Jean-Louis Andral

La synchronicité, voilà une chose étrange, un indice, un souffle élyséen peut être.



Une chère amie m'a offert, ce Noël, cet ouvrage consacré à Nicolas de Staël et au même instant, à 7663 kilomètres de moi, elle découvrait mon présent qui n'était autre qu'un livret consacré à ce même artiste.

Que penser de cela ?



Que penser de la naissance en 1951, de cette profonde amitié entre le poète René Char et le peintre Nicolas de Staël ?

De cette véritable symbiose naîtra un changement profond dans l'œuvre du peintre - dans celle du poète, je ne sais pas - la lumière va envahir sa peinture qui quitte également l'abstraction pure pour devenir, comme la poésie, plus allusive.



Cette lumière donc, va s’emparer des ciels, des terres et des mers de ses paysages.

« La lumière dévore les formes » dit-il, et le ciel inonde ses paysages.



un joli livre simple, à l’édition soignée et aux reproductions de grande qualité annotées de citations extraites de courriers de l'artiste.



La marque de l'amitié.

Splendide catalogue de l'exposition dédiée au paysage organisée par le musée d'art moderne André Malraux du Havre en hommage à Nicolas de Staël pour le centième anniversaire de sa naissance l'année dernière.



Je voudrais simplement citer cette lettre que lui adresse son ami René Char le 8 avril 1952 et reproduite page 69 :



"Tu étais frais comme le cresson de ma rivière natale, et dispos comme un chardonneret sur la branche du cyprès, Cher Nicolas, ce midi. J'ai été content et content de t'entrevoir.

Je t'aime bien, durablement.



Ton tableau a l'odeur d'un bouquet d'étoiles de chaleur. Tout s'y passe dedans comme le coeur et l'exigence, la difficulté de notre esprit et la simplicité de notre sensibilité ardemment le demandent. Il est beau et je le regarderai longtemps. Je suis à l'Isle vendredi après-demain.



Fraternellement.



René Char"



Tout est dit je crois. C'est pourquoi j'emprunte sa formule à René Char : "Il est beau et je le regarderai longtemps", tant ce livre invite à la contemplation.

Il y a un peu plus d'un an, à la sortie de l'exceptionnelle exposition du Musée Malraux du Havre consacrée à l'immense Nicolas de Staël, j'achetais ce petit livre.



Depuis, je ne m'en lasse pas.



Comme les impressionnistes en leur temps, Staël a peint les ciels. Et la mer. Dans le nord, en Normandie. Dans le sud, sur la Côte d'Azur et en Provence. En France et à l'étranger.



Une quête incessante de la lumière changeante. Qui finira mal.



Mais une oeuvre incroyablement forte que restituent si bien les différentes toiles ici reproduites.

"Picasso est Normand et je le prouve ! "



En commençant son discours inauguratif de l'exposition Picasso-Boisgeloup au Musée des Beaux-Arts de Rouen il y a quelques jours, Sylvain Amic son conservateur usa de la provocation pour rappeler au plus grand nombre de séjour normand du maître, méconnu du plus grand nombre au premier rang desquels... les Normands eux-mêmes !



Et pourtant, accompagné de ses enfants et de Marie-Thérèse, muse de l'époque, c'est bien à Boisgeloup dans ce petit village de l'Eure que Picasso va dessiner, peindre et sculpter avec frénésie, s'essayant même... à la littérature.



Directeur du musée Picasso d'Antilles, Jean-Louis Andral nous retrace dans ce petit livre souvenir ce pan d'histoire resté dans l'ombre, illustré de belles reproductions, de dessins notamment.

Il y a très longtemps déjà, nous vivions dans un appartement à Bruxelles. Nous étions obligés de nous partager le bureau, mon mari et moi. Chacun avait décoré sa partie. Perplexe, je regardais une reproduction qu'il avait rapportée d'une visite dans un musée et punaisée sur son pan de mur. Les couleurs étaient douces, gris, bleu. Les formes géométriques. Mais qu'est-ce que cela pouvait représenter ? J'ai fixé la toile. Et soudain, ils me sont apparus. Les bateaux. Plus je les regardais, plus ils me plaisaient. J'ai fait des recherches. L'auteur était Nicolas de Staël et il était mort tragiquement en se jetant du haut des remparts d'Antibes le jour-même de ma naissance, le 16 mars 1955.

Depuis, j'en ai vu des toiles de ce peintre. Je ne les aime pas toutes. Mais les paysages rassemblés dans ce petit carnet me plaisent beaucoup. Surtout les marines bleu et gris où l'on distingue les traces du couteau. Elle m'apaisent comme le spectacle de la mer que je peux contempler pendant des heures. « Si vous sentez l'énergie fantastique des vagues, faites-nous autant de maximes que l'écume des crêtes contient d'éclatements aérés de lumière. » écrit Nicolas de Staël. C'est cette énergie, ce sont ces éclats brillants que j'aime dans la nature et dans la vison que nous en donne Nicolas de Staël.

Ce recueil propose, en regard de chaque reproduction, un extrait de la correspondance de l'auteur. Il est d'un petit format à l'italienne plus facile à manipuler que mes autres grands livres d'art. Je l'aime beaucoup et je le feuilletterai souvent.

Nicolas de Staël ne me laisse pas indifférente. J’aime beaucoup ses paysages de mer, ses « bleus ». Je suis aussi touchée par les évènements qui ont marqué son enfance et qui influenceront sa peinture et tout le reste de sa vie. Dans ce livre, on trouve de très belles reproductions et des extraits de lettres qu’il adresse à ses amis. Un livre qu’on a du plaisir à avoir sur sa table de chevet. G.

Comme le souligne @Alzie, ce n'est décidément pas un catalogue mais un beau livre au sens le plus noble du terme. Peut-être est-ce la météo si grise du jour qui m'a inscité à rouvrir ce livre que je garde toujours à portée de main. On y trouve tout : la puissance d'évocation De Staël, mais aussi la diversité du monde exprimée à travers une simplification des lignes et des formes. Ah si chacun de ceux qui s'exprime dans notre société (dont moi évidemment !) avait la capacité de le faire avec autant de netteté et d'économie de mots et de traits que Nicolas de Staël...Le monde serait à la fois plus beau et plus serein. A lire, relire, méditer et partager définitivement car cela va bien au delà de la peinture !