GILLES Vervisch, "Le secret de Platon", entretien avec Guillaume Sautet
(14 oct. 2019)
La nostalgie, c'est ce drôle plaisir pris à la tristesse quand on pense aux choses du passé qui sont mortes et ne reviendront pas.
Depuis, je me suis souvent dit que j'aurais aimé revivre cette soirée parce que je l'ai mal vécue sur le moment, ou plutôt, je suis passé à côté,, un peu trop pris par mes angoisses, sans me rendre compte, sinon de mon bonheur, du moins de la douceur de ces instants
La civilisation - occidentale, en particulier - s'est construite sur l'héritage de ses illustres pères fondateurs : Platon, Aristote, Euclide ou Archimède. Mais dans le fond, c'est un pur hasard, ou du moins, c'est par accident qu'ils sont devenus des classiques..., simplement parce que leurs œuvres nous ont été transmises, tandis que celles des autres ont été oubliées.
Imaginez tout ce qui manquerait à nos connaissances actuelles si tous les dialogues de Platon avaient été perdus ! Or combien de trésors pareils à ses œuvres dorment-ils encore au fond de ruines souterraines, même s'ils ont eu la chance de ne pas avoir été détruits pour toujours...
C... était persuadé de cultiver, par ses doutes perpétuels, son esprit critique et sa liberté de pensée. Mais sa crédulité, au contraire, lui retirerait tout esprit critique et emprisonnait cette pensée. C'est sans doute là, la particularité essentielle de l'esprit conspirationniste.
Il refusait de se fier aux paroles et discours "officiels", convaincu d'être plus prudent est mieux informé que les autres.
Mais si la philosophie consiste à penser par soi-même, C... n'a jamais été philosophe. Dans le fond, il était prêt à croire n'importe qui et n'importe quoi, alors même qu'il se méfiait des vérités les mieux établies. Un moyen pour l'ignorance de se prendre pour une forme de connaissance.
...On fait ça depuis la nuit des temps.
Sur une poterie d'argile vieille de trois mille ans dans les ruines de Babylone, on a découvert un texte qui disait à peu près : "cette jeunesse est pourrie depuis le fond du cœur, les jeunes gens sont malfaisants et paresseux. ils ne seront jamais comme la jeunesse d'autrefois. Ceux d'aujourd'hui ne seront pas capables de maintenir notre culture..."
Alors tu vois..., il n'y a pas d'âge d'or. C'est simplement qu'on croit toujours que c'était mieux avant, et que la jeunesse n'est plus ce qu'elle était. Mais le passé n'était pas meilleur que le présent, pas plus que le présent n'est pire que le passé.
Tout est bien. Il se trouve simplement que le temps est cyclique, et produit un éternel retour, comme un cercle.
Depuis la nuit des temps, sans doute, les hommes se posent les mêmes questions. Et les premières réponses qu'ils ont trouvées étaient des mythes... Des fables, des fictions... racontant les épopées des dieux et des héros. Zeus, Ulysse, Minos n'ont jamais existé, sans doute, mais leurs histoires contiennent toujours un fond de vérité. Et puis, elles donnent un semblant de sens à notre condition humaine. Sinon... c'est difficile à vivre... la vie.
« SI VOUS JUGEZ UN POISSON
SUR SES CAPACITÉS À GRIMPER À UN ARBRE,
IL PASSERA SA VIE À CROIRE QU'IL EST STUPIDE.»
Il y a encore un mème* qui traîne sur les réseaux
sociaux : le dessin d'une bande d'animaux alignés
devant le bureau d'un professeur qui leur dit : « Pour
une juste sélection, tout le monde doit passer le
même examen : vous allez devoir grimper à cet
arbre. » Sauf que les animaux sont bien différents les
uns des autres : il y a un petit oiseau, un singe, un
manchot, un éléphant, un poisson rouge, un phoque
et un chien. Et bien sûr, l'«examen » n'est pas du
tout équitable, justement parce qu'il est le même pour
tous ces animaux ( et dans le fond, seul le singe a
des chances de réussir, conformément à ses aptitudes
naturelles qu'il a reçues dès la naissance, sans a
voir à travailler).
Ce dessin illustre bien l'illusion de la méritocratie
républicaine consistant à sélectionner les individus
par des examens et concours qui sont les mêmes pour
tout le monde, alors que les gens sont tous différents.
En général, ce dessin est accompagné d'une citation
attribuée à Albert Einstein :« Tout le monde est un
génie, mais si vous jugez un poisson sur ses capacités
à grimper à un arbre, il passera sa vie à croire qu'il
est stupide. »
Comme d'habitude avec ce genre de
citation, il est difficile de savoir si Einstein en est
bien l'auteur. Certains croient pouvoir la tirer de
son livre « Comment je vois le monde ». Personnellement,
je n'en ai retrouvé aucune trace. Ce qui est sûr, c'est
que la vie même d'Einstein semble correspondre à
cette petite leçon de vie.
p.122-123
* Les deux sens du mot mème :
‒ 1 , À l'origine, un mème est tout objet, concept ou attitude liée à l'Homme, qui se transmet en s'adaptant par tout moyen de communication.
‒ 2 , En Informatique, le terme est utilisé sur internet pour désigner tous les contenus propagés rapidement sur le réseau.
On en viendrait presque à comprendre la phrase d'Albert Camus, prix Nobel de littérature en 1957 : "Tout ce que je sais de plus sûr à propos de la moralité et des obligations des hommes, c'est au football que je le dois." Le foot comme école du respect des autres et de soi-même.
Pourquoi les femmes ne comprennent pas la règle du hors-jeu ?
En bref, il semble bien qu'avoir un vagin rende les tâches ménagères intéressantes, soit que le gène du repassage soit inscrit dans le chromosome X propre à la femme, soit que ses neurones impriment des images de machines à laver dans son cerveau par l'effet d'une rétroaction hypothalamo-hypophysaire, aussi à l'origine des ragnagnas.
Face à la science publicitaire, nous sommes tous des malades imaginaires : nous nous croyons malades de notre nature, changeante, vieillissante et cherchons le moyen d'y échapper. Or, la vraie démarche scientifique consisterait plutôt à faire comprendre aux gens que le temps, la vieillesse et la mort sont inscrits dans la nature des choses et qu'il ne sert à rien de chercher à les fuir. Nous sommes des malades imaginaires, et nous gâchons le temps qu'il nous reste en dépensant des fortunes, parce que nous pensons seulement au temps qu'il ne nous reste pas.