J'ai mis un peu de temps mais j'ai enfin pu lire la suite et fin de ce diptyque fort singulier dont le trait et le propos philosophique m'ont particulièrement marquée et fait sortir de ma zone de confort.
Dans le premier tome, nous avions été confronté à la maladie unique dont souffrait le héros, Katchan : la dispersion. Il a ainsi perdu plusieurs femmes de sa vie et échappé à plusieurs moments difficiles mais en a conçu de nombreux regrets qui le poursuivent encore. Nous le retrouvons donc dans un lieu totalement inattendu où sa maladie et ses regrets vont le faire réapparaître pour en quelque sorte se racheter, mais est-ce que cela suffira pour qu'il vive heureux ?
Dispersion n'est franchement pas un titre à lire quand on est déprimé ou fatigué, l'auteur, Hideji Oda, n'y va pas avec le dos de la cuillère. Il fait vivre de sacrées expériences à son héros et aux femmes qu'il croise, qui font vraiment dire qu'on vit dans un monde pourri. Que ce soit lors de sa rencontre avec un peuple isolé en Afrique, lors de ses retrouvailles avec ses "-ex", ou lorsqu'il tombe sur un mafieux, Katchan n'a vraiment pas de chance et ne voit que la face sombre de l'humanité, ce qui est bien rendu par le dessin très sombre et étrange de l'auteur, toujours fait d'une multitude de traits qui fascine et mystifie, ce qui est parfait ici.
Après, il y a aussi quelques petites touches de lumières dans les sentiments toujours positifs qu'il éprouve, car malgré ce qu'il vit Katchan ne tourne pas mal et n'a qu'une envie : aider les autres, même s'il s'y prend mal, même si ça se retourne contre lui. Les femmes de sa vie l'ont bien senti et ont tendance, également, à tout faire pour le prendre sous leur aile et lui offrir leurs sentiments. Il y a un joli équilibre entre eux qui apporte un peu de tendresse dans cette ambiance bien morose.
Le titre est en effet très gris et étrange. Le propos de l'auteur n'est pas des plus clairs pour moi. Un peu comme Daisuke Igarashi, il aime apporter mystification à son histoire et ça rend l'ensemble puissant mais confus. On est percuté par la puissance symbolique du récit, personnalisé ici par les moments que Katchan passent en Afrique et les tatouages qu'il y reçoit, mais ça reste très très flou, quant à des dispersions et leur finalité ainsi que cette créature de cauchemar qui apparaît finalement et semble être une extension de lui-même. Est-ce une parabole sur les regrets de la vie qui nous dévorent de l'intérieur et cette envie de fuir qu'on peut ressentir ? Je ne saurais dire, c'est un peu trop perché pour moi et ce ne sont pas les mots finaux d'un certain critique d'art venant clore le tome qui m'ont aidée...
Histoire fascinante mais cryptique, Dispersion fut une vraie expérience. Je ne regrette pas de m'y être frottée rien que pour le trait puissant et singulier de l'auteur, mais je suis un peu frustrée d'en sortir avec autant de clés de compréhension manquantes. C'est très, trop, métaphysique pour moi, mais ce cri, cet appel à l'aide face à notre monde oppressant et agressif, fut entendu.
Lien :
https://lesblablasdetachan.w..