Les véritables illuminés – on peut les compter dans un siècle – sont au-dessus des rumeurs du monde et des réclames tapageuses, des coutumes passagères et des goûts du temps. Aussi, leur sort est ineffablement âpre : Vivant dans le silence du monde intime, ils ne connaissent guère du monde extérieur que les mépris et les insultes dont il les abreuve, les haines et les calomnies dont il les accable.
Dans le courant de l'année 1854, l'abbé Boullant fit un assez long séjour à Paris. Il habitait une petite chambre dépendante du Monastère des religieuses de l'Adoration réparatrice, qui était alors établi, 12, rue des Ursulines. La fondatrice de la Congrégation, Mère Marie-Thérèse l'avait mandé pour l'entretenir de ses projets de fondation d'une branche de religieux de l'Adoration réparatrice. Malgré 'tous les efforts de Mère Marie-Thérèse, il ne fut pas donné suite à ses projets.
Déclaration de Gustave Boucher à Huysmans : "Avec vous, je cheminerai dorénavant dans les jardins de l'Église, non pas en étranger, mais en compagnon eucharistique. Mais je ne veux pas donner au diable le mérite de ma conversion ; je veux l'attribuer tout entier à votre amitié et à vos prières fraternelles qui, je crois, m'en ont uniquement valu la grâce." (p. 97)
Au sortir de la Trappe Huysmans était- il converti? Qui dit conversion dit changement complet de vie. Or, après huit journées, il avait repris ses travaux, ses habitudes. Il n'avait pas encore renversé sa vie, mais il n'était tout de même plus le même homme. Il avait sorf de rédemption ; il aspirait à la Foi ; le besoin de croire devait bientôt se transformer en croyance ; le temps allait faire le reste.
Mais je demeure persuadé que toutes ces histoires de magie et de satanisme ne contribuèrent pas peu à l'aiguillonner du côté de la religion et que ses relations avec le monde occultiste ne furent point étrangères à son évolution religieuse.
Huysmans en profita pour s'évader du naturalisme. Il le fit discrètement, sans tapage. Il se retira des cénacles, des tavernes artistiques, des voisinages importuns, pour s'enfermer dans son logis, loin des bruits de la rue, et écrire A Rebour, dans lequel il offrait toute son admiration à Baudelaire, à Villiers de l'Isle Adam et à Barbey d'Aurevilly.
Ce livre étrange apparut comme une oeuvre extravagante et folle. On a dit qu'il était le manuel de l'onanisme de l'imagination. Huysmans s'y révélait en quête de sensations neuves, de joies inédites, de frissons rares et d'exquises névroses !
Un petit groupe d'hommes garde héréditairement en France, depuis plus d'un siècle, une attitude religieuse, transmise des pères aux enfants, entretenue par des habitudes de vie et d'éducation, et dont l'originalité procède surtout de scrupules de conscience et des règles de conduite.
Ils forment ce qu'on appelle la Petite Église, L'origine de la Petite Église remonte à 1801, époque à laquelle fut conclu le Concordat entre le Pape Pie VII et le premier consul Bonaparte. Elle constitue, à proprement parler, le schisme des anticoncordataires.
Peu après, Pernety créa un nouveau grade, celui de chevalier du Soleil, dont le rituel contenait un cours complet d’hermétisme et de gnose.
Le séjour à Avignon, pour un religieux en rupture de ban, était peu sûr. Aussi, peu après son arrivée dans la capitale du Comtat-Venaissin, Pernety, par crainte des persécutions, crut prudent de quitter Avignon. Il quitta même la France et partit pour Berlin, où le roi Frédéric II accueillait avec bienveillance les émigrés étrangers, et particulièrement les Français.
D’une manière générale, les idées de Pernety sont celles de Swedenborg. A l’exemple du voyant suédois, Pernety admettait un Dieu unique, incréé, infini, enfermant en lui la Trinité divine. Comme Swedenborg, il croyait aux anges, aux esprits célestes intermédiaires entre le ciel inférieur et l’homme. On sait qu’un des principaux secrets des illuminés était d’avoir la révélation et la vision directe des anges commis à leur garde.
Parmi les occultistes, Stanislas de Guaita tient un tout autre langage. Dans un chapitre du Temple de Satan, il traite tout au Iong des doctrines bizarres d 'un sorcier moderne qu'il désigne sous le nom de Jean-Baptiste, "Pontife d'infamie, basse idole de la Sodome mystique, goétien de la Pire espèce, homme misérable et criminel, sorcier et fauteur d'une secte immonde".
Ce n’est là que fausse modestie : on trouve chez les anciens et même chez les modernes qui ont précédé Pernety des interprétations allégoriques de la mythologie, mais d’ordre théosophique et non pas hermétique. L’allégorisme est, en effet, chose ancienne, mais l’allégorisme hermétique appliqué à l’ensemble de la mythologie est incontestablement la création de Pernety.