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Citations de Jean-Louis Pietri (40)


Gu avait dormi deux heures, et mal, dans les odeurs rassis d’un motel miteux des bords de l’étang de Berre…
Il emportait quelques affaires personnelles dans un attaché-case de cuir fauve, un Colt 2,5 pouces calibre 38 planqué sous le siège conducteur, un faux passeport italien, deux mille francs en billets de 100 et trois mille dollars canadiens en billets de 50: un minimum pour assurer les premiers jours de cavale. Une fois parvenu en Espagne il aviserait. Quoi qu’il arrive, devant les flics ou les Siciliens, il devrait s’expliquer. Expliquer…
Expliquer… Expliquer quoi ? Il avait réussi à s’arracher en
catastrophe à la razzia fliqueuse de la veille, les autres avaient eu moins de chance. Un coup de fion, voilà tout!
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Selon le rapport de filature de la Brigade des stups de
Marseille, Gu Malozzi avait abordé le péage autoroutier de
Lançon de Provence, au volant d’une Mercedes 280 de location
le mercredi 27 août 1980 à 19h35.
Depuis vingt-quatre heures sa vie avait basculé des aguets
aux abois et la cavale ne faisait que commencer.
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Lors des briefings hebdomadaires des chefs de groupes opérationnels, les sourires de Maury ressemblaient à des doigts d’honneur brandis au nez des consignes pondues par les ronds de-cuir du ministère. Brau adorait, l’État-major de la PJ marseillaise s’en accommodait: le groupe Maury alignait les crânes.
Une main lave l’autre. Les temps sacrifiaient déjà au culte de la statistique…
«T’en as parlé à Mariani ? avait demandé Brau entre deux
gorgées de bière.
– Pourquoi je lui en aurais parlé ?
– C’est ton patron et ton pote, non?
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Un mec un peu bancroche et secret mais bon flic, l’inspecteur divisionnaire Julien Maury. Un gus qui touchait sa bille en matière de stups. Six ans à Paris au sein du groupe international de l’Office Central des Stups avant d’être muté à sa demande à Marseille, après son divorce. Par un de ces mystères qui hantent les décisions administratives il n’avait pas rejoint la Brigade des Stups marseillaise mais la Brigade de Répression du Banditisme. Aux yeux de Brau, Maury n’était certainement pas un de ces « pipeaux» de la Crim’ qui vous inondaient de notes de renseignement en cinq exemplaires pour dix grammes de shit, histoire de se faire mousser auprès de la hiérarchie. Maury se foutait de la hiérarchie et cette dernière le lui rendait bien. La faute à cette fausse indolence narquoise, à cette façon agaçante qu’il avait de paraître se foutre de tout, de lui-même comme du reste.
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Quatorze mois, depuis ce jour d’avril où Maury, un chef de groupe de la BRB1, avait glissé à l’oreille de Brau deux noms : celui d’un truand italo-marseillais, Auguste Malozzi, et celui d’un bled, Trabia, quelque part en Sicile. Et démerde-toi Maxime. Le tout entre deux bières au mess de l’Hôtel de Police de Marseille qu’on appelle «l’Évêché ».
«Pas une filière, Max, un pipeline entre Palerme et New York via Marseille. À toi de voir.
– On la joue ensemble ? avait proposé Brau.
– Les stups c’est toi, mon gros…
– J’suis pas gros, connard ! Je te cite comme source ?
– Pas la peine. C’est tout cadeau pour ta pomme…
– Si ça aboutit sur des gros bonnets comme tu le dis…
– Les lauriers seront pour toi. Gros !»
Du Maury dans le texte…
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Derrière ce matin sicilien il y avait quatorze mois d’enquête, de paperasses, de rencards, de filoches, de planques, des wagons de rapports, requises, écoutes, photos, des condés au bord du divorce, des bergères qui maudissaient le métier de leur mari, des soupes à la grimace dans les ménages poulagas, des fêtes de famille plombées, des morpions qu’on n’avait pas vu grandir. Le tout pour six cents pièces de procédure et sûrement autant coté italien.
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– Vous êtes, come dice…? tendu? Exact ?
L’inspectore faisait de visibles efforts pour s’exprimer en
français. Brau appréciait. Il n’était à Palerme, en compagnie de deux autres inspecteurs français, que depuis la veille.
– Exact! répondit-il sans préciser s’il parlait de la tournure
française de la question ou de sa nervosité.
Tendu? Il l’était, Maxime Brau.
L’opération «Palmar» touchait à son but, la dernière ligne
droite, l’heure de vérité. Le quitte ou double…
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Brau imagina l’effervescence fébrile régnant à la même heure dans les locaux de sa brigade, rue d’Oran à Marseille. Il aimait ces instants de tension, les vannes à la con qui masquaient mal l’anxiété précédant les «tombées» matinales de la brigade des stups. À treize-cents kilomètres de là, les condés marseillais s’apprêtaient à débouler chez les passeurs, les affidés de la filière franco sicilienne. Mais là-bas les flics n’avaient ni cagoules, ni gilets pare-balles, ni fusils d’assaut. Ils n’avaient que leur Smith et Wesson, leurs couilles, un café noir dans le bide et un nœud sur l’estomac. Un autre monde…
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Lorsque, une heure plus tôt, Brau avait aperçu les ombres cagoulées et armées comme des machines de guerre glisser dans la nuit sicilienne, il avait pensé que le dispositif d’intervention pour investir un labo de came clandestin était extravagant, mais on était en Sicile, sur les terres de la mafia. Trois semaines auparavant le procureur Gaetano Costa avait étéabattu via Cavour à Palerme. Un autre monde…
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. En se penchant il décela les silhouettes installées dans le véhicule. Deux, peut-être trois hommes. Pour
aller travailler, Domenico devrait passer près de la voiture.
«Brutto tempo», mauvais temps, jugea l’honnête citoyen trabiais. La météo n’était pas en cause. Il ne redoutait rien pour lui-même mais un proverbe de son pays disait: «Qui rien ne voit, de rien ne témoigne.»
Il referma les volets et retourna se coucher. Son patron
gueulerait un peu plus un peu moins…
«Cigarette ? »
Dans la Fiat Croma de la Guardia di Finanza, l’officier des
stups français Maxime Brau émergea de ses pensées. D’un geste de la main assorti d’un sourire las il refusa la Muratti proposée par son collègue italien et les deux policiers retournèrent à leurs pensées muettes.
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Mardi 26 août 1980, province de Palerme
La ville s’appelait Trabia. Ce n’était d’ailleurs pas vraiment une ville, plutôt une grosse bourgade côtière à trente kilomètres de Palerme.
Lorsque Domenico Gotti écarta les volets de son appartement, le jour se levait au-dessus de l’impasse Salvi où il logeait. En crochetant le volet de droite il lorgna la traînée de ciel bleu coincée au-dessus de lui entre les gouttières. Il pensa que la journée serait chaude, qu’il était à la bourre et que son patron allait encore gueuler. Bref, rien de bien nouveau dans le quotidien du jeune maçon sicilien. En crochetant le volet de gauche son regard descendit de l’azur du ciel au gris des pavés jusqu’à s’intriguer de la présence incongrue d’une Fiat Croma garée à l’extrémité de la ruelle. Il lui sembla que le moteur tournait. En se penchant il décela les silhouettes installées dans le véhicule. Deux, peut-être trois hommes. Pour aller travailler, Domenico devrait passer près de la voiture. «Brutto tempo», mauvais temps, jugea l’honnête citoyen trabiais. La météo n’était pas en cause. Il ne redoutait rien pour lui-même mais un proverbe de son pays disait: «Qui rien ne voit, de rien ne témoigne.»
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Je n’ai jamais écrit à Béatrice Héricon. J’ai acheté un ordinateur, je me suis adapté tant bien que mal au traitement de texte et de la correspondance promise j’ai fait un livre. Pour elle, peut-être, pour moi sûrement…
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Elle n’avait pas pris le temps d’écouter ma prudente réserve.
«…Mais mon ami disait aussi que tuer l’espoir c’est tuer la vie », je concluais pour moi-même en la regardant fouiller dans son véhicule, sans doute à la recherche d’une carte de visite.
Finalement elle griffonna son adresse sur un papelard que j’empochai sans lire, et elle disparut, tel un mirage, au volant du monstre ronflant, dans les brumes de ma nuit…
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– J’suis sûre que la mémoire vous reviendra. elle s’enjoua.
– Un ami à moi prétendait que l’espoir tue la vérité…
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Comment n’y avais-je pas pensé avant ?
La gamine avait sûrement plus de raisons qu’elle ne croyait de penser que j’étais un vieux gâteux amnésique. et aveugle.
– Alors ? M’assiégeait-elle à nouveau.
Disparue la petite fille boudeuse et contrite. La greluche élevait le ton, hérissait le poil, montrait les griffes.
«Alors ? » Elle m’engueulait.
Pas de doute, le même tempérament que la femme que j’avais croisée il y avait maintenant un quart de siècle.
– C’qu’est devenu Maury, j’en sais rien, j’ai menti.
– De toute façon il ne vous dira rien de plus. Là, pour le coup, j’étais sincère, hélas.
Elle me regarda tristement avec ses grands yeux clairs où la nuit déjà venait se baigner. Des yeux qui me parlaient de quelqu’un d’autre, de ce flic bancroche qui avait été mon ami
… Alors… Alors… Alors, j’ai fait une concession. J’ai dit:
– Laissez-moi votre adresse. Si je me souviens de quelque chose, je vous l’écrirai…
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À présent elle boudait, rogneuse, en pensant sans doute que j’étais un sale con. Je ne suis pas sûr qu’elle ait eu tout à fait tort.
– Tant pis, renonça-t-elle enfin en s’éloignant contrariée et déçue.
À mi-chemin de son véhicule cependant elle se retourna :
– J’ai le nom d’un autre ancien policier : Julien Maury. Ç’ui-là vous allez pas me dire que vous ne vous en souvenez pas, vous avez travaillé ensemble pendant des années. Vous ne sauriez pas où je peux le trouver ?
À ce moment-là seulement j’ai réalisé à qui elle ressemblait…
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J’avais martelé les mots. J’eus l’impression qu’elle allait se mettre à chialer, ce n’était qu’une impression. Bien la fille de sa mère, la Béatrice ! Un fregoli en jupon, sa daronne.
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J’aurais pu lui servir que Jérémy n’était que son demi frère. Frangin ou moitié frangin, Jérémy pouvait bien vivre où il voulait, il était trop tard. La cendre de ces jours était froide, j’avais la couenne trop tannée pour m’attendrir et les jérémiades insistantes de ma visiteuse commençaient à me bassiner sérieusement:
– J’me souviens pas et je ne suis pas sûr d’avoir envie de me souvenir! C’est clair ?
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Mais elle reprenait l’antienne. Je la comprenais : elle avait fait des centaines de kilomètres, pleine d’espoir, à la poursuite d’un fantôme, pour arriver dans ce trou perdu et buter sur un amnésique un peu taré. Je l’écoutai sans l’inviter à entrer dans ma turne paysanne.
– C’était une jolie femme d’après ma tante. En tout cas très jolie d’après les rares photos que j’ai d’elle.
J’aurais pu ajouter : superbement belle, racée, tempétueuse et un brin déjantée. À quoi bon salir un rêve ?
Un instant j’ai cru qu’elle allait me fourbir une photo de sa mère sous le nez. Elle n’en fit rien. Je l’en remerciais intérieurement. Devant mon air buté, elle entamait la partition Hector Malot, un Sans famille version soap opéra :
– Ma tante est morte j’avais quatorze ans. J’ai vécu avec mon frère, Jérémy. Il avait quinze ans de plus que moi. Il vit à New York aujourd’hui.
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Un tapin de luxe superbe certes, mais tout de même ! Garce machiavélique ou amoureuse trop naïve ? Vingt-cinq ans plus tard je n’avais toujours pas d’avis tranché. Pour le moins une entourloupeuse bellissime qui se jouait des hommes comme une marionnettiste, la belle disparue. Une superbe amazone, connue dans le monde de l’amour vénal sous le surnom de «Sylva ». Bref, une vie d’ombre et de lumière, pas présentable, pas racontable, à ne pas mettre dans les oreilles d’une inconnue surgie du néant sans un minimum de précautions…
Histoire de ne pas encourager la môme à poursuivre son lamento, je n’ai même pas fait semblant de fouiller mes souvenirs:
«Héricon? Ça m’dit rien!», je me défilais.
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