Tu n’as jamais été bien nulle part. Déjà, petite, tu avais le sentiment d’être immense, de prendre trop de place, une place qui n’était pas la tienne. Enfant, tu te rêvais ailleurs. Tu ne pouvais pas encore comprendre qu’il était impossible d’échapper à cette vie-là, même si tu ne l’avais pas choisie. Tout le monde a peur. Tout le monde ment. Sans jamais trouver tout à fait le courage de fuir pour de bon, tu as continué à multiplier les tentatives d’évasion, même temporaires. Le parfum de l’adrénaline t’enivrait, tu t’es mise à le traquer partout, dans le mensonge et dans le vol, puis dans l’inanition, dans le sexe, dans la drogue.
Alors tu t'intéresses à Diane. Tu lui poses des questions sur sa vie affligeante, sans amant, sans enfants, sans plaisir depuis qu'elle a quitté le monde des bars qui la tuait à petit feu, avec sa dope et sa vodka. Elle ne doit pas se confier souvent parce qu'elle oublie bien vite sa place et la tienne, son rôle, ta vulnaribilité, et elle te raconte tout de sa triste existence. Ses confidences te font sentir comme une géante, tu en redemandes. Tu as trouv. une vocation; désormais, tu te drogues à l'humain.
Enfant, tu te rêvais ailleurs. Tu ne pouvais pas encore comprendre qu'il était impossible d'échapper à cette vie-là, même si tu ne l'avais pas choisie. Tout le monde a peur. Tout le monde ment. Sans jamais trouver tout à fait le courage de fuir pour de bon, tu as continué à multiplier les tentatives d'évasion, même temporaires. Le parfum de l'adrénaline t'enivrait, tu t'es mise à le traquer partout, dans le mensonge et dans le vol, puis dans l'inanition, dans le sexe, dans la drogue.
Ta mère a la mémoire courte. Accuser les autres, c'est pratique, mais c'est oublier ton adolescence anorexique, ta tendance lourde à la mélancolie, tes tentatives de fugue depuis que tu as six ans, baluchon sur l'épaule dans les rues cossues qui bordent la montagne, c'est oublier l'ampleur de la misère des riches. C'est oublier le sang vicié qui coule dans tes veines, le sang de ton père, celui qui aimait tant fuir qu'un beau jour de printemps, il a décidé de ne plus revenir.
L'angoisse t'envahit aussitôt, tu fais non de la tête, tu ne peux pas, tu ne veux pas, tu ne dois pas manger. Surtout pas ça. Le trou dans ton ventre, c'est tout ce qu'il te reste de la mort qu'on ta volée, ils n'ont pas le droit de le remplir de force.
Tu cultivais ta froideur avec acharnement. Dans les moments de faiblesse, tu regardais ton corps si maigre, mais encore bien trop vivant, et tu rassemblais toutes les parcelles de ton énergie pour le hair.
Tu pleures rageusement en réalisant que tu capitules sans même combattre, avant de sombrer dans un sommeil tellement profond qu'il ressemble à la mort, mais pas tout à fait assez.