AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

4.08/5 (sur 12 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Haguenau , 1983
Biographie :

Né en 1983 à Haguenau (FR). Vit et travaille à Lille (FR)

Les oeuvres de Gregory Buchert se déclinent principalement en vidéos et performances et sont nourries de nombreuses références littéraires (Joyce, Gide, Calvino). Entre humour et réflexion critique, elles jouent sur les notions d'échec et d'irrésolu et proposent, par leurs gestes ténus, des pistes de réflexions sur l'être au monde de l'artiste, mais aussi, par extension, de chacun d'entre nous.

Son travail a été notamment présenté au festival Hors-Pistes du Centre Georges Pompidou (FR), à la Kunsthaus Baselland (CH), au CRAC Alsace (FR), au FRAC Bretagne (FR) et à la Motorenhalle de Dresde (DE).

En 2011, son film 858 pages plus au sud a remporté le premier prix Analix Forever, décerné par Laure Adler et Barbara Polla. Ses vidéos sont présentes dans la collection départementale d'art contemporain de Seine Saint-Denis (FR) et du Frac Alsace (FR)
+ Voir plus
Ajouter des informations
Bibliographie de Gregory Buchert   (2)Voir plus

étiquettes
Videos et interviews (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de

Vidéo de Gregory Buchert


Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Antoine m'a confié ne pas avoir compris grand-chose à cette oeuvre qui pourtant continuait de le suivre. Il y a là, a-t-il dit en reprenant une citation d'André Breton que je ne connaissais pas, "un infracassable noyau de nuit". Belle comme un code secret de l'aérospatiale soviétique, j'ai gardé la formule pour la ressortir en cas d'urgence.
Commenter  J’apprécie          290
Dehors s'était mis à flotter un étrange crachin qui n'arrivait pas à trouver la direction du sol. Il fallait que je retourne au "Merzbau" (𝒄'𝒆𝒔𝒕 𝒂𝒊𝒏𝒔𝒊 𝒒𝒖𝒆 𝒍'𝒂𝒖𝒕𝒆𝒖𝒓 𝒏𝒐𝒎𝒎𝒆 𝒍'𝒂𝒑𝒑𝒂𝒓𝒕𝒆𝒎𝒆𝒏𝒕 𝒖𝒏 𝒑𝒆𝒖 𝒇𝒐𝒖𝒕𝒓𝒂𝒒𝒖𝒆 𝒅𝒆 𝒔𝒂 𝒎𝒆̀𝒓𝒆, 𝒆𝒏 𝒓𝒆́𝒇𝒆́𝒓𝒆𝒏𝒄𝒆 𝒂̀ 𝒍'𝒐𝒆𝒖𝒗𝒓𝒆 𝒅𝒆 𝑲𝒖𝒓𝒕 𝑺𝒄𝒉𝒘𝒊𝒕𝒕𝒆𝒓𝒔) boucler mes bagages. J'ai replié le sac sur les contours du livre, rabattu les ailerons de ma chapka, et agrippé le bâton qui a rendu un tintement minéral en cognant le pavé. J'ai mis vingt minutes à rentrer, bifurquant ici ou là dans des ruelles imprévues pour essayer de me surprendre, tentatives perdues d'avance puisque en déambulant dans Hawenau, c'est à l'intérieur de moi-même que je marche. Mes trajets ici ressemblent à de longues anamnèses, j'avance de déjà-vu en déjà-vu, de sorte que le présent ne trouve jamais sa place, et que tout ce que je pense ou entreprends n'est que le reflet démultiplié d'une existence révolue. Voilà sans doute pourquoi cette ville, la seule où je me sente vraiment chez moi, est aussi la seule où je suis sûr de ne pouvoir vivre.[...]

Tout à l'heure en observant la région par la fenêtre du train, m'est revenu ce vers de T.S. Eliot placé en exergue d'un livre que je n'ai jamais pris la peine d'approfondir, sa première page suffisant amplement à mon bonheur: Le chez-soi, c'est l'endroit d'où l'on part.
Commenter  J’apprécie          260
Szafran me suivait du regard en fumant sa cigarette. Un mètre avant de toucher au but, j'ai marqué une courte pause pour éprouver le poids de l'instant : tu vas maintenant retourner le gant, ai-je pensé, et habiter cette Arcadie qui t'a elle-même si longtemps habité, plus encore que l'île de Robinson Crusoé, que la forêt du Baron perché ou le Mezbrau de Kurt Schwitters.[...]

Là se trouvaient les oeuvres en cours, exécutées sur des papiers rares maintenus à plat par une étrange collection de fers à repasser. Autour, les outils, les mémentos et les rebuts dégringolaient des tables jusqu'au centre de la pièce, où trônaient plusieurs rangées de pastels secs supportées par de fins tréteaux. Cet aménagement aux allures d'embarcadère, qui enjambait sur cinq ou six mètres le capharnaüm de l'atelier, déclinait un répertoire de couleurs comptant - selon Szafran - plus de mille huit cents tons. Résultat de l'incessante manipulation des pigments, une poussière veloutée aux nuances kaki s'accumulait au pied de la structure, et permettait de reconstituer sans peine les déplacements du peintre en suivant les traces déposées par ses semelles sales.
L'un des parcours ainsi ébauchés parvenait au seuil d'un grand escalier hélicoïdal, dissocié du bâti et placé là en guise de modèle.[...]

Szafran a posé une main sur mon épaule pour me raccompagner, avec la compassion qu'éprouve le shérif à l'égard du bandit en fin de cavale. En route vers la sortie, j'ai pu apprécier le paysage une dernière fois : nature et culture, alcools et tabac. Devant la masse d'images simultanément mises en chantier, j'ai pressenti le cauchemar de travail qui enchaîne le peintre. Son entêtement à polir depuis si longtemps la même poignée de motifs, l'extrême lenteur qu'il manifeste à la tâche - bousier minuscule au milieu d'une forêt immense - le condamnent à maintenir son effort sans la moindre inflexion, et de plus en plus drastiquement à mesure que l'âge avance. Pourtant, si l'impossible conclusion de son oeuvre provoque en lui un tel sentiment d'urgence, elle est aussi une façon de ralentir le temps, de le capturer en le faisant tourner en rond à l'intérieur d'une besogne infinie. Ainsi, frôlant une aquarelle d'escalier en colimaçon, j'ai compris que cette structure qui préoccupe tant le peintre pouvait aussi être perçue comme le goulet d'étranglement d'un sablier.
Commenter  J’apprécie          241
Enrique Vila-Matas a dit, mais je ne sais plus où: on écrit moins pour savoir qui l'on est que pour découvrir en quoi l'on se transforme, et de fait, c'est bien ma discrète métamorphose que semble enregistrer ce journal au fil des jours. (p. 101)
Commenter  J’apprécie          130
L'Alsace a basculé tant de fois dans son histoire qu'il m'a fallu repartir de zéro pour me souvenir que mon grand-père était né allemand, sa femme française deux ans plus tard, leurs deux aînés allemands à nouveau, et la dernière-ma mère- française, tout ça dans la même ville, le même quartier, la même rue. Les anciens n'en parlent pas, quitte à laisser penser qu'il n'y a eu aucun drame, que le fait de devoir parler une autre langue du jour au lendemain, le fusil sur la tempe, cela pour atterrir dans un monde où le soleil se conjugue au féminin, n'a entraîné aucune confusion dans la perception que les gens avaient de l'univers et d'eux-mêmes. (p. 111)
Commenter  J’apprécie          120
Entre le monde et lui, Schweitzer [Le libraire ] a patiemment érigé des digues de papier dont l'épaisseur atténue la clarté du jour et ouate les sons du monde extérieur. Sa boutique est envahie par des piles de livres qui s'enracinent dans les fentes du parquet, s'appuient sur le dos des présentoirs et s'élèvent ensuite vers le plafond, selon un processus qui évoque la sédimentation des stalagmites. Et tout ça paraît s'épanouir en liberté, à la lumière de quelques néons poussiéreux, indépendamment des humains en général. Comme si les nombreux invendus, en se décomposant avec le temps, produisaient ici un humus à la surface duquel germent de nouveaux livres que personne n'a eu besoin d'écrire pour qu'ils existent. (p. 54)
Commenter  J’apprécie          110
Tout a commencé l'année de mes seize ans, en découvrant une monographie dédiée à l'un des plus grands pastellistes du XXe siècle qui avait à Malakoff son atelier, et l'a peut-être encore. De lectures en relectures, l'ouvrage a rapidement fait office de drogue douce pour l'ado que j'étais, notamment par ce que ce nom, Malakoff, jamais vu ailleurs et dès l'abord si pittoresque à mes yeux, ce nom qui revenait à chaque page, m'inspirait toutes sortes de rêveries géographiques au réveil desquelles j'étais systématiquement perdu- parachuté quelque part sur le plateau central de Russie. J'avais beau pressentir que la commune se trouvait en France, je la soupçonnais de contenir un ailleurs plus vaste, plus romanesque. (p. 15)
Commenter  J’apprécie          110
Malakoff, lundi 11 avril 2016
Cher Sam,

(...) Pour ma part, je ne vous demande pas audience, cher Sam. A quoi bon ? puisque vous n'êtes pour moi qu'un personnage de fiction (ne voyez aucune offense dans ce "vous n'êtes que"), un nom ailé et mélodieux qui n'a besoin d'aucune incarnation pour vivre sa vie. Je me doute qu'en vous rencontrant je ne trouverai pas, du moins pas tout à fait, le Sam Szafran auquel je pense, pas plus d'ailleurs que je n'ai trouvé la Russie en arrivant à Malakoff. Non, ce dont je rêve c'est de voir votre atelier, furtivement, c'est tout. Robinson Crusoé n'existe pas lui non plus, mais son île oui, elle se trouve dans l'archipel de Juan fernandez au large de Valparaiso. Eh bien disons que cette île, c'est un peu votre atelier, et cette lettre, une demande d'autorisation de survol. Mais là encore je ne me fais guère d'illusions- je reprends cette fois les mots de Jean Clair: l'atelier a été son premier et son dernier refuge, le locus solus précaire où nul n'est admis à pénétrer s'il n'est un ami, et d'autant plus inexpugnable qu'avant d'être une possession matérielle, il est devenu une clôture spirituelle. (p. 134)
Commenter  J’apprécie          100
Puisque les fous sont depuis longtemps cachés derrière des murs, on peut penser que si tant de municipalités invitent aujourd'hui des artistes à intervenir sur leur territoire, c'est parce qu'elles ont un besoin inconscient de remplacer l'idiot du village- fonction essentielle à toute communauté. Je suis notamment rémunéré pour ça, promener l'excentricité de mon costume dans Malakoff. (p. 76)
Commenter  J’apprécie          110
Dans le roman de Gontcharov, j'ai surligné ce passage dont j'ai le sentiment qu'il m'était destiné. Ici, Stolz, le plus vieil ami d'Oblomov, essaie de l'extraire de sa léthargie en lui rappelant ses rêves de jeunesse, comme Gregor essaie de le faire avec moi: - Nous avions l'intention de sillonner l'Europe de long en large, d'explorer à pied la Suisse, de brûler nos semelles sur les laves du Vésuve, de descendre jusqu'à Herculanum...Plus jeune n'est-ce pas toi qui, les larmes aux yeux, disais en regardant les copies des madones de Raphaël ou de l'Apollon du Belvédère: mon Dieu, est-il possible que je ne puisse jamais admirer les originaux eux-mêmes ? Et dois-je aussi passer toute ma vie à voir des myrtes, des cyprès et des orangers dans des serres, et non dans leur patrie ?-(p. 108)
Commenter  J’apprécie          100

Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Gregory Buchert (19)Voir plus

Quiz Voir plus

Vendredi ou La Vie sauvage, Michel Tournier

L'aventure de Robinson et Vendredi se déroule:

Au XVIe siècle
Au XVIIIe siècle
Au XIXe siècle

20 questions
3498 lecteurs ont répondu
Thème : Vendredi ou La Vie sauvage de Michel TournierCréer un quiz sur cet auteur
¤¤

{* *} .._..