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Citations de Daniel Biga (62)


Daniel Biga
Désert



Dans le vent de sable sous nos pas
la dune vit glisse plisse se ride s’éclipse
en place restent quelques granions de fer une ampoule de silicea
une dose d’aurum metallicum 30 ch
peu d’eau dans ma gourde de chèvre
dois-je boire maintenant ? (ou encore attendre)
au bord d’un torrent de pierres sèches
court la rare eau potabile de la seghiame
protégeant sous ma gandoura en cheveux de chameau
derrière un muret de terre couché
parmi les roses de sable où la géode étincelle
           parfois ton œil coule un peu
l’homme qui tant aime montagne et désert
ne peut être absolument mauvais
(cependant tout être en impuissance devenir meurtrier peut)

le chemin que tu suis tu ne le connais pas
(d’ailleurs pourquoi le suivre autrement ?)
à la tombée de la nuit sur les Aurès près de l’oued sauvage
           un vol de vingt cigognes s’abat

un jour tu écriras sur la neige des vers qui ne connaîtront pas
                                                                                             d’autre page
d’ici là ton doigt avec facilité gravera puis effacera le sable


// revue Secousses, N°19, Juin 2016.
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Et moi aussi
j’ai été huissier des chants
appariteur des couleurs
berger d’enfants
et instituteur des caprins et ovins
j’ai été ingénieur des bétons et bitumes
manœuvre des dossiers et paperasses
j’ai eu une chaire associée de docteur du cœur
et de pharmacien des âmes
mais c’est toujours jardinier de fourmis et scarabées
brocanteur des mûres et chanterelles
troisième classe des eaux et forêts
que j’ai été parfaitement à l’aise
comme le gardon dans son élément
car il n’y a pas un paysage pas une vie végétale
pas une plante au monde
dont je ne me sois jamais senti l’étranger

mais que dirai-je de l’homme ?
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né nu…


né nu

vécu vêtu truqué à peine vivant si peu chair épanouie
et si peu esprit ouvert...
mais si un jour tu n'avais plus peur d'être seul si tu n'avais
plus d'angoisse ni panique parmi ces êtres enfin semblables dénudés

démasqués égaux sans mensonge

né nu
tu te tiendrais à nouveau nu corps et âme
" bonne année ! " que tes vœux les plus subtils éclatent
hors de ta tête dans le corps nu et l'âme nue de la vie
va ! que le matérialisme puissamment dialectique et que
la paix profondément cosmique règnent en toi
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j’ai fréquenté des centurions…


j’ai fréquenté des centurions de lieux de maux déments (mot
ment ?) de gens
ainsi et en devine des mille des cents de mille
tant en Mé-dit-ter-ranée qu’ailleurs partoutou
en quelkue instantanée com(et)préhension manifeste


notre gratitude se conjugue in.finie


avec son identité lieu commun aque sa différence
chaque lieu commun archétype nous rend semblables
simili les uns eaux pareils et pas
ici l’âme Mes-dits-terrainée nul doute l’important
(avec la pose la prose s’impose) ce sont les terrasses sur mer
des villes dont parlait Jean Grenier
le lieu commun du bon heur
(avec la rose)


oui : in fime infinie
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Oiseaux mohicans



extrait 2

– mais mon exemple était celui de...
tu ne peux pas savoir quel son déchiré
faisait ton nom alors
(quand je m’en parlais bas à l’hôtel**)
Je lavais 50 couverts et des casseroles, des écumoires des moules
des saladiers des plats d’argent
LE PLUS DUR A RAVOIR C’EST LE FROMAGE RAPE
et l’eau chaude me montait par les bras
surgit en flot suant au visage
Denise
Maria
lisait les rides de mes mains
« toutes ces crispations dans le gras du pouce :
tu t’abaisses en amour »
– j’écoutais tout ce qu’on disait de moi
et rien que cela à peu près
le besoin de broderie que tu as par le haut
et par le bas
QUI VOIT SES VEINES VOIT SES PEINES
Turini Turini les oiseaux ont-ils le vertige
Parfois
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Homme né en 1940


Extrait 2

le café est-il ciré le whisky dans le vécé les enfants au frigo
dans une certaine aisance voyez-vous doublée
de pauvreté
C’est fait à l’étroit comme dans un cercueil
du 90 de large pour deux ça ne suffit pas
me voilà marié
aussi bêtement que mes ancêtres et pour que
leurs leçons profitent
nous durerons
sans grande convenance sans grand amour
par simple simplicité et pour arranger les choses
C’est fait tout va pour le mieux
je n’en dors plus
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Excusez-moi je ne vais pas très bien…


Extrait 3

Martine Raymond Robert Michel Marie-Claude Yves …
le suicide fut-il votre décision ?
Laurence Jean-Claude André Christiane Tahar Rabah Gilles …
la maladie de la mort fut-elle votre choix ?

J’ai vécu légèrement sans ancre ni boussole
plus d’une fois rompant mes minces amarres flottantes
comme si j’allais mourir jeune
et voilà que je ne le suis plus
qu’il me reste peut-être même longtemps à tirer
j’appréhende ce ne sera pas facile facile
– est-ce ma seule lucidité ?
l’art d’aujourd’hui ne correspond guère à ce que je cherche
pourtant dès que j’affirme ou nie quoi que ce soit
mes propos ne sont que masques et démasques
dans son infinité de courants et de mouvances
indéchiffrables inconnus inclassifiables infigeables
IL N’Y A QUE LA VIE

[…]
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beaucoup de poètes…


beaucoup de poètes semble-t-il exorcisent
leurs démons ‒ et leurs anges ‒ dans l'écriture
moi mes démons collent à ma vie
(et c'est sans doute pour cela que j'avais cru les éliminer
par la voie du silence ne célébrant plus que l’œuvre des louanges)
mais voilà qu'ils m'ont réenvahi
démons et pourceaux cohortes et troupeaux
les voilà qui m'encerclent me pressent m'étouffent ...
pourtant je crie pour toujours
          j'affirme :
      IL N'Y A QUE LA VIE
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Refuges minuscules…


Refuges minuscules au-dessus des tempêtes
urbaines, des vagues de sortie du travail, des
déferlantes manifestations, des naufrages automobiles,
des accidentés de la vie, des parias de la
sociale, des échoués de la famille, des largués de
la sécu... Balcons fragile passerelle au-dessus des
fracas et tracas.
Terrasses bordées de grands lauriers roses
dans les brumes de l’enfance lumineuse. Mêlée
de parfums d’avoines et de feux, de cristal, de
vanille, de roses... Chant clair de moineaux, de
fauvettes, d’alouettes ou de rossignols, roulement
des colombes, pigeons, tourterelles... Clique des
insectes sudistes, orchestre des jardins et campagnes
provençales.
Les feuillages jouent sur les murs, les sols,
les vitres, les flaques. Figures en mouvement,
scènes du fantastique quotidien où se lisent tous
les contes, s’aventurent tous les rêves, se nourrissent
les désirs...
Terrasses. Boissons et nourritures, fruits
frais, viandes grillées, aubergines et tomates,
melons et pastèques... Polars et poèmes, jeux de
mots, mots croisés, belote, dames, échec et mat !
Terrasses des rires fous, des cris, des terribles défis
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Je suis hors du monde…


Extrait 2

Je vis parmi les ruines et je vais où j’ai besoin de ruines et que ça croule autour de moi : où j’ai besoin que la ronce et l’ortie, le sureau et la pariétaire fassent leur travail, habillant la pierre abandonnée... J’ai une peu ordinaire attirance pour la mort. Seulement ce n’est pas la mort, mais une idée, une représentation de mort, une tentation d’éternité, du grand repos des fatigués, des paresseux. Car la mort réelle n’est pas une fin définitive : tout le dit quand on sait regarder le monde autour de soi. La mort est un grand mouvement, un changement majeur : la mort n’est qu’une période majeure de la vie...
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(333) ah ! que j’aime ça la langue ! et la zizique des mots…


Extrait 2

que j’aime ça celle des mains celle des cygnes celle de feu et
l’esprit sain la langue dorée la langue vive tirer la… avoir la…
bien tendue donner ma langue à ton chaton mettre ma langue
dans ta gaine que j’aime ça ! t’asticoter la glotte embrasser tes
glucides te rouler un patin dans la phonétique te couler une
lapine dans la faune éthique chanter dans tes noreilles rigoler

dans tes esgourdes ausculter tes phonèmes m’envoyer tes vrais
nems m’avaler une gorgée de tes voyelles une fricassée de tes
occlusives…
que j’aime ça la langue sa gangue ça tangue et ça zizique!…
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La poésie te hèle…


Extrait 2

l’existence de ces insectes de quelques heures à quelques jours va
dure mais les larves durant ses années préparent la naissance
aussi la beauté incarnée ne peut être que mortelle
aussi l’éclosion des fleurs n’est admirable
que parce qu’elle annonce couleurs flétries pétales fanés
là on se tait souriant on se met à pleurnichialer :
Ave Roma Antica ! Arnica riva montana !
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Excusez-moi je ne vais pas très bien…


Extrait 1

Excusez-moi je ne vais pas très bien
mais vous non plus peut-être …
les masques que jour après jour
les masques que d’instant en instant
je porte pour me dérober à moi-même :
qui suis-je ?

une souffrance qui s’aiguise puis s’émousse
une peur qui s’épuise et se revigore
une souffrance une peur
mais il ne s’agit pas que de cela encore
derrière les mots qu’y a-t-il ? qui est là ?
derrière les mots peut-être rien n’existe
mais « rien » encore n’est qu’un mot
alors comment dire l’au-delà des mots
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Un parfum…



Un parfum va par le monde


un parfum fait de poivre ou miel
de cannelle gingembre muscade ou coriandre
un parfum si essentiel
qu’il ne se trouve pas de mots pour le dire


aussi continue-t-il
inconnu de tous de par le monde
sans nom pour l’arrêter
parfaitement libre parfaitement simple


le savoir (dit-on) éloigne du parfum
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Je suis hors du monde…


Extrait 1

Je suis hors du monde et dans le monde. Abandonneur du monde des hommes — qui me le rendent bien ! A la fois dans et hors du monde de la nature. Je ne suis pas une pierre, je ne suis pas un arbre, je ne suis pas un insecte, pas même un oiseau, pas même un chevreuil. Qui suis-je ? Le manque me semble être du côté de l’amour...
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(4 1/2) j’ suis jamais z’ allé à Trondheim et son fjord
où les cachalots urinent et psoufflent leur ambre gris
je connais mal la Norvège de Pierre et de Camilla
(guère mieux la Sverige de Peter et d’Inghela)
je sais seulement qu’au nord de la Norvège il neige (élans rêves
rennes) nuages de neige l’hiver (l’univers la forêt qui écoute) lit blanc
vers lit vert du printemps tant tendu vers l’été blond des blés
mûrs le cassis des mûres et myrtilles (tout un été dort dans les draps
de la Princesse d’or ma norvégienne sur la colline aux airelles…)
temps tordu vers l’automne roux d’érables doux chouchou de
hêtres houx hiboux (…puis l’hiver blanc sous son édredon d’eider :
quand tu baissais les paupières la nuit tombait profonde comme un
fjord) une troupe de mouettes une volée de moutons ou la mer
bleue profonde de votre amour
(chère Norvège blonde et bleue je te salue je te salue Lulu)
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Parfois j’ai l’intuition que si je n’écrivais plus – pourvu que ce fût de ma volonté profonde d’une conscience transparente – il n’y aurait plus de barrière entre moi et la vie
Cesserai-je un jour d’écrire ?
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Terrasse

café noir en céramique verte
tasse où jouent ombres et lumières
les feuilles du mûrier

lézards électriques
mésanges plumes heureuses
mes anges gazouillent
et ta main gardienne

comme l’aube puis l’aurore
apparaissent
un sang neuf
circule en moi
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Le soir il était presque toujours le dernier.
Enfin, la plume, guidée par la règle, s’appuyait fortement sur le papier : son bec s’écartait libérant l’encre d’un trait long, épais, définitif.
Alors son cahier ouvert l’élève allait vers le bureau de la maîtresse. Là il attendait.
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Excusez-moi je ne vais pas très bien…


Extrait 2

excusez-moi je ne vais pas très bien
mais vous non plus peut-être …
« le bonheur est une décision » (Tilman) peut-être
pourtant je n’arrive pas à la prendre
mais peut-être certains sont-ils plus doués
mais peut-être ai-je raté un aiguillage mais
je ne sais pas grand-chose je ne sais pas vraiment
effectivement j’ai l’impression de n’avoir pas décidé de ma vie
mais sans doute n’est-ce qu’une impression
ni le monde où je suis né ni la famille où j’ai grandi
ni la tristesse qui peu à peu m’a enveloppé
ni les métiers que j’ai faits ou n’ai pas faits
ni les lieux où j’ai vécu ou n’ai pas vécu
ni les femmes que j’ai aimées ou n’ai pas aimées
IL N’Y A QUE LA VIE
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