"La ligne de démarcation" du Colonel Rémy
Le livre du
Colonel RÉMY "La ligne de démarcation, l'épopée des passeurs et des évadés" parle de la partition de la France en plusieurs zones durant l'
occupationallemande de la seconde
guerre mondiale et du passage
clandestin entre ces zones. le
reportage interroge le
Colonel RÉMY, ainsi que différents résistants dont les actes sont retracés dans le livre. - Extrait du film de...
Puisque le sort m'a privilégié (parmi tant d'autres qui méritaient bien mieux que moi cette insigne faveur) en me permettant d'approcher souvent le Général, d'être parfois honoré de ses confidences, de le voir vivre devant moi au naturel, j'ai conçu l'ambition d'être vis-à-vis de toi, ami lecteur, comme un introducteur officieux qui te ferait entrer dans l'intimité d'un homme dont le nom, plus que jamais, figure sur toutes les lèvres, mais dont un destin singulier fait qu'il est en même temps, sans aucun doute, le Français le plus mal connu de France.
[p13]
les états majors gagnent
les guerres, les politiques
décident du sort des nations, et les combattants
ne sont en fin de compte
que bien peu de chose.
l, ingratitude et l, oubli sont chez eux une routine.
pardonnez, mais n,oubliez
pas,ou vous serez blessé à
nouveau.le pardon permet
de relativiser,tandis oublier
fait disparaître la leçon.
Il est des cas où l'honneur, au sens vrai du terme, se montre si âpre dans son exigence qu'il faut accepter, pour le servir, de renoncer à ses apparences : pareille abnégation est si rare, et d'une essence si noble, qu'elle ne peut être comprise que de coeurs d'élite.
C’est dans la cour de la gare Saint-Jean, à Bordeaux, que m’attendait mon premier contact avec la Résistance intérieure, au moins sous sa forme populaire. Le train venant de Libourne m’a débarqué à la nuit tombée, et le black-out est rigoureux. Je crois me souvenir de l’existence de grilles, que l’obscurité qui règne empêche de distinguer. Une auto qui vient de la ville et cherche sans doute l’entrée de la cour allume un bref instant ses phares. Surpris dans leur faisceau, un piéton fait un bond. Craignant de l’avoir heurté, le conducteur stoppe sur place. Furieux, l’homme l’apostrophe : « Va donc, eh ! enc… »
- Qu’est-ce que c’est ? demande une voix à l’accent guttural.
- Enc… que j’te dis. T’es qu’un enc… !
L’automobiliste passe la tête par la portière. C’est un officier de la Wehrmacht.
- Voulez-vous parler poliment ?
- Poliment, moi, à un enc… ! Je leur cause pas, moi, aux enc… Je les emm… !
- Viens donc, intervient une femme qui est jusqu’alors demeurée dans l’ombre, et qui s’efforce de tirer son mari par la manche.
- Laisse-moi. D’abord, j’en ai marre, de tous ces enc… Qu’est-ce qu’y f… ici, cet enc… ?
Il se penche vers l’officier et répète posément :
- Enc…, j’te dis. T’es qu’un enc…, un sale c… d’enc… !
Pour triviale qu’elle soit, cette petite scène me réjouit le cœur. Je préfère de beaucoup le style énergique de cet ivrogne aux momeries larmoyantes de la presse vichyste.
pourquoi ai je si longtemps hésité avant
d écrire un chant 🎶 sur ses atrocités
Léon le noir
prêtre de tulle déporté a Buchenwald
le vent ne chante plus que
les morts.
la terre est frêle a l horizons.
tout est passé dans l avenir.
on les trouvait partout
dans les halliers.
au beau matin.
au fond d'un matin noyé
sous la pluie.
et la nuit n était jamais à
l heure a cause d eux.
Pour que la France un jour renaisse à la lumière
Dans le ciel élargi d'un matin triomphant
Ces héros, ces croisés, ces hommes, ces enfants,
Firent de l'ombre leur tanière.
[p120]
Dès l'entrée en guerre du IIIe Reich contre la Russie, Pépé devint commandant d'un groupe armé d'appartenance communiste, qui opérait dans la Somme et la Seine inférieur, et qui allait prendre la dénomination « F.T.P.F. » (« Francs-Tireurs et Partisans Français »). J'ai connu des F.T.P.F. de l'an 1942 : tout me séparait de leurs convictions, mais il est de mon devoir de saluer leur courage. Au contact de l'ennemi qui occupait notre sol, ces communistes-là avaient retrouvé la notion de la réalité française. Chef F.T.P.F., Pépé a maintenant sous ses ordres plusieurs de ses « durs » qui, tout comme lui, sont entièrement dévoués à Ponchardier dont ils exécutent sans barguigner les harassantes consignes, transmises par le truchement de leur commandant. (page 167/168)
Première nuit après l'arrestation d'un ami. Il y en aura beaucoup d'autres semblables à celle-ci, que je passe étendu sur mon lit, les yeux ouverts dans le noir [...]
On entendra trop souvent à la radio, dans les années qui suivront, de mystérieux messages qui parleront de malades ou de contagieux. C'est pestiférés qu'il eût fallu dire. A mon insu, la longue tournée que j'ai entreprise [pour prévenir les autres de cette arrestation] est un faire-part de deuil. Chacune des visites que je rends écarte un peu plus de nous celui qui, hier encore, était notre camarade. Nous le rejetons inconsciemment de nous-mêmes, nous creusons entre lui et nous un fossé que chaque mise en garde rend plus profond. Un jour, il y disparaîtra sous les pelletées de notre crainte.