Au bain des femmes se rencontrent surtout des héroïnes de la galanterie et du plaisir opulent ; les autres femmes se tiennent à l'écart, et les bonnes renommées se séparent des ceintures dorées.
La cantine est pourvue de pâtisseries, de vins fins et d'eau-de-vie ; le punch et quelquefois aussi le vin de Champagne y sont joyeusement fêtés.
On y fume tout autant que chez les hommes.
Un bas-bleu de nos amis, façon d'Androgyne au moral, nous a dit que rien n'était plus charmant et plus gracieux qu'un groupe de baigneuses parisiennes qui presque toutes appartiennent à la fashion galante.
Au bain froid, le corps le plus douillet, que le pli d'une feuille de rose blesserait ailleurs, se roule sur la planche nue.
Après le bain, les femmes se coiffent, s'habillent, peignent et tressent leurs chevelures, et se toilettent au soleil comme font les colombes et les tourterelles ; c'est, dit-on, un ravissant tableau tout à fait dans le goût et le dessin oriental.
Les bains froids et la natation sont dans l'éducation des Parisiennes une innovation qui effraye encore les mœurs pudiques ; ces habitudes pénètrent difficilement dans les classes élevées.
En province, au village, les jeunes filles vont se baigner à la rivière, sans penser à mal; si elles sont surprises, elles ne se fâchent pas comme madame Diane ; elles aiment mieux imiter la nymphe qui se cache, mais qui n'est pas fâchée d'être vue auparavant.
Paris et ses magistrats ont épousé la Seine, comme Venise et ses doges étaient mariés à la mer Adriatique.
Le Parisien, non pas cet être métis qui vient de tous les coins de la France peupler la grande ville, le Parisien pur sang a pour son fleuve toutes les prédilections et tous les goûts qu'on voit se manifester chez les habitants de notre triple littoral.
Le premier plaisir que goûte l'enfant de la Seine, c'est celui de s'essayer à nager.
Paris compte des nageurs supérieurs en force aux plus habiles nageurs des ports les plus fameux ; ce sont tous des enfants du peuple ; tous se sont formés eux-mêmes et sans autres maîtres que leur intrépidité et la nature.
Paris est non seulement la ville de France, mais la seule ville du monde qui ait ouvert des écoles de natation et enseigné cet art avec un corps d'instituteurs et de principes.
La natation, bien avant l'escrime, avant la danse, avant l'équitation et avant la gymnastique, introduite aujourd'hui dans nos écoles, avait pris place dans l'éducation des enfants de Paris.
Cet enseignement fut longtemps épars sur les rives, ne suivant aucune règle et sans être soumis à aucune discipline ; il était plein de périls.
M. Deligny eut le premier l'idée de fonder une école de natation ; ce fut au commencement du siècle.
Le gouvernement autorisa cet établissement ; il y eut même un décret impérial qui ordonnait de créer une école de natation sur le plan de celle de Paris, dans chaque ville où il y avait un lycée.
Ce décret ne fut point exécuté.