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Critiques de Ernest Daudet (2)
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La Police et les Chouans sous le Consulat e..

Longtemps, j'ai cru que la mort de l'activiste proroyaliste Georges Cadoudal, le 25 juin 1804, avait mis un terme aux entreprises antigouvernementales de la Chouannerie contre le régime Consulaire puis Impérial, surtout que Napoléon Bonaparte avait manifestement l'intention de laisser des représentants de la noblesse malmenés par la tourmente révolutionnaire entre 1789 et 1799 rentrer en France et y refaire souche en échange de leur consentement à la reconnaissance des nouvelles institutions. Napoléon avait même consenti à rendre à l'Église sa place prépondérante dans la société française par la signature d'un Concordat, mais sans reconnaître au catholicisme le droit de réendosser ses anciens attributs de religion d'État, ce qui ne pouvait que pacifier les relations du nouveau régime avec les représentants de l'ancien. Seulement voilà, Napoléon n'entendait pas faire un pas de plus, et n'entendait pas être celui par qui la monarchie bourbonienne serait restaurée et rétablie sur le trône. Il le fit clairement et fermement comprendre au chevalier d'Andigné le 27 décembre 1799 : "Rétablir les Bourbons, jamais". Les portes claquèrent, et ceux qui pensaient que Bonaparte servirait de marche-pied à Louis XVIII, comme un nouveau Monck, en demeurèrent pour leurs frais et perdirent en un instant toutes leurs illusions. Tous pont rompus, ces fervents serviteurs et tenants de la royauté n'eurent pas d'ennemi plus grand, à leurs yeux, que ce général qui allait sous peu, le 2 décembre 1804, se faire couronner Empereur des Français. Entre-temps, il y eut l'explosion de la Machine Infernale sur le trajet du Premier Consul se rendant à l'opéra (pas l'Opéra Garnier, bien évidemment, car celui-là surgira de terre sous Napoléon III), mais cet attentat du 24 décembre 1800, rue Saint-Nicaise, dont Bonaparte sortit miraculeusement indemne, ne fut pas interprété, on le sait, par le principal intéressé comme un crime perpétré par les royalistes mais plutôt comme un complot signé par des néo-jacobins. Napoléon dut bien finalement admettre, grâce aux méthodes employées par Joseph Fouché, qui dirigeait déjà la Police sous le Directoire, que la tentative d'assassinat venait bien des supporters de Louis XVIII. Sans doute, à partir de ce moment-là regarda-t-il d'un autre oeil ces agents de la monarchie et leur voua-t-il une haine égale à la leur, ce qui expliquerait son inflexibilité dans l'enlèvement, le jugement sommaire et l'exécution du duc d'Enghien le 21 mars 1804. C'est le livre qu'Ernest Daudet, frère d'Alphonse, a consacré à La Police et les Chouans sous le Consulat et l'Empire qui m'a le plus convaincu que c'est l'acharnement des royalistes à éliminer Napoléon Bonaparte qui a amené ce dernier à frapper contre eux des coups terribles. Je dois cette lecture à Sylvie Dutot, rédactrice en chef et directrice de publication de la revue Histoire Magazine, et qui vient de faire republier ce livre d'Ernest Daudet, incontournable ouvrage sur le thème indiqué dans le titre précité, et qu'elle a doté d'une préface signée Jean Tulard, célèbre historien et biographe de Napoléon et membre de l'Institut. Ce livre est en effet un classique sur la question évoquée et sa matière a été puisée dans les dossiers de la série F7 des Archives Nationales. Il fait revivre devant nous, de manière palpitante, de multiples acteurs royalistes ayant oeuvré, pour certains jusqu'à la mort et d'autres jusqu'à un nouvel exil, contre le Premier Consul devenu par la suite Empereur. Il n'y eut jamais de répit, contrairement à ce que je pensais, et tous les moyens leur parurent bons pour tenter de mener leurs entreprises meurtrières à bonne fin. Et la liste est longue de ces conspirateurs, qui réussirent à enlever un sénateur et pas des moindres, Clément de Ris, et des évêques ralliés à la Révolution ou à l'Empire, ne craignant même pas d'éliminer physiquement certains de ces "traîtres" aux yeux des fidèles du futur Louis XVIII, pillant ou rançonnant selon les besoins, s'entourant d'une multitude de comparses tout aussi dévoués qu'eux à la cause de la monarchie, développant des réseaux sur toute une province, voire même sur tout le territoire, espérant bénéficier du soutien des principaux membres encore en vie de la dynastie des Bourbons et de l'appui financier des Anglais, calculs assez vains mais qui endurcirent ces ennemis du régime napoléonien dans leur projet de tuer Bonaparte. Certains, pris dans une véritable odyssée aux multiples rebondissements puis traqués comme des bêtes dans leurs ultimes retranchements, périront sous les balles au terme de combats héroïques ou devant un peloton d'exécution. D'autres, moins nombreux, réussiront à échapper presque miraculeusement à leurs poursuivants. Ce livre, fruit d'un véritable travail d'historien, a des allures de récit d'aventures et je vous garantis que vous vibrerez à la lecture de ces pages qui, écrites d'une très belle plume, vous entraîneront fort loin jusqu'au coeur de la nuit, car vous aurez du mal à le refermer avant de terminer la lecture de tel ou tel chapitre, au cours de laquelle vous croiserez des personnages hauts en couleurs, certains très inquiétants et d'autres fortement admirables. Aucune de leur destinée ne vous laissera indifférents. Car chacun a cru en ce qu'il faisait. Mais, au total, aucun ne parviendra à embraser toute une région et ses populations comme avaient pu le faire les Vendéens et les Chouans aux heures des grands soulèvements contre la Convention par exemple. Reste que ces individus parvinrent à maintenir suffisamment sur le gril les autorités impériales, au point qu'il fallut pour les surveiller détourner quelques milliers de braves soldats qui devaient cruellement faire défaut à Napoléon le 18 juin 1815 sur le champ de bataille de Waterloo. Vraiment, je vous le dis, ce livre mérite d'être redécouvert, car il est captivant et son style, qui le rend attrayant, en fait un ouvrage de qualité , qui ne s'est jamais démodé.



François Sarindar
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Madame Robernier 3e édition

Le bel et talentueux André, encensé par la presse pour ses dons de sculpteur, fait un retour éphémère dans sa ville natale d'Avignon pour renouer avec son cousin fortuné, M. Robernier, qui, en dépit de son âge avancé, a assumé seul l'éducation de cet orphelin prodige.



Et quelle commotion parmi les jeunes filles de province à la vue de ce beau parisien ! Pauline, une magnifique voisine issue d'une famille modeste, est tombée sous le charme d'André au point de le vénérer et de rêver de l'épouser en l'espace de quelques semaines à peine.



Cependant, ses parents l'ont forcée à s'engager avec M. Robernier sous le coup de la nécessité financière, et le mariage a été célébré dans l'amertume profonde de n'avoir pu conquérir le coeur d'André.



Le couple Robernier s'installe à Paris, où M. Robernier a été élu député.

André est dès lors assailli de visites et de sollicitations de la part de Pauline, sous le regard bienveillant de son cousin aveuglé par ses ambitions politiques.

Ayant succombé accidentellement à son charme quelque temps auparavant, il se trouve désormais piégé et dans une situation bien délicate.

Bien qu'il n'aime pas Pauline, il s'est laissé séduire contre son gré, suscitant ainsi l'espoir éternel dans le coeur de cette jeune femme passionnée. Incapable de la repousser ouvertement sans la blesser, il maintient maladroitement ses visites, se sentant coupable de la tromper involontairement. Toutefois, étant plus prosaïque et fidèle à l'honneur familial, il sait que cet amour impossible ne peut être consommé :



« Pendant près de deux années, Pauline se crut aimée. Elle ne comprenait pas qu'en lui cédant André s'était laissé emporter, non par une affection sincère, mais par un désir violemment surexcité, pas plus qu'elle ne comprit ensuite qu'en lui restant, il obéissait à la force de l'habitude, vaincu par l'ardente passion qu'il avait inspirée, retenu dans ces lourdes chaînes par la peur du désespoir qu'il prouverait s'il tentait de les rompre, par la crainte qu'en se voyant abandonnée, elle ne se livrât à des fureurs qui éclaireraient son mari, odieusement trompé. »





Las des vaines visites dénuées d'intérêt de Pauline, qui cherchait une liaison avec André en dépit de son manque d'affection et sa réticence à ternir l'honneur familial, celui-ci décide de rompre définitivement les liens avec elle.

Mais Pauline, tenace et emportée, use de chantage pour le retenir, faisant preuve d'une audace romanesque peu commune pour les femmes de son époque :



« Oui, sachez-le, si vous me quittez, je me tuerai, et je vous connais trop bien pour croire que vous puissiez porter longtemps la responsabilité de ma mort. »



La situation déjà complexe est encore aggravée par la présence de Thérèse, soeur de Pauline, belle brune espagnole à la candeur touchante, qui commence à envoûter le coeur d'André.

Son cousin le pousse à l'épouser et lui passe même insidieusement une commande pour un buste de la jeune fille, qui doit poser plusieurs jours d'affilée pour le modèle. Mais comment résister à tant de charmes, sans succomber à la tentation ? André est tourmenté par la passion qui l'étreint alors qu'il contemple Thérèse, qu'il sculpte avec ardeur jour après jour, échangeant avec elle quelques mots et regards enflammés.



Lorsque Pauline prend conscience de la situation, elle bouillonne de rage, renverse le buste et admoneste sa soeur, tout en persistant à cacher maladroitement son propre amour pour André.



La situation tourne au désastre : Thérèse se retrouve seule et abandonnée, rejetée par sa propre soeur et confrontée à l'absence d'André, parti à l'étranger pour fuir les tensions qui empoisonnaient leur relation. La maladie finit par s'emparer d'elle, plongeant la jeune femme dans une profonde détresse morale et physique.



Aucun remède ne peut soulager la jeune fille sauf la présence d'André, et lorsque celui-ci arrive, il est trop tard, Thérèse, alitée, meurt sous les regards impuissants d'André et de Pauline.

Ils se noient dans la culpabilité, mais Pauline en particulier, hantée par le souvenir d'avoir maltraité sa soeur, finit par se donner la mort...



Beaucoup de drames, des vies gâchées pour si peu de choses… Des âmes fragiles, incapables de résister aux coups du destin et vouées à une fatalité impitoyable : « Il ne savait pas qu'elle était de ces créatures qui chérissent leurs regrets et ne veulent pas être consolées »



Les deux personnages, André et Pauline, ont une certaine complexité qui les rendent intéressants.

André est un être sensible, passif et doux, mais manque de fermeté de caractère face à la manipulatrice Pauline.

Cette dernière est d'apparence douce mais énergique, déterminée à poursuivre son objectif sans se soucier des souffrances qu'elle peut causer à André. Elle est avide de son amour et refuse toute autre proposition, même si elle est acclamée dans les salons parisiens.

Cependant, les portraits semblent parfois trop artificiels, ayant souvent une tournure excessivement dramatique qui dénature les caractères.



La conclusion de l'histoire est à la fois banale et débordante de drames, avec une surabondance de larmes et de morts soudaines.



Ernest Daudet a une fine observation et une plume talentueuse, à la fois sobre et ingénieuse dans la description des émotions complexes des personnages. Toutefois, j'aurais souhaité des personnages plus extravagants et imprévisibles, ainsi qu'une intrigue plus originale.
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