Citations de Fethi Benslama (19)
Du point de vue de la théologie islamique qui le prescrit, le voile n'est pas un signe. Il est une chose par laquelle le corps féminin est occulté en partie ou totalement, parce que ce corps a un pouvoir de charme et de fascination.
Le surmusulman peut venir de n'importe où, de n'importe quand, il peut être loufoque et terrible en même temps, mais il ne renonce pas à son impératif : protéger la communauté des croyants de la femme comme objet sexuel total et incontrôlable.
La mort imaginaire est si envahissante que la mort réelle devient insignifiante, ce qui explique que certains jeunes enrôlés déclarent : " La mort, ce n'est rien, c'est comme un pincement." Un pincement qui transporte vers l'autre monde paradisiaque.
[...] la honte d'être un homme, y a-t-il une meilleure raison de faire la révolution ?
Le régime de Ben Ali n'a certainement pas perçu le haut-le-coeur des Tunisiens, tant il était assuré qu'il avait installé chez eux une capacité d'ingestion illimitée de l'inacceptable.
Il s’agit d’un essai court, qui vise à approcher à analyser des moments que l’on pourrait qualifier de "scènes d’éclat", qui conduisent des sujets à sortir ensemble de l’image et de l’imaginaire dans lequel le règne oppressif les a enfermés longtemps, pour débouler dans le réel politique.
L'offre de radicalisation crée une demande dans un état de fragilité identitaire, qu'elle transforme en puissante armure.
Mais la réouverture du jeu est un événement si redoutable que les sujets qui l’ont désirée et opérée vont se trouver exposés à des situations inconnues devant lesquelles ils ne disposent pas nécessairement des ressources adéquates pour les affronter
Il faut donc souligner que l’effet de destitution radicale sous-jacent à l’autodestruction, résulte de la conjugaison d’atteintes qui relèvent de plusieurs logiques oppressives : de classe, d’autorité et de sexe, même si ce dernier élément se présente à rebours.
Ce délire du ciel ne peut exister sans un désespoir de la terre et des hommes. Il y a lieu de parler aujourd'hui d'un désespoir musulman.
Il se représente Dieu comme un maître dont il est le serviteur, prêt à exécuter le Coran réduit à un manuel de commandements, supposé sans interprétation, car sa lettre lui donnerait accès direct à la foi réelle. La lettre est l'arme de la terreur du surmusulman incarné.
Le mélange du mythe et de la réalité historique est plus toxique que le délire.
Ce n'est pas seulement parce que son moyen de subsistance lui a été enlevé qu'il s'est immolé, mais parce que sa plainte a rencontré un affront intolérable. C'est l'accumulation de la privation matérielle, de la non-reconnaissance d'un tort, auquel s'est ajouté l'outrage, qui a conduit à l'acte désespéré.
Mais sur le fond d'un désespoir politique créé par le système de Ben Ali, est arrivé avec Bouazizi quelque chose qui a suscité chez les Tunisiens une horreur telle que l'accepter menaçait le sentiment de leur propre humanité.
J'ai pris le risque d'écrire ce petit livre au plus près de l'événement, à la fois pour contribuer à l'enlever au bavardage, mais aussi pour ne pas laisser retomber l'impensable qui en est le noyau irradiant.
Avec le soulèvement en Tunisie, nous sommes dans un cas où l'inespoir a engendré l'inespéré, et ce paradoxe d'une libération au moment où elle paraissait improbable.
La mort de quelqu'un constitue l'affirmation la plus puissante et ultime de la valeur de son existence. Or, le martyr accepte de perdre sa vie pour faire prévaloir, par la dignité de cette perte, la cause commune. Nous appelons cela mourir pour...
La révolte collective apparaît bien comme la tentative politique de recréer une frontière et de regagner un pays où l'on cesse de vivre avec l'insupportable. Or, s'il y a un point qui incarne cette frontière, et qui n'est pas du semblant, c'est la figure du martyr.
Une analyse géo-psy intéressante ... un essai court et efficace, avec cependant quelques idées parfois difficiles à suivre tant la phrase est sinueuse....