Je n'ai pas retenu le nom de la nouvelle enseignante,
Ni la couleur des murs de ma classe
Ou qui était assis à côté de moi.
Après cette rentrée, on ne s'est plus adressé la parole.
J'ai appris là ce qu'était l'amour.
“Je décide de commencer la déconstruction sans attendre.
J’attaque les murs.
J’y décroche mes affiches gommées,
Et dévisse celles laminées.
Mon père devra sabler la pièce après.
Chaque morceau que je retire laisse son fantôme.
À l’époque, ce qui était de papier
Me semblait toujours si fragile.
J’étais vraiment obsédé par les laminés.
J’avais déjà peur de l’œuvre du temps.
Je suppliais ma mère constamment;
Nous nous rendions souvent au magasin d’encadrement,
Figer dans un matériau plus ferme
Le friable et l’éphémère.
J’y passais toutes mes économies;
Petit commissaire d’une exposition
Que j’allais complètement déserter à mon âge adulte.
Les souvenirs laminés restent,
Mais ils perdent leur éclat.
Ils ne flétrissent pas, non,
Mais ils se raidissent comme des morts.
Laminer, c’est mettre en cercueil.
Munis d’un exacto,
Du bout des bras,
Je décolle mes étoiles
Qui ne sont plus fluorescentes.
Le plafond n’est plus incandescent.
Je gratte tous mes rêves évaporés
Dans la colle affaiblie
Des astres jaunis.
Elles ne filent plus,
J’ai déjà pris tous mes souhaits;
Mes perséides désertées.”
Les retailles de Mirado HB,
Des nénuphars dans l'eau vinaigrée.
Quand on jouait, il fallait toujours que je
sois la victime
Celui ou celle qu’on kidnappe et surveille
Pour qui on se bat ou qu’on retient de force.
Je m’arrangeais toujours pour ne pas qu’on
me sauve
Pour passer plus de temps avec toi : être ton
prisonnier
La Voie lactée, c'est le chemin de lait.
C'est vrai.
Quand on regarde une photo de la galaxie,
Ça ressemble à un verre de lait renversé,
Qui s’imbibe dans le vide de l'espace.
Une milky way.
Les étoiles sont de petits dégâts lumineux.
J’époussette des cartables organisés
Par couleur, par taille, par importance.
J’entends la voix de mon père :
— Tu ne pourras pas tout garder.
C’est d’une violente vérité.
Un matin d’automne, le narrateur reçoit un appel de son père : celui-ci veut transformer son ancienne chambre d’enfant en établi. Le jeune homme prend alors la route vers sa ville natale, où l’attend la difficile tâche de déterminer ce qui, dans les boîtes de souvenirs accumulés, mérite d’être rescapé. Tandis qu’il retrouve les objets familiers à l’éclat terni par le temps lui reviennent avec vivacité des moments partagés avec un premier amour, depuis longtemps perdu.
À peine descendus de nos vélos,
On se ruait devant la console.
La cartouche était abîmée, un écran noir :
Tu as soufflé dans la cassette.
Tu as ressuscité le jeu.
Est-ce que qu'il faut placer les jouets avec les toys, dans le même coffre?
Est-ce que ses fairy tales s'entendront avec mes contes de fées?
J'imagine des malentendus entre Snow White et Blanche-Neige; laquelle croquera la pomme en premier?
À ton réveil, j'ai fait semblant de faire du café
Écrasant un filtre au fond d'une tasse.
Je m'exerçais à te réveiller dans le futur,
M'exerçais à notre vie d'adultes.
Papa se réveillait toujours avant maman pour lui faire son café.
Le passé peut être encombrant,
Mais il faut faire attention de ne pas faire
Un trop grand ménage.
Ça pourrait être étourdissant de se retourner
Et de ne plus rien voir derrière soi.