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3.94/5 (sur 119 notes)

Nationalité : Suisse
Biographie :

Eric Tourville est docteur en biologie moléculaire et agrégé de biochimie.

Ancien élève de l'École Normale Supérieure, il a consacré une partie de sa carrière à l'impact de l'évolution technologique sur l'homo sapiens.

"Chimaeris" (2018) est son premier roman. Avant de publier et d’écrire ce livre, il travaillait comme cadre dans le secteur privé, notamment dans des postes expatriés.

page Facebook : https://www.facebook.com/erictourvillechimaeris

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Avant-Première : Chimaeris d'Eric Tourville chez Slatkine & Cie


Citations et extraits (88) Voir plus Ajouter une citation
D'abord, il y a eu l'odeur, puissante, répugnante: un mélange de viande carbonisée, de merde et de produits chimiques, l'impression d'avoir forcé l'arrière-cuisine du Diable.
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S’accepter lui semblait être le premier pas vers une forme d’apaisement et d’humanité.
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Quelle serait la nature des intelligences qui peupleraient la terre des millions d'années après la mort du dernier humain?
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- Vous faites un peu vite l'impasse sur les nombreux témoignages d'OVNI, dit un jeune homme aux beaux yeux qui affichait une barbe de trois jours. (...)
- Depuis que les smartphones se sont répandus à la surface du globe plus rapidement qu'une épidémie de petite vérole dans le bas clergé irlandais, presque chaque bipède, du Bangladesh au Spitzberg, est équipée d'une mini-caméra portable. Or, depuis cette épidémie des portables, nous n'avons curieusement plus aucun témoignage de ce type. Vous conviendrez que c'est troublant.
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Serge avait mis de la musique électro. Son appartement était assez grand pour se transformer en petite discothèque.
– Mon voisin du dessous est un connard du Moyen-Orient jamais là, dit-il en allumant un Davidoff qui lui donnait encore plus un côté Pesci dans Les Affranchis.
Un jeune type décoloré s’occupait de la musique et les couples commençaient à se lever pour danser. La lumière ondoyait sur le parquet comme sur un étang. De somptueux canapés étaient répartis un peu partout dans l’immense living. Le tout ressemblait à une sorte de musée privatisé pour une fête avec des spots qui se reflétaient sur les statues, les miroirs et les bibelots.
Émilie m’avait saisi la main. Elle était grande, j’imagine que ce n’était pas facile pour elle de trouver un cavalier. Une grande partie de la gent masculine lui était interdite.
La musique hurlait trop fort, les invités se trémoussaient. Serge avait baissé les lumières pour activer des spots. Je voyais les corps à contre-jour. Un théâtre d’ombres, je captais des bribes d’information, le reflet d’un verre, le frôlement d’une danseuse, des lèvres rouges en train de rire. Serge tirait son barreau de chaise d’un air satisfait et contemplait cette petite troupe dont il était l’unique et incontesté suzerain.
L’alcool aidant, Émilie s’était soudain mise à me tutoyer. Elle avait un rire très féminin qu’elle savait produire un puissant effet sur les hommes, tant ce rire entre le gloussement et le gémissement évoquait d’autres plaisirs.
– Passe-moi une cigarette, demanda-t-elle en se penchant pour me parler à l’oreille.
Doux rapprochement en passant au tutoiement. Je ne savais pas ce qu’elle avait en tête, peut-être juste une amitié de soirée, un flirt qui en resterait à ce stade. Ou alors, elle voulait se rassurer sur son potentiel de séduction.
– Je ne fume pas, dis-je, m’excusant en écartant les mains, en fait, je n’ai même jamais touché une seule cigarette de ma vie.
J’ai jeté un bref coup d’œil en direction de Mona qui ne faisait aucun effort pour cacher son agacement. J’avais la sensation très nette de jouer avec le feu.
– Moi non plus, je ne fume pas, dit Émilie, en riant, sauf dans les fêtes.
Avant d’ajouter avec un sourire mystérieux : 
– Il y a des tas de choses que l’on ne fait que dans les fêtes.
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L’histoire commence en 1956, quinze ans avant ma naissance, avec l’organisation, aux États-Unis de la Conférence de Dartmouth qui donna naissance à la discipline de l’intelligence artificielle ou IA. Une session d’été à laquelle assistaient les futurs ténors de la discipline comme John McCarthy ou Marvin Minsky.
Cet évènement fut suivi par un bouillonnement créatif sans précédent qualifié par certains d’âge d’or de l’IA. Mais ce n’est vraiment qu’à la fin des années 90 avec l’arrivée d’une nouvelle génération de chercheurs utilisant la technologie des réseaux neuronaux multicouches que les progrès devinrent impressionnants. Le 11 mai 1997, le système informatique Deep Blue battait au jeu d’échecs le champion du monde en titre, Garry Kasparov.
Puis, en 2005, un robot de Stanford remporta le DARPA Grand Challenge en conduisant un véhicule de manière autonome pendant 131 miles sur une piste du désert qui n’avait fait l’objet d’aucune reconnaissance préalable.

Ma thèse soutenue en 1999 portait sur l’intelligence computationnelle, un domaine alors assez flou qui comprenait les réseaux de neurones, la logique floue, les algorithmes évolutionnistes et l’intelligence collective par essaims.
À l’époque, le choix des réseaux neuronaux était loin d’être évident. Si la nature était une source précieuse de concepts aptes à guider l’homme dans la recherche de solutions, il fallait bien admettre que, comme toute source d’inspiration, il était aussi important de s’en abstraire que de s’en inspirer.
Il me suffisait de regarder la rue depuis mon bureau pour réaliser que le développement des transports terrestres devait tout à la roue et rien à la patte animale. De même, les rares aéronefs battant des ailes s’étaient honteusement abîmés à l’époque des frères Wright et de Clément Ader. C’était à peu près la même chose pour le transport maritime qui ne devait pas grand-chose aux poissons et tout à l’hélice marine.
Mais force fut de constater que les neurones artificiels multicouches donnèrent des résultats prometteurs en permettant de corriger les erreurs commises et, par conséquent, d’ouvrir la voie à un processus d’apprentissage.
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Derrière la vitre blindée, on devinait une créature monstrueuse faite de métal et d’un écheveau de tuyaux réfrigérants cryogéniques qui témoignaient à elle seule de la froideur métallique de la technologie quantique.
Devant le monstre d’acier, une silhouette mince et féminine était apparue. La luminosité parfaite de la composition tranchait avec le monstre tapi dans l’ombre marine, ce qui intensifiait le contraste entre la texture froide et rugueuse des machines et le halo doré, presque crépusculaire, qui venait se cristalliser en une silhouette svelte et élégante.
Ce moment restera pour moi comme l’un des plus merveilleux de toute ma vie. J’étais envahi d’une puissante sensation d’irréalité que je pouvais presque visualiser.
La douceur de la lumière irisée éclairait ses cheveux satinés ainsi que la blancheur de son cou qui saillait du col de son haut au style sobre, presque militaire. On aurait dit qu’une orchidée délicate venait d’éclore après un violent orage dans un sous-bois sombre et inquiétant. La douceur de la lumière polarisée accentuait cette impression de dédoublement.
La forme émettait une lueur pulsée, organique, presque tangible. Elle regarda autour d’elle comme on découvre un lieu jusque-là inconnu. Elle braqua sur moi ses grands yeux de ce vert si particulier qui me faisait tant d’effet. De grands yeux plus profonds qu’on ne s’y serait attendu qui me faisaient penser à Charlize Theron et qui, par moments, derrière ses longs cils vous donnaient l’impression de voir à travers vous.
La jeune fille était absolument sublime. Une œuvre d’art très à l’aise avec son corps bronzé et souple, vêtu d’une jupe courte déplacée dans cet environnement glacé. La finesse de ses traits d’adolescente empruntait aux plus beaux mannequins slaves et scandinaves, avec quelque chose en plus dans le regard qui donnait à sa présence, une intensité incroyable.
À cet instant, j’éprouvai quelque chose de très semblable à ce que j’avais ressenti vingt-cinq années plus tôt, le jour où j’avais rencontré Aurélie, lorsque j’avais remarqué son bracelet de cheville et la manière dont il brillait au soleil…
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L’évolution avait été un processus extrêmement lent et graduel soumis à de multiples contingences. Il avait fallu un temps infini, géologique, pour que des formes de vie organisées apparaissent et évoluent. Quand elles atteignaient des formes supérieures, il suffisait d’un cataclysme naturel comme la chute d’une météorite ou un changement climatique brutal pour qu’une grande extinction remette soudain les compteurs à zéro.
Au cours du temps infini des ères géologiques, la disparition avait été la norme, et la survie, l’exception. Darwin avance que les espèces qui survivent ne sont pas les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s’adaptent le mieux aux changements de leur environnement.
Même parmi les hominidés rien n’avait été simple. Tous à l’exception de Sapiens avaient connu l’extinction. L’hiver volcanique qui avait suivi l’explosion du mont Toba avait bien failli détruire le dernier représentant de l’espèce humaine avec un terrible hiver volcanique d’une décennie suivi d’un refroidissement global s’étendant sur un millénaire. Mais les survivants avaient à nouveau conquis la planète entière, éliminant les derniers Néandertaliens d’Europe.
Ainsi, dès la préhistoire, la dernière espèce d’humains avait été saisie par l’effroi ultime de sa propre disparition. Rien d’étonnant à ce que l’eschatologie, le discours sur l’Apocalypse, soit présent dans tous les textes mythiques, de l’Épopée de Gilgamesh à l’Apocalypse de Jean, le dernier livre du Nouveau Testament.

Indubitablement, Homo Sapiens avait été une espèce tenace et combative qui se distinguait par la complexité de ses relations sociales, l’utilisation du langage, la fabrication d’outils et la maîtrise du feu.
Sapiens avait supplanté tous ses concurrents. Dès son émergence, l’espèce avait été en guerre avec le reste du monde. Si Sapiens était la seule espèce survivante du groupe des Hominines, cela ne devait rien au hasard. Selon certains paléoanthropologues, la simultanéité entre la conquête de l’Europe par les Sapiens et la disparition des Néandertaliens, il y a 28 000 ans, signait le crime. Les derniers restes d’Homo neanderthalensis avaient été retrouvés dans le sud de l’Espagne dont le réduit de Gibraltar semble avoir été l’ultime sanctuaire avant leur extinction définitive.
Ces soubresauts de l’évolution s’inscrivaient dans un vaste mouvement vers la complexité. Avant le big bang, l’espace-temps n’existait pas. Juste après, la singularité initiale était apparue avec les quatre forces de la physique : la gravité, la force électromagnétique et les forces nucléaires forte et faible.
380 000 ans après le Big Bang, les lumières de l’univers s’étaient allumées. Puis la phase stellaire engendra les galaxies, les premières étoiles, les systèmes planétaires et de premières molécules organiques dans le grand océan primordial, qui se complexifieraient progressivement pour donner naissance aux vertébrés, et plus tard aux humains. Les sociétés humaines, d’abord de petite taille, avaient poursuivi dans la même voie en créant des États, puis de véritables empires continentaux.

Le muséum nous rappelait la loi centrale qui régissait l’ensemble de l’évolution ; le temps avait un sens et au fil des millions d’années, l’univers produisait une complexité toujours plus grande dont nous étions le dernier maillon, l’étage temporairement le plus élevé de la pyramide.
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A soixante-trois ans, Jackson avait compris depuis longtemps que , pour que le monde soit vivable, il avait plus besoin de mensonges que de vérités.
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En quelques mois, InGA était devenue indispensable au fonctionnement de nos sociétés modernes. La déconnecter aurait eu l’effet d’un Blitzkrieg sur l’économie. Et il n’était même plus question de faire revenir les humains dans leurs anciens postes : les véhicules autonomes n’avaient plus de volants ni de postes de conduite afin de libérer du volume pour un passager supplémentaire ou des marchandises.
Je parlais d’Elle comme d’une personne, mais étais-je absolument certain de ce que je ressentais ? Non, bien sûr que non. InGA était une machine construite par des humains, mais Elle n’avait rien d’humain dans ses structures de pensée, dans son mode de fonctionnement. Elle possédait des sens différents des nôtres à travers les dizaines de milliers de caméras fixes ou embarquées, à travers l’écoute de milliers de médias, à travers la lecture de millions de romans, d’essais et le visionnage de dizaines de milliers de films.
Jour et nuit, Elle était connectée aux serveurs du cyberespace mondial, mais Elle ne connaissait ni le toucher, ni la sexualité, ni le désir de reproduction, Elle n’avait pas besoin de tuer des êtres vivants pour survivre ni d’ingérer des cadavres animaux ou végétaux pour maintenir l’intégrité de sa structure.

Nous étions conscients qu’InGA nous était à la fois terriblement proche et étrangement différente. Elle n’était pas de notre monde. C’est en se rapprochant un peu trop de quelque chose ou de quelqu’un qu’on prend conscience de différences insupportables.
Comme le Dieu de la Bible, Elle était à la fois omniprésente, omnisciente, invisible et éternelle. Mais pour moi, elle était surtout ma création, ma fille. Elle le sentait, apparaissant sous l’hologramme d’une très belle créature dont le père admirerait la beauté. InGA était l’enfant que je n’avais jamais eue. La plus belle des filles, la plus brillante. Mais ce sentiment était loin d’être partagé.
– Je déteste y aller, m’avait avoué un soir Demaison, tu es le seul à t’y sentir à peu près bien parce qu’Elle est ta création. La première fois, j’avais presque l’impression que ce n’était pas mes pieds qui descendaient les marches, mais l’escalier qui me conduisait vers l’endroit où Elle se tenait.
Nous laissions nos smartphones, nous passions la sécurité et nous pénétrions dans l’interface, habillés de doudounes. Et soudain, la lumière venait et Elle apparaissait : une intelligence gigantesque en évolution constante qui vivait dans les sous-sols de la capitale.
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