Le temps ne serait-il pas enfin venu de construire une synthèse où toutes les écoles prendraient place et se tendraient la main, au Heu de s'entredéchirer, comprenant enfin que l'infinie variété des manifestations artistiques est la condition essentielle de la vitalité de l'art; que les tempéraments d'artistes sont divers; que chaque artiste sent et crée conformément à son tempérament spécial ; qu'il faut- aussi tenir compte de l'influence des milieux ; que telle époque fiévreuse imprimera aux oeuvres d'art un cachet d'exaltation que ne connaîtront pas les oeuvres écloses dans une époque d'affaissement. « Ce sera l'anarchie, ce sera la licence, » diront en choeur les amants incorrigibles de la règle, de l'unité, de la tutelle en toute chose.
Hoffmann, dans un de ses Contes fantastiques, adonné le portrait suivant de Gluck: « Je me levai et je m'aperçus qu'un homme avait pris place à la même table que moi; il me regardait fixement, et je ne pus, à mon tour, détacher mes regards des siens. Jamais je n'avais vu une tête et une figure qui eussent fait sur moi une impression aussi subite et aussi profonde. Un nez doucement aquilin regagnait un front large et ouvert, où des saillies fort apparentes s'élevaient au-dessus de deux sourcils épais et à demi argentés; ils ombrageaient deux yeux étincelants, presque sauvages à force de feu, des yeux d'adolescent jetés sur un visage de cinquante ans. Un menton gracieusement arrondi contrastait avec une bouche sévèrement fermée, et un sourire involontaire, que produisait le jeu des muscles, semblait protester contre la mélancolie répandue sur ce vaste front. Quelques boucles grises pendaient seulement derrière sa tête chauve, et une large houppelande enveloppait sa haute et maigre stature. »
A l'occasion de l'arrivée à Paris du jeune archiduc Maximilien, Gluck arrangea pour Versailles un petit opéra comique de Vadé, intitulé l'Arbre enchanté; il livra également un opéra-ballet en trois actes, Cythère assiégée, qui n'ajouta pas beaucoup à sa réputation.
Ce ne fut pas immédiatement que Weber reconnut dans la musique la véritable voie où l'appelait son génie. Il hésita longtemps entre la musique et la peinture. Il dessinait, peignait à l'huile et à l'aquarelle, gravait à l'eau-forte.
Heller partit donc pour Paris, où il arriva dans le cours d'octobre 1838, avec une modique somme et sans autres ressources à espérer. Il alla voir Kalkbrenner, prit deux ou trois leçons de piano, mais fut bien vite obligé de les interrompre. Les conditions imposées par le professeur étaient singulières : payer 500 francs par an, rester cinq ans sous sa direction (cette direction consistait en un examen mensuel: il déléguait pour maître de piano un de ses élèves), — ne jamais rien publier sans son autorisation, de peur que l'élève ne compromît la renommée du maître.
La musique, pensait le gouvernement autrichien, la musique adoucit les moeurs, calme les passions; un peuple qui chante est nécessairement un peuple satisfait, disposé à l'obéissance, à l'amour de ses princes. - Les grands seigneurs avaient leur chapelle : - il n'était pas rare de voir d'éminents artiste accepter, dans les maisons princières, des position qui se rapprochaient un peu de la domesticité.
Heller ne connaissait pas une note de Schumann ; il le prenait même pour un écrivain purement théorique et esthétique. Il entretint avec lui une correspondance qui ne cessa que peu d'années avant la maladie qui devait emporter le grand compositeur. Schumann se montra, pour le jeune Heller, plein de bienveillance; il lui prodigua les encouragements.
Ce qui est vrai de la nature est vrai de l'art, qui n'est autre chose que la nature idéalisée, et pourtant quel lamentable spectacle que celui des discussions artistiques ! Les écoles ne connaissent que l'anathème. Ceux-ci récusent Raphaël au nom de Michel-Ange; ceux-là Beethoven au nom de Mozart.
Comme Schubert, Mendelsshon réussit dans dans le lied, la symphonie, le quatuor, mais il échoue dans l'opéra.
Comme Schubert, Mendelsshon meurt à la fleur de l'âge.