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4.67/5 (sur 3 notes)

Nationalité : France
Né(e) le : 4/11/1934
Biographie :

Dessinateur satirique durant 20 ans pour la revue syndicale et pédagogique "L'École émancipée" Jean Mourot se présente sur son site : "Retraité de l'enseignement primaire depuis 1990, je consacre une bonne part du temps que me laissent mes petits-enfants et mes engagements associatifs à faire des retours en arrière et à rédiger ce qu'on pourrait appeler des mémoires et que je considère comme des témoignages.

Pourquoi? Pour laisser une trace de mon passage ici-bas? Peut-être. Sans doute aussi pour sauver de l'oubli "ce qui fut et qui n'est plus " en espérant, sans trop y croire, que mes expériences pourront servir, un peu, à mes successeurs dans la vie et qu'elles les empêcheront de recommencer les mêmes erreurs...

Mais surtout pour raconter des histoires, en espérant qu'elles intéresseront quelques uns d'entre vous..."

Site : http://jeanmourot.jimdo.com/
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Source : http://jeanmourot.jimdo.com/
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Ce soir-là, intronisé auprès de la population du village et débarrassé de mon mentor, je me sentais enfin chez moi. Plein de bonne volonté pour ma nouvelle tâche qui me convenait d’autant mieux qu’elle n’était pas exclusivement militaire, j’étais prêt à m’endormir rapidement sur mon nouveau lit de camp au matelas de laine —!un privilège d’officier, les autres devant se contenter de paillasses. Nous dûmes cependant exceptionnellement retarder le moment de nous coucher!: les chiens de Bou Arfa se mirent plusieurs fois à aboyer et ceux du poste à leur répondre. Un chacal rôdait-il dans les parages ? Comme ils insistaient, nous rejoignîmes à plusieurs reprises les sentinelles dans leur blockhaus. Mais la nuit était trop sombre pour que nous fussions en mesure de distinguer quoi que ce soit au-delà de la ceinture de barbelés qui entourait le poste. Le pinceau lumineux de nos lampes- torches n’éclaira faiblement que salades, pois chiches et pieds de courgettes. Vers 23 h, nous allions nous mettre au lit quand éclata la pétarade. Ce n’était pas un feu d’artifice. J’avais connu cela à Cherchell, de loin. Ici, c’était directement sur nous qu’on tirait. Tagada, pan-pan! Pendant quelques minutes qui me parurent interminables, ce fut un festival de tirs d’armes automatiques, de coups de fusil et de jets de grenades pendant que nos hommes, brutalement tirés du premier sommeil, se préparaient à riposter. Ignorant où l’on était exposé et où on était à l’abri, je me retrouvai assis par terre dans la salle de quart, le téléphone à côté de moi, appelant désespérément à l’aide le PC du bataillon. «Ne vous affolez pas, on arrive». Il fallut quand-même une demi-heure au sous-lieutenant cyrard, le casque de tankiste sur la tête,pour se pointer dans l’EBR du 2/22, en Zorro des temps modernes. Cela faisait longtemps que tout était fini. Après quatre à cinq minutes de répit, nos assaillants avaient encore lâché quelques rafales avant de détaler silencieusement et de disparaître dans la nuit.
Sept mois plus tard, j’appris incidemment à la SAS de Marnia le danger auquel nous avions échappés cette nuit-là. Un «!rallié!» avait mangé le morceau : nos agresseurs n’étaient pas cinq ou six, comme nous l’avions pensé, mais une trentaine -—alors que nous n’étions qu’une vingtaine dans le poste. Commandés par un capitaine, avec la complicité d’un de nos «goumiers» (je ne sus jamais lequel), ils devaient nous surprendre dans notre premier sommeil, nous liquider tous et s’en aller en emportant nos armes et nos munitions. Les aboiements des chiens, nos rondes répétées, la lueur inquisitrice de nos lampes les avaient amenés à penser que leur projet était éventé et que nous les attendions de pied ferme. C’est pourquoi ils s’étaient contentés d’un baroud d’honneur avant de décrocher.
Mais pour lors nous ignorions tout cela. Le harcèlement n’avait blessé personne et fait aucun dégât : tout juste quelques impacts de balles dans les murs, deux carreaux cassés, une grenade non explosée dans la cour et d’autres au-delà du poste, que nous fîmes sauter dans le jardin. Elles auraient pu faire du mal si les lanceurs avaient été plus compétents. On nous assura que ce n’était qu’un incident bénin, le seul depuis un an, et que nous n’avions rien à craindre : la région était définitivement pacifiée. J’étais loin d’en être convaincu et dès le lendemain, j’entrepris d’améliorer la défense du poste. Je doublai le réseau de barbelés. Je renforçai la chicane contrôlant l’accès aux arrières ombragés de l’école. J’installai des mines éclairantes. Le PC me refusant les sacs de sable que je réclamais, ce fut le collègue d’un poste voisin qui me les fournit. Mais il ne fallait pas donner l’impression de se barricader. Pas question d’abattre des arbres, par exemple, pour dégager un plan de tir... Cela n’empêchait cependant pas mes supérieurs d’organiser ce qu’on appelait «l’autodéfense» du village. Quelques hommes, auxquels on confiait de vieux fusils Lebel de la guerre de 14 et quelques cartouches, percevaient 400 F par jour (2000 F par mois) pour monter la garde au-dessus d’un silo à grain dressé à l’opposé du poste où ils s’enfermaient pour la nuit . Prudents, ils ne virent jamais rien, n’empêchèrent jamais rien et rendirent régulièrement chaque matin armes et munitions. Leur rémunération était l’objet d’une magouille. Seuls quelques-uns d’entre eux remplissaient les conditions pour être officiellement recrutés. On globalisait leurs soldes et l’on répartissait également la somme entre tous. Comme aucun ne savait lire ni écrire, il suffisait de leur faire apposer une croix au bas d’une feuille d’émargement dont ils ignoraient le libellé et le tour était joué. Le jour où je demandais à mes supérieurs un ordre écrit pour procéder à cette manipulation, je me fis vertement rembarrer par le capitaine-adjoint et je n’obtins évidemment pas satisfaction mais on s’arrangea un peu plus tard pour que je n’aie plus à affronter ce genre de cas de conscience!...
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Avant-propos
J’ai définitivement quitté la blouse du maître le samedi 30 juin 1990. Elle pendait encore au porte-manteau proche du tableau de ma classe mais je ne la portais plus depuis des mois. (...)
C’était l'époque où s’édifiait une nouvelle école sur les ruines de celle de Jules Ferry, l’année de l’apothéose de Lionel Jospin au ministère de l'Éducation Nationale, celle de sa fameuse réforme destinée à mettre « l'élève au centre » et de la transformation des instituteurs en « professeurs d’école ». On m’avait proposé de prolonger d'un an mon temps de « maître-directeur » chargé de classe pour accéder au nouveau corps. Exaspéré par la bureaucratisation de la fonction et par la multiplication des nouvelles tâches, j’avais refusé la proposition. Maître d’école j’avais été, maître d'école je tenais à rester. Ultime survivant d'une espèce en voie de disparition, au moment ou l’âge me libérait des astreintes —et des joies— d’une profession à laquelle j’étais venu par déterminisme social plus que par « vocation », je ne tenais pas à la prolonger dans de nouvelles conditions.
Au terme de ce qu’on appelle une « carrière », entièrement consacrée à l'enseignement à des enfants de 8 à 14 ans, j'avais vu se télescoper bien des « vérités » pédagogiques trop souvent circonstancielles et se succéder bien des réformes qui devaient toutes, d’une manière ou d’une autre, démocratiser l’école et éradiquer l’échec scolaire... Soucieux de répondre au mieux aux attentes de mon public populaire, en banlieue comme en campagne, je n’avais pas l’impression d’avoir dérogé —même si j’avais pu passer pour un « gaveur d'oies » aux yeux de certains qui ne m'avaient jamais vu travailler ! J’en veux pour preuve, aujourd'hui, les témoignages de sympathie, de reconnaissance ou de complicité que m’ap-portent encore régulièrement mes anciens élèves et leurs familles. Ce qui n’est pas toujours sans me gêner quand on compare devant moi les mérites des diplodocus que nous fûmes, mon épouse et moi, dans la même petite école de campagne pendant plus de vingt ans, à ceux jugés moindres de trop de nos successeurs... Pas facile alors de faire comprendre que le monde ayant changé, l'école et les enseignants ne pouvaient pas être restés à l’écart du mouvement général.
S’il n'y a pas lieu de surestimer les maîtres d’autrefois, parmi lesquels il serait facile de trouver de piètres pédagogues, il ne convient pas non plus les dévaluer. Quant aux nouveaux professeurs d'école, leur savoir universitaire tout neuf ne devait pas suffire à les faire reconnaître par leur public : comme leurs aînés, c’était sur le terrain qu'ils allaient devoir faire leurs preuves, et ce ne devaient pas être les approfondissements disciplinaires les plus pointus qui allaient mieux les préparer. On pouvait seulement souhaiter que les réformateurs du moment ne leur savonnent pas trop la planche. Ce qui était loin d’être acquis, à en juger par l’irresponsabilité et la confusion dans lesquelles on avait commencé d’appliquer la loi d’orientation.
On ne croit plus guère au progrès sur le chemin de l'école et l’on aurait plutôt tendance à se bercer de nostalgies d’un âge d’or qui n’a jamais existé. (...) Je souhaitais aux enseignants d’alors (...) de retrouver ces enthousiasmes féconds qui permirent parfois aux vieux maîtres et à leurs élèves de croire qu'ils travaillaient à leur émancipation.
J’avais passé six ans à l’école de Yainville. Six ans à enseigner au Cours Moyen et à assurer la direction de cette petite école à cinq classes. Six ans sous la houlette des ministres Savary, Chevènement, Monory et Jospin. J’aurais pu partir en novembre, dès mes 55 ans, mais je ne voulais pas abandonner la promotion d’élèves que je suivais depuis le CM1. J’étais resté à mon poste jusqu’à la fin de l’année scolaire. Ma dernière classe n’eut pas la solennité de celle du maître alsacien de 1871 que narre Alphonse Daudet. (...) Après une rapide distribution des prix à la salle des fêtes, parents et élèves s’étaient regroupés dans notre cour pour une amicale cérémonie d’adieux. Il faisait beau. On m’apporta quelques fleurs et cadeaux dont une magnifique station météo de salon que je consulte encore chaque jour dans ma salle de séjour... Et puis l’on s’était séparé : « Bonnes vacances, M’sieu ! Bonne retraite ! —Bonnes vacances les enfants ! »...
Ce n’est qu’un peu plus tard que je prendrais conscience que ma carrière était finie et que s’ouvrait un autre chapitre de ma vie.
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J’ai collaboré pendant des années à la vieille revue syndicale et pédagogique, l’École Émancipée, fondée en 1910 par une poignée de militants instituteurs d’extrême-gauche.
C’est lors de mon passage au secrétariat de rédaction de cette publication prestigieuse mais confidentielle que j’ai été invité à assister à Rouen, le 2 juillet 1991, à un déjeuner littéraire organisé par la radio Chérie FM et la librairie l’Armitière où un débat était prévu l’après-midi.
En compagnie de quelques journalistes professionnels très déférents, j’ai eu ainsi l’occasion de cotoyer Laurence Caillet, une jeune ethnologue spécialiste du Japon, auteur d’un livre dont l’encre était encore fraiche, « La maison Kamazaki » et son directeur de collection, le bouillant défenseur des peuples arctiques, Jean Malaurie, fondateur de la collection « Terre humaine », chez Plon. Se trouvait à la même table l’évêque Jacques Gaillot qui publiait beaucoup à cette époque et ne craignait pas le feu des projecteurs médiatiques.
A l’issue de ce repas et du débat qui suivit, où je réussis à agacer par mes questions l’invité vedette, le normand Malaurie qui résidait alors à Vieux-Manoir quand il n’était pas à Paris, je formulais une demande d’entretien auprès des deux auteurs de « Terre humaine » –mes camarades « laïcards » de l’École Émancipée boudant les ecclé-siastiques, même en rupture de banc, n’auraient pas voulu donner la parole à l’évêque d’Evreux ! Si j’obtins facilement l’accord de principe de Laurence Caillet, Jean Malaurie se montra plus évasif. Il faudra toute mon obstination pour vaincre ses réticences et obtenir in fine son accord pour me rencontrer à Paris.
***
Laurence Caillet me reçut chez elle à Sèvres, le 18 juillet 1991, devant une tasse de café, répondant aimablement et sans détour à mes questions. Elle acceptera sans réticence ma transcription de notre entretien qui parut dans l’École Émancipée n°2 du 20 septembre 1991.
J’eus plus de difficultés avec Jean Malaurie. Sa situation sociale, sa notoriété et la conscience aiguë de sa valeur en même temps qu’un calendrier chargé n’accélérèrent pas la prise de rendez-vous. Je finis toutefois par réussir à me faire recevoir, le 30 septembre 1992, soit plus d’un an après notre première rencontre, dans son appartement parisien où, me dit-il, Bonaparte avait fait la connaisssance de Joséphine.
La mise au point du compte-rendu de cet entretien fut l’objet de plusieurs allers-retours, mon éminent inter-locuteur n’assumant pas toujours les excès de certains de ses propos spontanés, trop fidèlement enregistrés par mon magnétophone, et souhaitant avoir la maitrise du message qu’il voulait faire passer. Après avoir récrit des passages entiers de l’interview, il m’autorisa enfin à en publier le compte-rendu, ce qui fut fait dans les numéros de janvier à mars 1993.
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