Jo Witek

Il est “Admis”.
– Je t’ai fait un sandwich à la terrine de sanglier, j’ai pas mis de cornichons, j’en avais plus. Y en a encore un qui a remis le pot vide dans le frigo. Ce que ça m’agace, ces façons ! Ce que ça m’agace !
Depuis qu’elle a serré la main du ministre de l’Éducation, depuis que le maire du village vient prendre le café dans sa cuisine et que la presse régionale lui téléphone pour interviewer son fils prodige, sa mère a changé. De coiffure, de couleur de cheveux, d’attitude aussi. Elle se tient plus droite qu’avant, elle ne porte plus son vieux jogging pour aller au supermarché et elle essaie de mieux s’exprimer. Les efforts qu’elle déploie pour se hisser à la hauteur de sa réussite le touchent. Parfois, il en pleurerait parce qu’il n’a jamais rien fait pour elle. Rien. Même les cadeaux de fête des Mères, il faisait exprès de les casser tellement il les trouvait moches, dérisoires, inutiles. Il le regrette sur ce quai de gare. Maintenant qu’il part, il le regrette.
– En arrivant à Paris, je vais manger avec mon tuteur de prérentrée, maman. Il m’invite au restaurant. C’est gentil, mais ce n’était vraiment pas la peine, le pique-nique. Je te l’avais dit…