Ian Warrell

Turner entretient des relations durables et particulières avec la Seine. Au fil des ans, le fleuve lui fait vivre deux types d'expériences distinctes et pourtant de même intensité. Plus exactement, la Seine devient pour lui une source féconde d'inspiration, autant par son caractère pittoresque que comme terrain d'étude du monde contemporain, qu'il relie à ses séries en cours d'élaboration de grands fleuves de Grande-Bretagne et du continent. Mais, fait tout aussi révélateur, c'est également près de la Seine, à Paris, qu'il mesure son ambition. Les collections du Louvre sont en effet pour lui une révélation d'autant plus forte qu'elle se produit bien avant l'ouverture de la National Gallery, à Londres? En regardant ces tableaux, il comprend à quel point il devra se surpasser pour mériter un jour sa place au panthéon des maîtres anciens. Ainsi, on ne s'étonnera pas qu'il espère égaler Poussin, Watteau et, surtout, le Lorrain, ni que leurs oeuvres aient stimulé et donné des couleurs à sa propre représentation de la Seine.

Un peu plus au sud de Vincennes, à Charenton, la Seine est rejointe par son principal affluent, La Marne. Selon Ritchie, le volume d'eau se déversant dans la Seine à cet endroit est si impressionnant que "le spectateur comprend difficilement pourquoi les deux cours d'eau, une fois réunis, continuent de s'appeler la Seine".

Par l'emploi inusité ,voire impertinent pour l'époque , qu'il fait des coloris et des pigments ,il atteint une modernité qui préfigure celle de Monet et de Cézanne et qui n'a pas perdu de son actualité.