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Citations de Eve Chambrot (36)


Ça rabote.
Ça mine, ça ronge, ça use.

Les mots rabotent, rongent. Ils ont ce pouvoir. Ils tarabustent sous la surface des choses, ils vous transforment en l’ombre de vous-même. Ou parfois en quelqu’un d’autre.

Caressants à l’inverse, ils font briller l’argenterie de votre ego. Ils endorment, rassurent, consolent. C’est selon. Le problème, c’est que l’on ne choisit pas. Les autres disent bien ce qu’ils veulent. Et après c’est trop tard : les mots sont prononcés. Tu connais ça par cœur, depuis le temps.

Tu l’as rencontré chez des amis musiciens. Des soirées où l’on buvait pas mal, quoique de manière élégante. C’est lui que tu as vu en premier, en pénétrant timidement dans le salon : tu ne sais jamais comment arriver, ni comment partir d’ailleurs. Il fumait, observant les autres avec une moue nonchalante. Il dominait le groupe par sa stature, Il intriguait par son silence, Il irradiait. Une prestance lumineuse, une classe folle, et toi, aveuglée dès la première seconde. Les autres femmes le regardaient de biais.

À un moment ou un autre de la soirée, la plupart d’entre elles étaient venues bourdonner autour de lui, un verre à la main. Il semblait trouver ça tout à fait naturel : Il régnait. Toi, tu l’observais depuis la cuisine, incapable de te joindre au groupe excité qui l’entourait. C’est pourtant vers toi qu’il s’était dirigé ensuite, te demandant pourquoi tu restais seule, debout devant l‘évier. Tu n’en revenais pas. Surtout ne pas lui déplaire, avais-tu pensé brièvement. À cet instant-là, tu ne savais même pas qui Il était, sinon tu aurais perdu tout courage. Vous avez quitté la soirée ensemble et Il t’a raccompagnée dans une invraisemblable voiture couleur sang qui vrombissait comme un avion. Fin de la scène 1 : les anges et le paradis, les trompettes, le nectar, les dorures.
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Je vous suis dans chacune de vos promenades en forêt, et si je débusque un écureuil c'est que vous l'avez repéré avant moi. Car personne ne parle des animaux comme vous le faîtes. Je me délecte d'un bourdon "au col d'astrakan", du chat "dont le soupir défait tous les noeuds invisibles de l'air, ou du papillon dont les ailes palpitent lentement, "comme on feuillette un livre ancien menacé de tomber en poussière". Vous aimez particulièrement les rouge-gorges, dont l'observation vous ravit, et celui que vous retrouvez mort devant la porte du garage vous inspire le magnifique titre du livre : Dieu est un assassin blanc comme neige.
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C'est difficile de cesser de vous écrire. C'est un peu comme en finir avec une addiction, on a décroché mais on pense tous les jours à reprendre. C'est une lutte de chaque instant. J'essaie de me mettre à distance raisonnable, j'essaie de prendre du recul, ou de la hauteur, enfin n'importe quel éloignement qui me soulagerait de la douleur de vous avoir perdu.
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J'apprends à regarder avec vos yeux, puis avec les miens. Je découvre -- enfin ! -- la beauté du monde. Ce n'est pas un mince cadeau que vos livres me font.
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Lorsque le froid se fait mordant et raidit les draps, la grand-mère passe dans mon lit une bassinoire en cuivre remplie de braises. Se glisser dans des draps chaud avec un livre est un bonheur rare que j'anticipe toute la journée en regardant la neige tomber : ce soir, c'est bassinoire.
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Le problème avec l'angoisse c'est qu'elle se nourrit toute seule, elle enfle de façon concentrique, comme l'escargot construit sa coquille : tout est bon pour faire de la matière.
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Je regrette le cérémonial des passages de douane de mon enfance. Il fallait montrer ses papiers, répondre à des tas de questions, parfois ouvrir le coffre, et, pendant qu'on redémarrait au ralenti, j'avais le sentiment de commencer une palpitante aventure.
Dans le sens inverse, le cérémonial indiquait qu'on était de retour chez nous, avec notre langue, notre monnaie et nos habitudes alimentaires, ce qui engendrait toujours chez moi un sentiment ambivalent, quelque chose comme un soulagement teinté de regret.
Aujourd'hui, pour peu qu'on bavarde à ce moment-là, on passe d'un pays à l'autre sans s'en apercevoir.
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Il est probable que je n'aurai jamais l'occasion de lancer une amarre en me servant d'un noeud de pomme, mais je suis heureuse de posséder cet objet étrange qu'un marinier taciturne aura confectionné pour moi par une belle journée d'août.
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«  Ça rabote.
Ça mine, ça ronge.
Ça use.
Les mots rabotent, rongent. Ils ont ce pouvoir .
Ils tarabustent sous la surface des choses .Ils vous transforment en l’ombre de vous - même .Ou parfois en quelqu’un d’autre » ….
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On vous en veut pour la douleur, on vous est reconnaissant de la délivrance. C'est ainsi que pourrait se distribuer votre lectorat : vos détracteurs, qui nient la douleur que vous leur désignez, et vos admirateurs, qui apprécient le partage et le soulagement.
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Merci beaucoup pour la photo de votre chien. Je dois cependant vous avouer que le regard des chiens, submergé d'une confiance absolue qu'il est si facile de décevoir, me déprime.
(page 77)
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Je suis heureuse ici, autant qu'on puisse l'être, mais les liens discrets qui me lient à la France donnent parfois à ce bonheur une tonalité douce-amère. Je pense à vous qui vivez indifféremment ici ou là, et partout comme à l'hôtel. Je vous envie cette liberté.
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A vrai dire, ce n'était pas l'école que j'aimais mais ce que j'y apprenais.
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J'aime ces pauses, ces silences de papier que vous offrez tout autant que vos mots. J'en attrape comme une maladie, une aversion profonde pour les "romans romanesques" aux pages noircies du haut en bas. Il faut que je respire entre les lignes.
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Certains choix sont sans retour. Après eux, il n'y en aura pas d'autres, car ils tracent un chemin où ne se dessinera plus la moindre bifurcation. Il y a un avant, il y a un après, et tout pas de côté devient subitement impossible tant la voie est étroite. A partir de là il faut tenir, serrer les dents et avancer quoiqu'il arrive.
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« Quand j’ai commencé à mentir à tout le monde, j’ai compris que je m’étais engagé dans un processus irréversible. Gagner du temps, retarder la chute, éviter de regarder trop loin devant. »

« Elle devient folle à force de se demander où il est, ce qu’il fait, quand il rentrera. Elle lui en veut parce qu’il lui inflige tout ça, elle s’en veut de le tolérer. »

" La femme qui attend au bar de l’hôtel semble contrariée. Elle tourne machinalement une petite cuillère en inox dans un café macchiato où le sucre a fondu depuis longtemps. Le bruit régulier que fait le métal en heurtant les parois de la tasse semble agacer les autres clients, elle ne s’en rend pas compte. Lorsque l’homme entre, elle lève la tête et affiche un sourire contraint... Elle avait accepté sans difficulté de lui prêter trente mille euros pour qu’il monte une affaire qui lui semblait viable... "
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Je marchais un peu, je lisais des poèmes assis dans la voiture ou je dormais sur le siège arrière. J'essayais d'éviter la lecture de Dante : ce n'était pas le moment de repenser au passé. S'il pleuvait ou s'il faisait trop froid, j'allais à la bibliothèque municipale. Chez moi, on se rendait compte de rien. Je me suis longtemps dit que, c'était sûr, le lendemain j'aurai retrouvé le tonus. Le tonus n'est jamais revenu.
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Un philosophe vous débusquera bien avant tout le monde en disant de vous : "Sa prétention est précisément de prendre le monde en charge." Vous vous en défendez mollement, vous dites : On ne mesure pas, en effet, combien j'aime à me comporter en prophète amateur. Mais vous êtes tout sauf un amateur.
(page 87)
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Je vous attends avec impatience, même si c'est pour vous voir ensuite disparaître pendant de longues semaines. J'aurai fait provision de vous.
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En regardant ma cigarette se consumer pendant que je vous écris, je me rappelle avoir lu que vous mâchonnez le filtre des vôtres. Mon père faisait la même chose, un habitude vaguement écœurante qui, dans mon souvenir, lui restera toujours attachée. Ce mâchonnement n'est que l'un des nombreux fils ténus qui nous relient, vous et moi.
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