- Tu as vraiment des yeux impressionnants, Jade. J'ignorais qu'il en existait de tels de par le monde. Ta colère, ta surprise, ta gêne, j'y lis tout comme dans un livre ouvert...
- [...] Vous êtes comme une fleur à la dérive, emportée par un courant contre lequel elle n'arrive pas à lutter.
- Comme une mauvaise herbe, plutôt.
- Une mauvaise herbe, soit, riposta-t-il dans un éclat de rire. Avez-vous déjà rencontré une plante plus tenace qu'une mauvaise herbe ? On a beau tenter de s'en débarrasser, encore et encore, elles reviennent toujours à l'assaut. Une magnifique métaphore de la vie, ne trouvez-vous pas ?
- Je veux que tu prêtes un nouveau serment. À partir d'aujourd'hui, tu protégeras cette femme comme si elle était moi. Elle sera à tes yeux la chose la plus précieuse au monde, plus encore que ta propre vie, et tu respecteras cette promesse, peu importe le nombre des années, et peu importe ce qui pourra m'arriver dans le futur. À cette condition, mon ami, tu es plus que le bienvenu à mes côtés.
Lorsque je fis mon entrée dans la salle, les yeux rivés au sol, toutes les voix se turent instantanément. Mes cheveux avaient été artistiquement arrangés dans un chignon gigantesque et les flammes des lanternes devaient les nimber en cet instant même d’un halo doré. Nul n’aurait pu douter une seconde de mon identité.
- Tu n'as jamais choisi cette vie, Jade, et je préfèrerais te perdre que d'être ton geôlier.
- Vous l'aimiez, plaida-t-il encore, paupières baissées.
- Je l'aime toujours. C'est une blessure qui ne se refermera sans doute jamais complètement. Mais cela ne veut pas dire que je suis incapable d'aimer de nouveau.
Une nouvelle dispute éclata entre Ruoyan et moi pas moins d’une semaine plus tard. Au fond, je crois qu’il était presque rassurant de voir que nous avions toujours des sujets de désaccords.
- Si une autre personne se sentait seule, alors ces deux personnes pourraient être uniques ensemble, tu ne trouves pas ? Et alors, ils ne seraient plus vraiment seuls...
« J'ai toujours détesté attendre. Petite, déjà, j'abhorrais ces instants d'inaction où le temps semblait s'étirer à l'infini, chaque heure, chaque minute aussi longue qu'une vie tout entière. Cette interminable étendue désertique qui vous laisse en tête à tête avec vos pensées les plus irrationnelles. Cet endroit plein de solitude où la confiance se meurt et le regret devient un monstre qui n'en finit pas de grossir. »
« Il est des blessures que le temps fait suppurer et qui deviennent d'horribles cicatrices. Il en est d'autres qui s'effacent peu à peu, jusqu'à devenir une douleur fantôme qui vous rappelle avec une sorte de nostalgie une époque définitivement révolue. »