Petit à petit se dessine de la part du cinéaste une stratégie de la mise en scène qui est aussi une philosophie de l'existence, stratégie et philosophie fondées sur une négociation permanente entre l'état de la réalité, l'affirmation d'une singularité personnelle et l'exigence d'une constante remise en question.
Les pivoines blanches forment un lourd parterre neigeux et, sous le kiosque, la princesse Jiacheng lui enseigne la cithare. La princesse lui raconte aussi l'histoire de l'oiseau bleu :
Le roi du Kophen reçoit en cadeau un oiseau bleu. Trois ans s'écoulent et l'oiseau ne chante toujours pas. La reine dit alors :"Il paraît que ces oiseaux chantent quand ils sont avec leurs semblables, pourquoi ne pas mettre celui-ci devant un miroir ?" Le roi décide de suivre les conseils de la reine et, face à son image, l'oiseau se met à chanter sa tristesse et danse jusqu'à la mort...
Selon Hou "dao", l'écriture de ce scénario est l'expérience la plus contraignante de toute sa carrière. Jusqu'ici il a essentiellement tourné des films contemporains. Dans une histoire qui se passe à notre époque, s'il manque un élément, il est facile d'y remédier. Si l'on doit ajouter des plans, il suffit de tourner une scène dans la ville. Si un accessoire fait défaut, on peut se le procurer chez le quincaillier ou dans un bazar...
Dans un film d'époque, tout ce dont on a besoin doit être préparé très en avance. Ce que l'on ne prévoit pas manquera...
Hou "dao" préfère sortir se promener et fumer une cigarette. A travers la baie vitrée, nous le voyons de dos et le regardons errer sous les arbres en casquette blanche et pantalon assorti. De temps à autre, il lève la tête vers le ciel, absorbé dans ses réflexions. Nous en profitons aussi pour faire une pause...
Au retour de sa promenade et de sa pause cigarette, Hou "dao" lâche invariablement : "Ça y est, je sens que dans ce passage nous devrions faire comme ça..."