus contre d’autres individus dont le mode de vie ne leur convient pas. Ce terrorisme détruit toute médiation sociale, y compris la représentation.
Commenter  J’apprécie          00
Arthur Dénouveaux
Il y a fort à craindre que l’objectif pour la victime de retrouver un état identique à ce qu’elle était avant l’attentat soit inaccessible.[...]Comme la maladie, la condition de victime exige du sujet vivant une lutte pour continuer à vivre ; et donc de redevenir normale[...] Se relever de l’outrage du crime, c’est se fixer de nouvelles normes de vie, parfois supérieures aux anciennes mais jamais identiques ; c’est se fixer la vie comme norme.
Commenter  J’apprécie          00
Arthur Dénouveaux
Il y a fort à craindre que l’objectif pour la victime de retrouver un état identique à ce qu’elle était avant l’attentat soit inaccessible.[...]Comme la maladie, la condition de victime exige du sujet vivant une lutte pour continuer à vivre ; et donc de redevenir normale[...] Se relever de l’outrage du crime, c’est se fixer de nouvelles normes de vie, parfois supérieures aux anciennes mais jamais identiques ; c’est se fixer la vie comme norme.
Commenter  J’apprécie          00
Arthur Dénouveaux
Pour que la rémission puisse devenir guérison, il faudra que la société accepte que la victime redevienne anonyme. L’incognito sera le signe qu’elle l’a, à nouveau, accueillie pleinement en son sein.
Commenter  J’apprécie          00
Arthur Dénouveaux
Le douloureux chemin d’exil que parcourt toute victime et le retour toujours possible à la vie, non seulement rejoint toute expérience humaine mais pourrait bien aussi la guider.
Commenter  J’apprécie          00
Arthur Dénouveaux
La sacralisation ambiguë de la figure de la victime transforme celle-ci en une véritable source d’autorité dans notre monde troublé, une autorité de substitution.
Commenter  J’apprécie          00
Arthur Dénouveaux
La victime se voit attribuer la fonction d’incarner et de conjurer le malheur qui peut frapper n’importe quel membre de la communauté.
Commenter  J’apprécie          00

Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Arthur Dénouveaux (21)Voir plus

Quiz Voir plus

La peau de Chagrin

Comment se nomme le personnage principal?

Valentin de Raphaël
Benjamin De Villecourt
Raphaël de Valentin
Emile

20 questions
1614 lecteurs ont répondu
Thème : La Peau de chagrin de Honoré de BalzacCréer un quiz sur cet auteur
¤¤

{* *}