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Critiques de Jean Malaurie (30)
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Les derniers rois de Thulé

Une épopée émouvante dans le pays du froid, Jean Malaurie nous fait aimer ces compagnons Inuits et ce continent de glace. La fin du livre est comme un coup de tonnerre, une base nucléaire Américaine qui se construit à côté du village Inuit, terrible destin et rencontre de deux univers opposés.

On vibre avec l'auteur dans la fraicheur du grand nord, avec les légendes et les plaisanteries, les jeux de ces peuples du froid. Un grand livre et un grand témoignage...
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Lettre à un Inuit de 2022

Un livre plaidoyer à la fois pour peuple inuit, pour l'animisme et la nature sauvage qu'il pourrait être encore temps de préserver. Jean Malaurie connaît parfaitement le Grand Nord, particulièrement le Groënland et respecte la culture des peuples qui l'habitent. Il développe dans ce livre les errements de certains missionnaires et leurs conséquences néfastes sur un peuple qui vivait sa propre relation avec Dieu, probablement pas au sens de la culture judéo-chrétienne mais qui peut dire qu'elle était inférieure, à tout le moins différente. Les pensées philosophiques qu'il développe, spécifiquement dans les dernières pages sont riches d'enseignement. Sa relation avec l'animal -- ici précisément le chien de traîneau -- donne également à réfléchir. Un bon livre pour s'imprégner quelque peu d'une culture très éloignée de la nôtre dans laquelle plusieurs attitudes peuvent interpeller mais qui détient une valeur intrinsèque forte que l'auteur a voulu s'attacher à protéger.
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Les derniers rois de Thulé

Peut-être est-ce parce que j'ai lu ce livre durant un été caniculaire (1976), toujours est-il que je me souviens l'avoir trouvé particulièrement rafraîchissant, avec ses histoires de banquises et d'ours blancs ! Blague à part, un passionnant témoignage sur cette civilisation des Inouïts en cours de disparition, à la fois dure et tendre, racontée avec talent par un explorateur "à l'ancienne".
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Les derniers rois de Thulé

En 1951, après avoir accompagné Paul-Émile Victor dans le Grand Nord, Jean Malaurie part enfin seul pour Ultima Thulé, cette terre mythique dont Apollon, le grand dieu solaire, avait fait sa demeure selon les grecs anciens. Pressé par un sentiment d’urgence irrationnel, il gagne les confins du septentrion sans même attendre les fonds du CNRS, et c’est sans vivres ni équipement qu’il débarque au Groenland pour aller vivre au contact du peuple Inuit, retrouver et assimiler leur sagesse immémoriale. Son intuition du pire se confirme : l’US Air force est en train d’aménager une base dans le plus grand secret, au mépris total du droit international. Avec la naissance de la collection Terre Humaine., ce livre sera aussi témoignage à charge contre la barbarie du monde moderne et la nécessité de réagir si ce dernier veut survivre.

Hugues

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Les derniers rois de Thulé

L'auteur Jean Malaurie est tout de même un type hors du commun ! Son investissement physique pour ces peuples du Groenland et leur territoire, sa forte personnalité et finalement sa modestie force le respect: preuve étant qu’il reste très peu connu, sauf en Russie où il est vraiment célébré comme homme des glaces. Personnellement je me suis intéressé aux Inuits comme pratiquant du kayak de mer et voulant y trouver des renseignements pratiques , bien m'en a pris . Ce livre de poche de 840 pages qui débute en 1950 à Thulé et une somme qui représente le bréviaire de tout visiteur dans ces contrées. Malaurie s'intègre dans une communauté comme il peut, conditions de vie souvent impensable, mais amitiés, rigolades et amour à l’Inuit nous enchantent.. . C’est un récit passionnant car global, sur une civilisation présente depuis des milliers d’années , leur conception du monde avec le chamanisme, leur raison de vivre, la permanence de leur mœurs depuis des millénaires et leur connaissance du milieu est fascinante. On apprend qu'ils utilisent des armes et outils en fer , ce métal provient d’une seule source secrète, une météorite ferreuse de 58 tonnes tombée il y a 10.000 ans. Perdu dans le blizzard, affamé et transformé bientôt en glace, il y a toujours un cairn qui dissimule des victuailles pour vous sauver.. On connaît l’évolution, les américains et leur base atomique ensuite les dannois, l’intégration forcée et aujourd’hui une relative indépendance groenlandaise.

Bref cet ouvrage merveilleux n’est pas un manuel d’histoire, mais la saga extraordinaire de cet homme chaleureux, Jean Malaurie qui nous fait tomber en amour, comme disent leurs voisins, d’une civilisation presque disparue puis renaissante.

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Lettre à un Inuit de 2022

Ce livre a été une très belle découverte. Jean Malaurie livre ici un véritable cri du coeur. Les Inuits ne doivent en aucun suivre le mode de vie des Occidentaux. Au contraire, explique l'auteur, ils doivent garder leur singularité, leurs croyances, leurs relations avec la nature, leur mode de vie. Dans ce livre, Jean Malaurie leur lance un appel au secours. Ils doivent prendre conscience de leurs richesses avant qu'elles ne disparaissent au profit de l'uniformisation, de la mondialisation.

Un livre que je conseille fortement.
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L'Allée des baleines

Un très bref texte (qui est en fait un extrait du tome 2 de Hummocks du même auteur) précédé d'une introduction inédite. En 1990 Jean Malaurie peut enfin se rendre en extrême Sibérie, en Tchoukotka. Là où une expédition soviétique a découvert en 1976 un sanctuaire inuit, l'allée des Baleines, sur l'île d'Yttigran.

A peine décrite, deux doubles alignements de crânes de baleines et d'os regroupés suivant une logique numérologique, Jean Malaurie montre l'immensité du chantier qu'il y aurait à lancer. Interdisciplinaire et mêlant archéologie, ethno-anthropologie, géographie, tout semble rester à faire et on voit bien le dépit de l'auteur du trop court séjour sur place, qu'il doit déjà repartir. Le mystère du site reste entier.
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Lettre à un Inuit de 2022

L'aventurier, infatigable défenseur de la civilisation du Grand Nord, adresse une lettre aux Inuits à la veille de la conférence parisienne sur le climat.
Lien : http://www.lefigaro.fr/livre..
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Les derniers rois de Thulé

Les PEUPLES DU GRAND NORD M ONT TOUJOURS FASINE et J AI LU CE LIVRE IL Y A FORT LONGTEMPS A RELIRE
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Les derniers rois de Thulé

Livre lu avec passion il y a fort longtemps, et que je place illico dans ma PAR (pile à relire).
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Terre Mère

Jean Malaurie, ethnologue et explorateur, est l'auteur d'un ouvrage essentiel (parmi d'autres) : les derniers rois de Thulé. J'ai bien envie de classer aussi ce court essai, qui est en fait un texte extrait de son discours rédigé à l'occasion de sa nomination d'Ambassadeur de l'Arctique en 2007, parmi les écrits essentiels de notre début de siècle. Loin du texte sec et scientifique que l'on pourrait attendre d'un tel auteur, cet extrait est au contraire plein des émotions et des souvenirs de Malaurie, lesquels le poussent à lancer son cri d'alarme pour notre planète, à travers son combat pour les peuples autochtones du Nord. Un de plus direz-vous.



Mais ce récit poétique et engagé est celui d'un homme passionné par sa cause et terriblement lucide qui fait cet effroyable constat : "Nous sommes des veilleurs de nuit face à une mondialisation sauvage, à un développement désordonné. Si nous n'y prenons pas garde, ce sera un développement dévastateur. La Terre souffre. Notre Terre Mère ne souffre que trop. Elle se vengera. Et déjà les signes sont annoncés".



La prose est belle, le combat est juste. Ce ne sont pas les propos d'un "écolo illuminé" ou d'un doux rêveur, mais d'un scientifique et écrivain accompli qui assiste impuissant à la disparition d'un monde, au milieu d'une indifférence quasi générale dont nous sommes tous responsables, nous Occidentaux. Puissent ces paroles atteindre ceux qui pensent encore que le sort de l'homme et la l'état de la planète sont dissociables...
Lien : http://lectures-au-coin-du-f..
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Les derniers rois de Thulé

C est un ancien etat des lieux. Un document qui survivra a travers les âges car tout ce qui y est ecrit a disparu ou est sur le point de disparaitre.

Tres long a lire car tres dense et precis il vous emmenera ailleurs loin de ces campements d esquimaux d aujourd hui ou tout le monde vit dans une maison et ou le peuple des hommes des glaces se trouve pris entre alcool et deracinement; disparait jours apres jour.

Un document incroyable de jean Malaurie .



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Les derniers rois de Thulé

Un roman c'est une histoire, ici des dizaines sont offertes et de l'aventure. Reste-t-il des Hommes par excellence ?







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Terre Mère

Jacques Languirand nous fait un bref topo sur l'auteur Jean Malaurie. Plutôt que d'être une critique tradionnelle, il ressort les grandes lignes de l'ouvrage de même que quelques passages.
Lien : http://www.repere.tv/?p=290
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De la pierre à l'âme

Aucun titre ne saurait mieux résumer l'itinéraire exceptionnel de cette figure inclassable, Jean Malaurie. La pierre, il s'agit de celle accumulée dans des éboulis que ce géomorphologue étudie avec passion dès la fin des années 1940. Mais aussi de celle qui constitue la matière de certains des outils fabriqués par le peuple qu'il a approché le plus, les Inuit, jusqu'à se fondre en lui. L'âme, c'est la sienne propre sans doute, mais aussi celle des êtres humains ou animaux que ce savant se découvrant animiste a côtoyés durant sa longue existence. Le lecteur qui ne connaît pas Jean Malaurie pourra être dérouté pas l'ouvrage foisonnant où se rencontrent progressivement ses différentes facettes: scientifique et intellectuel fondateur des Editions Terre Humaine, résistant dans sa jeunesse, explorateur (encore qu'il récuserait probablement ce terme), écrivain, philosophe et mystique, précurseur de l'écologie, défenseur des peuples qu'on appelle aujourd'hui "premiers" dont il a su déchiffrer la valeur culturelle. On peut aussi, comme c'est mon cas, s'y engouffrer avec fascination. C'est que la construction du livre échappe aux schémas classiques, notamment chronologiques: il s'agirait plutôt du tableau d'un peintre, construit par touches successives et dont la cohérence d'ensemble se révèle progressivement. Pastelliste, l'auteur n'hésite pas à revenir sur son ouvrage, à redire, à rajouter un éclairage, créant des sortes de spirales. Le bilan d'une grande aventure intellectuelle et humaine, non terminée, couvrant un quart de siècle.
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Terre humaine

Ce livre est un recueil de 28 extraits d’auteurs qui ont publié dans cette prestigieuse collection.

La préface de Jean Malaurie retrace le parcours de Terre Humaine qu’il a fondée en 1955. Les titres présentés constituent un échantillon des grands ouvrages qui comptent parmi les best-sellers d’auteurs incontournables.

On peut se sentir brassé et submergé par cette masse de textes aussi puissants et commencer par ranger ce livre pour une lecture ultérieure. Ce serait dommage, car beaucoup de ces chapitres pourraient donner envie de lire dans son intégrité l’ouvrage correspondant.

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Les derniers rois de Thulé

1950-1951 : au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, Jean Malaurie, géomorphologue de formation, découvre les populations du grand Nord groenlandais. Entre de multiples expéditions, Il partage la vie quotidienne de ces communautés inuits qui se réduisent à quelques iglous enfouis dans le froid le plus extrême : la survie tient aux produits de la chasse et de la pêche, à la solidarité dans un dénuement quasi total. La fierté de ces hommes et de ces femmes rayonne au long des pages.

Et puis au retour d'une expédition, l'irruption du pire du vingtième siècle : une base militaire américaine ultra secrète ; des milliers d'hommes au service de l'arme nucléaire. Les Inuits sont déplacés de force bien loin de leurs terres ancestrales, sans aucune contrepartie. Fin du nomadisme, installation dans des maisons préfabriquées bien vite transformées en taudis, descenseur social : ils passent ainsi du statut d'hommes et de femmes libres et fiers, à l'état d'un lumpenprolétariat, ayant les pires des difficultés à s'adapter aux conditions d'accession aux progrès de la modernité : individualisme, chômage, alcool, tabac...

Si par certaines de ses pages cet essai semble dater - soixante-dix ans ce n'est pas rien – il sonne comme l'une des prophéties des mouvements actuels dus aux évidences du réchauffement de notre planète. La démarche de ces centaines de milliers de Greta Thunberg de par le monde paraît s'en inspirer.
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Les derniers rois de Thulé

Il s'agit d'un documentaire passionnant sur la vie des Inuits du Groenland. L'anthropologue Jean Malaurie traite des thèmes variés : la chasse, la vie en communauté, la vie en famille, les légendes esquimaudes, le chamanisme... Beaucoup de concret, on a l'impression d'y être. De plus, ce livre montre comment un peuple s'adapte à des conditions de vie extrêmes. C'est vraiment fascinant. Enfin, l'auteur termine le livre en s'interrogeant sur l'avenir de ces Inuits face à la montée du libéralisme et du modernisme. C'est très intéressant. Cela dit, ce livre date des années 1950. Actuellement, la société a évolué. Mais j'en recommande la lecture.
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Terre Mère

Le texte de ce petit livre est tiré en partie d'un discours de Jean Malaurie à l'occasion de sa nomination à la fonction d'ambassadeur de bonne volonté pour les régions polaires arctiques.

Avec des propos emplis de bon sens, de poésie, de spiritualité et quelques anecdotes personnelles, Jean Malaurie nous met en garde contre la mise en danger de la nature polaire et des populations du Grand Nord.

"Nous sommes des veilleurs de nuit..."
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Lettre à un Inuit de 2022

Jean Malaurie – né en 1922 , (« lettre pour 2022 » y est donc une allusion, un legs !) fait parti de la génération de “grands aventuriers humanistes” de la science du XXe siècle ainsi que Paul-Émile Victor (1907 – 1995), Théodore Monod (1902 – 2000), Haroun Tazieff (1914 – 1998), Alain Bombard (1924 – 2005), Jacques-Yves Cousteau (1910 – 1997) pour ne citer que les plus connus plus particulièrement en nos contrées, qui nous ont aidés à mieux comprendre notre monde, notre Vie, le lien des interactions qui nous lient au sein de la nature, aux uns et aux autres, notre fraternité humaine si souvent déchirée …

Ce fascicule, une “lettre ouverte” sous forme de plaidoyer pour les peuples du “Grand-Nord” , les Inuits du Groenland plus spécialement, est un appel poignant au respect d'une Civilisation, la plus ancienne connue, très malmenée (voir l'extrait de « Cosmos » en annexe) depuis des siècles par notre culture de “profits” sans frein ; les Ancêtres de notre humanité dans la symbolique du monde des méandres “des inter-espaces du perçu et de l'imperçu”*, l'animisme des “shaman” (celui qui a la connaissance). Jean Clottes (spécialiste du Paléolithique supérieur et de l'art pariétal) autour de la Grotte Chauvet de l'Aurignacien en Ardèche, est un de ceux qui rendent compte aujourd'hui de la richesse et de la profondeur des origines de notre humanité**.

J. Malaurie dans sa relation privilégié, de longue date, avec les Inuit, dans son appel au peuple du Groenland (Kalaallit Nunaat) pour que se développe une véritable entité culturelle et géopolitique, nous sensibilise à travers son investissement à l'énorme enjeu qui est en train de se jouer dans cette région Arctique entre les grandes nations avides de ses “richesses matérielles” potentielles, sans aucune (ou si peu !) considération pour le très fragile équilibre environnemental de cette partie du globe. Cette région planétaire concerne, comme l'Antarctique, l'ensemble des courants marins de la Terre, mais elle ne bénéficie pas du protocole de Madrid*** (1991) qui lui-même est pris “d'assaut” par la Russie depuis 2011 !

J. Malaurie adresse ici, à l'occasion de la COP 21, un appel à notre conscience humaine, retraçant depuis « l'affaire Thulé »**** (le 21 janvier 1968, un B-52 s'est écrasé avec quatre bombes H à quelques kilomètres de la base) un historique d'un très grand intérêt.

Nous encouragerons la lecture de cet ouvrage à destination de l'Édification d'une Humanité plus mature et gage de sa pérennité, à défaut de pouvoir faire plus !



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* voir à ce sujet l'ouvrage remarquable : « L'Ensorcellement du monde », Boris Cyrulnik, éd. Odile Jacob © 2001



** « Chauvet-Pont d'Arc », “Le Premier Chef-d'oeuvre de l'humanité”, Pedro Lima, éditions - SYNOPS © mai 2014



*** https://fr.wikipedia.org/wiki/Protocole_de_Madrid



**** en annexe un extrait pages 19 et 20 de : « COSMOS », “Une ontologie matérialiste”, Michel Onfray, éd. Flamarion, © 2015

« Le rude personnage, septuagénaire, qui avait eu pour mon père, plus âgé que lui, tous les égards dus aux anciens et qui, un soir, sur une île, au milieu des pierres, près d'un feu de bois, lui apporta, venue de nulle part, une chaise pour que mon père s'y assoie, Atata, donc, tétanisa l'assemblée. Les passeurs de l'inuktitut à l'anglais s'étaient tus. Un long silence de mort envahit la petite bicoque en bois que l'ours aurait pu démonter d'un seul coup de patte.

L'Inuit édenté donna l'explication : l'ancien rapportait une histoire terrible. Au moment de la guerre froide, lorsque les États-Unis et l'URSS envisageaient une guerre nucléaire, le pôle Nord était une zone stratégique. Une base au Groenland avait d'ailleurs permis aux Américains d'avancer leurs pièces — un bombardier muni de ses bombes atomiques y a même raté une manoeuvre d'atterrissage avant de couler sous la glace, emportant avec lui ses armes de mort.

À cette époque, les Américains ont déporté les peuplades inuits afin d'occuper la région plus au nord : les familles, les femmes et les enfants, les anciens, leurs maigres outils de chasse et de pêche, leurs kayaks, leurs chiens et leurs traîneaux. C'était compter sans le fait que, plus haut vers le pôle, la glace est plus épaisse, impossible à percer pour la pêche, donc. Les Inuits sont repartis vers le sud pour ne pas mourir de faim et mourir tout court, puisque le phoque leur donne tout : de quoi se nourrir, se loger (les intestins servent de vitres pare-vent), s'habiller (la peau des bêtes est cousue avec leurs nerfs), se déplacer (la peau de l'animal enveloppe le kayak).

Quand les Américains ont constaté ce trajet des Inuits en sens inverse, ils ont recommencé leur déportation vers le nord. À nouveau les familles, les femmes et les enfants, les anciens, à nouveau les maigres outils de chasse et de pêche, à nouveau les kayaks, les chiens et les traîneaux. Mais pour empêcher que ce peuple ne revienne sur ses lieux de chasse et de pêche plus au sud, l'armée américaine a tué les chiens et les a empalés. C'est en rapportant le meurtre de ses chiens qu'un demi-siècle plus tard Atata pleurait.

Mon père qui ne vit pas ce qu'il venait voir a vu ce qu'il ne venait pas voir : le récit de la fin d'un peuple, d'une civilisation, d'un monde. Atata était à la mer et aux chiens ce que mon père était à la terre et aux chevaux. Ces hommes n'ont jamais été séparés de la nature, ils savaient qu'ils en étaient des fragments et leur sagesse tout entière procédait de cette évidence. Atata pleurait ses chiens empalés comme j'ai le souvenir d'avoir vu un jour mon père ému jusqu'aux larmes me rapporter comment un cheval qu'il aimait (peut-être était-ce « Coquette », il parlait souvent de ses chevaux et il ne me revient que ce nom-là) et avec lequel il labourait est tombé raide mort dans les champs, terrassé par une crise cardiaque,

Ce moment a lié Atata et mon père. Dès lors, et jusqu'à la fin du voyage, l'Inuit et le Normand se souriaient, se regardaient, se parlaient sans se comprendre verbalement mais en sachant que la véritable compréhension se moque bien des mots, du verbe et des discours. le monde de l'hyperboréen et celui du Viking étaient un seul et même monde. J'étais témoin de cette osmose, de cette symbiose de deux hommes qui, sages, savaient qu'ils étaient une petite partie du grand cosmos, un savoir qui mène au sublime chez qui le sait. »
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