« Non, monsieur Lagagne. Personne n’est venu. Les fleurs, ce sont celles du patient qui était à votre place ce matin lorsqu’on vous a changé de chambre. Le service n’a pas eu le temps de les enlever. Et puis ça donne un peu plus de gaieté à la pièce, vous ne trouvez pas ? »
Non, je ne trouve pas. Les fleurs, ça doit rester dans les champs et loin de moi. Les fleurs, c’est là pour donner de la couleur et, moi, les couleurs, je les emmerde. Je n’aime pas ça, les couleurs. Je les trouve prétentieuses, heureuses pour rien. Les fleurs, on s’en sert pour colorer le bonheur, pour qu’on nous accorde un pardon ou pour cacher le gris du marbre. Les fleurs, c’est un mensonge, elles sont là pour voiler les vérités que les gens n’ont pas le courage de regarder en face.
La petite, et je suis revenu là sur la sœur du redchef, est stagiaire. Elle a fini par s’attacher. À chaque fois, je lui dis de ne plus se pointer mais, à chaque fois, les images de son cul ressurgissent et le drapeau blanc est de sortie. Je ne l’aime pas. Son cul, vous verriez son cul… Je n’ai jamais vu quelque chose d’aussi parfait. Vous verriez que vous ne pourriez pas refuser. Impossible. Son cul, c’est une dictature. Il vient, il te regarde, et toi, tu abdiques. Son cul, c’est Zizou qui veut te faire l’amour. Un mythe. Tu as beau n’aimer ni les hommes ni les chauves, tu dis oui. On ne dit pas non au cul de cette fille. Au pire, on baisse les yeux, on hoche la tête et on s’abandonne. Au pire.