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Citations de Chrétien de Troyes (289)


Perceval est devenu un parfait chevalier : il a dépassé Keu
et atteint le niveau de Gauvain. En même temps s’est formée
la personnalité d’un homme, de la plus primitive enfance,
ignorante, égoïste, insensible à autrui, dénuée de jugement
personnel, jusqu’à l’âge adulte : maintenant, il laisse parler
les autres (Gornemant de Gort, Blanchefleur), il les découvre
et, pour eux, il risque sa vie ; s’il échoue au château du Graal,
il est capable d’aller au-delà des apparences ; il prend
conscience de l’unité de son moi et de ses responsabilités ;
aussi veut-il réparer ses erreurs passées (envers sa mère et la
demoiselle de la tente, comme plus tard pour le graal). Maître
de lui-même, il fait librement ses choix dès l’épisode de son
affrontement avec les agresseurs de Beaurepaire.
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Le cœur a des pensées que ne dit pas la bouche
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Le départ et l’abandon de la mère, v. 1799-1828 :
Et partout là ù il aloit
III gaverlos porter soloit ;
Ses gaverlos en vot porter,
Mais II l’en fist la mère oster
Por ce que trop sanlast Galois ;
Si éust-elle fet tous trois
Moult volentiers, s’il péust estre.
Une roote en sa main destre
Porta, por son ceval férir.
Plorant le baise au départir
La mère, qui moult cier l’avoit,
Et prie Dieu que il l’avoit :
« Biaus fius, fait-ele, Dex vos maint !
Joie plus qu’il ne m’en remaint
Vos doinst-il, quanque vos aliés ! »
Quant li vallés fu eslongiés
Le get d’une pière menue,
Se retorne et si voit chéue
Sa mère au cief del pont arrière,
Et giut pasmée en tel manière
Com s’ele fust kéue morte.
Et cil feroit, de la roote,
Son cacéour parmi la crupe ;
Et cil s’en va, ki pas n’agrupe,
Ains l’enporte, grant aléure,
Parmi la grant foriest oscure,
Et chevauce très le matin
Tant ke li jors vint à déclin.
En la foriest, cele nuit, jut,
Tant que li jors clers aparut.

Et, partout où il allait, il avait l’habitude de porter trois javelots. Il voulait donc emporter ses javelots. Mais la mère lui en fit ôter deux, parce que cela faisait trop Galois. Elle eût bien volontiers fait de même avec le troisième, si cela eut été possible. Il portait un bâton dans sa main droite, pour cravacher son cheval. Au moment de partir, la mère qui aimait tant son fils, pleurait, le couvrait de baisers et le recommanda à Dieu : « Mon bel enfant, fit-elle, que Dieu vous garde, qu’il vous apporte plus de joie qu’il ne m’en reste, ainsi qu’à vos alliés. »
Quand le jeune homme fut éloigné d’un jet de pierre légère, alors il aperçut sa mère au sol, juste avant le pont. Elle gisait ainsi, pâmée comme si elle fût morte. Et le fils frappa du bâton son cheval de chasse au milieu de la croupe. Et celui-là s’en va, il n’avance pas au pas mais l’emporte à grande allure parmi la grande forêt obscure. Et il chevaucha depuis matin, jusqu’à ce que le jour vint à décliner. Dans la forêt il reposa cette nuit, jusqu’aux premières lueurs du jour.
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Apparition du Graal et importance de questionner l’inconnu, v. 4368-4429 :
Que qu’il parolent d’un et d’el,
Uns varlés d’une cambre vint,
Qui une blance lance tint,
Empoignie par emmi leu ;
Si passa par entre le feu
Et cil ki sor le lit séoient,
Et tout cil ki laiens estoient
Virent la lance et le fer blanc :
S’en ist une goute de sanc
Del fer de la lance el somet,
Et, jusqu’à la main au varlet,
Couloit cele goute vermelle.
Li varlés voit cele mervelle,
Qui laiens ert noviaus venus ;
Si s’est del demander tenus
Coment celle chose avenoit ;
Que del casti li souvenoit
Celui ki chevalier le fist,
Ki li ensegna et aprist
Que de trop parler se gardast ;
Et crient, se il le demandast,
C’on le tenist à vilounie ;
Pour çou ne le demanda mie.
Atant dui varlet à lui vinrent,
Qui candelers en lor mains tinrent
De fin or ouvret à chisiel ;
Li varlet estoient moult biel,
Qui les candelers aportoient ;
En cascun candelles ardoient,
X candoiles à tout le mains.
Un graal entre ses II mains
Une demoisièle tenoit
Qui avoec les varlés venoit,
Bièle, gente et acesmée ;
Quant ele fu laiens entrée
Atout le graal qu’ele tint,
Une si grans clartés i vint
Que si pierdirent les candoiles
Lor clarté com font les estoiles
Quant le solaus liève ou la lune ;
[…]
Ensi come passa la lance,
Par devant le lit s’en pasèrent
Et d’une cambre en l’autre entrèrent ;
Et li varlés les vit passer
Et n’osa mie demander
Del graal, qui on en servoit ;
Que tous jors en son cuer avoit
La parole au preudome sage ;
Si crient que il n’i ait damage,
Pour çou qu’il a oï retraire
C’ausi bien se puet-on trop taire
Com trop parler à la foïe.

Traduction perso :
Tandis qu’ils parlaient de ci et de ça, un valet arriva d’une chambre. Il tenait une lance blanche, empoignée par son milieu. Ainsi il passa entre le feu et ceux qui étaient assis sur le divan. Et tous ceux qui étaient là virent la lance et le fer blanc : il en sortit une goutte de sang et cette goutte vermeille coula depuis le fer de la lance en son extrémité jusqu’à la main du garçon. Le jeune homme vit cette merveille, mais il était nouveau venu ici. Aussi s’est-il tenu de demander comment cette chose se faisait, car il avait le souvenir de celui qui le fit chevalier et qui lui enseigna à se garder de trop parler. Et c’est pour cela que, croyant que si il posait des questions on le tiendrait pour mal éduqué, il ne posa pas de question. C’est alors que dix valets vinrent à lui qui tenaient dans leurs mains des chandeliers d’or travaillé et coupé finement. Ils étaient bien beaux, ces jeunes garçons qui apportaient les chandeliers. Sur chacun brûlaient plusieurs chandelles, dix chandelles au moins. Une jeune fille belle, digne et élégante venait avec les valets, elle tenait un graal entre ses deux mains. Quand elle fut entrée dans la pièce, avec le graal qu’elle tenait, une si grande clarté en vint que les chandelles perdirent aussitôt leur clarté, comme le font les étoiles quand le soleil se lève, ou la lune. […] Tout comme était passée la lance, ils passèrent devant le divan et entrèrent dans la pièce voisine. Et le jeune homme les vit passer et n’osa aucunement demander au sujet du graal, qui on allait servir. Il avait toujours eau cœur les paroles du sage vénérable. Cependant, on peut craindre qu’il y ait malheur, parce qu’il a entendu exposer qu’on peut aussi bien trop se taire que trop parler.
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C’était au temps où les arbres fleurissent, les bois se couvrent de feuilles, les prés verdissent, où les oiseaux dès le matin chantent doucement dans leur langue mystérieuse et où toute chose de joie s’enflamme. Le fils de la Veuve Dame, qui habitait dans la solitude de la Forêt Sauvage, se leva, puis sella son cheval de chasse et prit trois javelots. Équipé de la sorte, il quitta le manoir et songea qu’il irait voir les herseurs de sa mère qui, à l’aide de douze bœufs et de six herses, labouraient les champs d’avoine. À peine s’était-il engagé dans la forêt que, porté par la douce saison et par le chant des oiseaux qui manifestaient leur joie, il fut saisi d’un incommensurable bonheur. Tout cela lui plaisait ! Le temps étant doux et serein, il ôta la bride de son cheval et le laissa paître dans l’herbe fraîche et verdoyante. Il s’empara alors de ses javelots et les lança avec dextérité autour de lui, tantôt devant lui, tantôt derrière, tantôt vers le haut, tantôt vers le bas, quand il entendit soudain, venant du bois, cinq chevaliers armés de pied en cap.
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Amour lui rouvre souvent la plaie qu'il lui a faite. Aucun emplâtre n'avait jamais été mis pour soigner la blessure et guérir le malade, car celui-ci ne souhaitait ni ne voulait demander emplâtre ni médecin, du moment que la blessure ne s'aggravait pas; il aurait plutôt recherché cette blessure.
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Croyez-moi s'il vous plaît : cette porte était si basse et si étroite que deux hommes n'y pouvaient entrer ensemble à moins de grande peine, et un preux suffisait à la défendre. Pour égorger entre les dents ou pour décerveler des assaillants sans casques, point de meilleur huissier que messire Gauvain!
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"Ha ! seigneur, de grâce ! Levez-vous rapidement d'ici, car vous êtes immanquablement trahi sans avoir commis le moindre méfait : le comte est de toute évidence un traître. [...] il me convoite c'est pour cela qu'il vous hait [...] Vous le verrez bientôt venir en ces lieux : il veut me prendre, me garder pour lui et vous tuer, s'il peut vous y trouver"
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"Nain, fait-elle, laisse-moi passer : je veux parler à ce chevalier, car la reine m'y envoie. "
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Prêtez-moi le cœur et l’oreille car la parole se perd si le cœur n’entend pas.
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Puisque ma dame de Champagne
veut que j'entreprenne de faire un roman,
je l'entreprendrai très volontiers,
en homme qui est entièrement à elle
pour tout ce qu'il peut en ce monde faire,
sans avancer la moindre flatterie.
Tel autre s'y emploierait
avec le désir d'y mettre un propos flatteur,
il dirait, et je m'en porterais témoin,
que c'est la dame qui surpasse
toutes celles qui sont en vie,
comme surpasse tout parfum la brise
qui vente en mai ou en avril.
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Avant d'rriver près des tentes, Perceval vit un vol d'oies sauvages que la neige avait éblouies. Il les a vues et bien ouïes, car elles s'éloignaient fuyant pour un faucon volant, bruissant derrière elles à toute volée. Le faucon en a trouvé une, abandonnée de cette troupe. Il l'a frappée, il l'a heurtée si fort qu'elle s'en est abattue. Perceval arrive trop tard sans pouvoir s'en saisir encore. Sans tarder, il pique des deux vers l'endroit où il vit le vol. Cette oie était blessée au col d'où coulaient trois gouttes de sang répandues parmi tout le blanc. Mais l'oiseau n'a peine ou douleur qui la tienne gisante à terre. Avant qu'il soit arrivé là, l'oiseau s'est déjà envolé! Et Perceval voit à ses pieds la neige où elle s'est posée et le sang encore apparent. Et il s'appuie dessus sa lance afin de contempler l'aspect, du sang et de la neige ensemble. Cette fraîche couleur lui semble celle qui est sur le visage de son amie. Il oublie tout tant il y pense car c'est bien ainsi qu'il voyait sur le visage de sa mie, le vermeil posé sur le blanc comme les trois gouttes de sang qui sur la neige paraissaient.
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Il y a plus de paroles dans un plein pot de vin que dans un tonneau de bière.

[Le Chevalier au Lion]
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Prêtez-moi vos cœurs et vos oreilles, car une parole qu’on entend se perd si elle n’est pas comprise par le cœur. Il y a certaines gens qui ne comprennent pas ce qu’ils entendent, mais qui le louent quand même. Ceux-là ne perçoivent que le bruit des mots dès lors que le cœur n’y comprend rien. La parole arrive aux oreilles, tout comme le vent qui vole, mais elle n’y fait ni halte ni arrêt ; au contraire, elle s’en va très vite si le cœur n’est pas dans une disposition telle qu’il soit prêt à la saisir, car il peut alors s’en emparer, l’enclore et la retenir. Les oreilles sont la voie, le conduit par où la voix pénètre. Et le cœur saisit dans le ventre la voix qui entre par l’oreille. Celui donc qui voudra me comprendre doit me prêter son cœur et ses oreilles, car je ne veux vous servir ni songes, ni fictions, ni mensonges, comme beaucoup d’autres vous ont fait ; je vous raconterai plutôt ce que j’ai vu.

[Le Chevalier au Lion]
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Le paysan, soucieux de la vérité, a un proverbe bien établi : il est trop tard pour fermer l’écurie quand le cheval a été volé.

[Le Chevalier de la Charrette]
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Quand charrette verras et rencontreras, fais sur toi le signe de croix et pense à Dieu qu'il ne t'arrive malheur !

[Le Chevalier de la Charrette]
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Maints grands seigneurs, par leur paresse, perdent la haute gloire qu’ils pourraient acquérir, s’ils allaient de par le monde.
Repos et gloire, ce me semble, ne s’accordent pas bien ensemble, car il ne s’illustre guère, le puissant qui toujours se repose.
La prouesse est pesante au lâche, mais au vaillant la lâcheté est un fardeau : ce sont choses contraires et opposées.
Il est l’esclave de ses biens celui qui toujours les amasse et accroît.

[Cligès]
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Nous la trouvons écrite, cette histoire que je veux vous conter et retracer, dans un des livres de la bibliothèque de monseigneur Saint-Pierre de Beauvais. De là fût tiré le conte dont Chrétien a fait ce roman. Le livre est ancien, qui atteste la vérité de l'histoire : elle en est d'autant plus digne de foi. Par les livres que nous avons, nous sont connus les faits des anciens et ce que fut le temps jadis. Voici ce que nous ont appris nos livres : la Grèce fut, en chevalerie et en savoir, renommée la première, puis la vaillance vient à Rome avec la somme de la science, qui maintenant est venue en France. Dieu fasse qu'on l'y retienne assez pour que l'endroit lui sourie, et que jamais ne sorte de France la gloire qui s'y est arrêtée.

[Cligès]
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Tu étais le miroir de Beauté,
Prouesse te tenait pour son parfait ouvrage,
Savoir t'avait donné son cœur,
Largesse t'avait couronné,
elle sans qui il n'est pas de véritable dignité.

[Erec et Enide]
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Si le ciel tombe et que la terre s’écroule, mainte alouette sera prise.

[Erec et Enide]
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