Un filet d’espoir se glisse furtivement à travers les barrières que j’ai érigées, mais aussitôt je referme violemment toutes les portes. L’émotion est nuisible. Les gens qui suscitent des émotions en moi sont les pires. Je suis plus à l’aise avec un cœur de pierre. Pas de sentiments, pas de blessures.
Isaiah fait la grimace.
- Quoi d’autre ?
- Interdiction de sécher les cours, de manquer de respect à sa femme, aux profs ou à qui que ce soit.
- T’es foutue.
- Je t’emmerde encore.
- J’t’aime aussi, ma chérie.
- Je comprends, dit-il d’un ton dur. Mais ça ne veut pas dire que je suis d’accord.
Bon sang, je déteste ce Ryan. Trop parfait, avec sa vie parfaite, son corps parfait, son sourire parfait, à faire semblant de ne m’avoir jamais vue avant. Il me regarde du coin de l’œil, et je comprends d’un coup pourquoi il fait le beau : Ryan veut impressionner Scott. Puisque c’est comme ça, on va partager un peu.
- Il m’a draguée, je balance.
Silence. Ma phrase a interrompu tout net leur discussion de débiles. Scott écarquille les yeux.
Il me sourit alors gentiment, et ça me fait bizarre. Comme si ce sourire avait été inventé juste pour moi. Un sourire superbe. Parfait. Paisible. Avec de petites fossettes. Qui me promettrait amitié, bonheur et rires, et qui me donnerait envie de répondre à ce sourire.
- Je vais te dire une bonne chose, Hutchins. Si tu as gagné ce jour-là, tu ne remporteras pas la partie avec Echo. Elle est à moi, pas à toi. C’est clair, amigo ?
Je me suis autorisé le ricanement de rigueur.
- D’après mes informations, Echo n’est pas une proie facile. Je ne suis pas certain que tu sois assez viril pour répondre à ses attentes…
— Je ne te laisserai pas partir.
Je cligne les paupières. Il peut toujours rêver.
— Tu ne me laisseras pas partir ?
— Non, c’est hors de question. Tu es à moi, et je ne perds jamais.
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Dans quel monde vivons-nous ? Comment les adultes pouvaient-ils encore s’étonner que nous nous rebiffions ?
- Tu imagines ce que cela représente, de ne se souvenir de rien ? a-t-elle poursuivi. Maman m’aimait, je le sais. Jamais elle ne m’aurait fait de mal si elle avait pris son traitement. Depuis cet épisode, je fais des cauchemars abominables, chaque nuit, sans exception.
Elle s’est interrompue. J’ai compris qu’elle cherchait la meilleure manière de m’expliquer ce qu’elle avait ressenti.
- Tu vas te coucher, un soir, tout va bien dans ta vie ou presque. Disons que tu t’accommodes de la situation. Tu es en deuil de ton frère, tes parents sont divorcés, c’est dur mais tu te raccroches à ce que tu as. Et tu te réveilles quelques jours plus tard, sur un lit d’hôpital, tu souffres le martyre et ce qui restait de ton univers s’est écroulé… Voilà pourquoi je veux savoir ce qui s’est passé. Pour avoir une chance…
Elle me rappelait la statue d’une madone que ma mère avait plantée dans un de nos parterres de fleurs. Les bras ouverts, attendant une réponse de la part d’un dieu qui nous détestait tous les deux.
- Une chance de redevenir normale, a-t-elle achevé, un peu piteusement.