Lyse Williams

Quelques minutes de combat m’ont convaincu, cette fille est mon alter ego. Elle possède une rage en elle, une rage destructrice et salvatrice à la fois, et je ne connais que trop bien cette rage. Celle qui peut vous détruire autant que vous élever. Ce sentiment m’a tenu compagnie durant deux ans, devenant ma seule camarade, ma seule confidente et mon exutoire secret. Je reconnais désormais ce sentiment entre mille, pourtant, je n’avais jamais vu une personne exprimer sa colère avec tant de beauté et de violence. J’admire la rage que cette fille contient en elle, car bien qu’ayant choisi de laisser la mienne derrière moi, je ne peux nier son existence encore nichée dans les recoins sombres de mon coeur.

Chapitre 2 :
Joshua
«...Mon regard se porte sur Audrey, c’est étrange comme tous m’insupportent sauf elle. Si je devais lui parler, je ne la blesserais pas. Non. Elle, je voudrais lui dire qu’elle est belle et que j’aime les mèches qu’elle a faites. J’aimerais lui dire que son gilet noir est beaucoup trop grand pour elle mais que cela ne fait rien parce qu’elle est magnifique. J’aimerais entourer le silence de ma vie de ses rires. Mais je sais que ce que j’aimerais est impossible. Prisonnier d’un reflet que je ne connais pas, je suis devenu une bête, un monstre et plus jamais aucune femme ne posera les yeux sur moi sans tressaillir. Mais même si je sais tout cela, je continue de venir l’observer. Parce que l’espace d’un instant, dans l’océan de douleur que j’éprouve, le sourire d’Audrey me fait espérer, juste assez pour avancer encore un peu. Quelques heures ou une journée de plus, et c’est déjà ça.»

J’ai le sentiment d’avoir toujours connu son corps. Il m’accueille, tandis que le mien découvre son intimité humide et douce. Être en elle me procure un bien fou. Je frôle l’orgasme, mais retiens mon souffle. Mon sang pulse tandis que je ferme les yeux pour me délecter de ce sentiment proche de l’extase. Elle est merveilleuse. Jamais je n’avais pu goûter à ce sentiment puissant d’appartenance durant le sexe, c’est le cas avec Kat. Mon corps lui appartient, et être en elle semble la chose la plus naturelle qui soit. Nos corps sont faits l’un pour l’autre. Je fais de lents allers-retours afin de faire monter en elle un nouvel orgasme. Elle agrippe mes cheveux à deux mains et se cambre encore. J’embrasse son cou, ses seins, sa peau. J’aime son corps. Le plaisir monte en moi rapidement. Deux ans que je n’avais pas fait l’amour, rien d’étonnant que je sois au bord de l’explosion.

Chapitre 3 :
Audrey
«… Mais de semaine en semaine, j’ai constaté ses progrès. Il parvient à se déplacer seul à présent, même si ce n’est pas parfait, c’est un bon début. Je ressens une fierté d’avoir vu cet homme se relever. Il m’intrigue. Je l’observe et tente de deviner ses intentions et ses envies. Pourquoi n’a-t-il jamais tenté de venir discuter avec moi ? Pourquoi reste-t-il seul et silencieux ? Mais surtout, pourquoi le fait que ce parfait inconnu m’observe ne me met pas mal à l’aise ? Au contraire, j’aime sentir son regard sur moi. Est-ce parce qu’il se dégage de lui une aura à la fois sombre et lumineuse ? Intense et envoûtante ? Il m’intrigue. Il me captive. Je finis par oublier ma propre douleur, tant je suis asservie au désir de découvrir les siennes.
– Hé, oh, tu m’écoutes ?

...»

Des émotions longtemps oubliées refont surface, le désir, la passion, la douceur et peut-être aussi l’amour, pas celui qui conduit à faire des folies, mais l’amour protecteur, celui qui nous rend meilleurs. Je suis heureux et apaisé, comme lorsque j’avais 10 ans et que mon frère venait dormir avec moi parce que j’avais fait un cauchemar. Il prenait ma main et me jurait que tout irait bien. Ce sentiment, je ne l’avais plus ressenti depuis bien longtemps ; pourtant, la main de cette fille, bien que plus fine que celle de mon frère, me fait ressentir une fois ancrée à la mienne la même paix intérieure. Nous avançons toujours main dans la main vers la deuxième porte, là encore, elle a la clef.

Cet homme ne m’impressionne pas. Je le sais d’expérience, dans la vie, la plupart des personnes ont un point faible, qui en général gravite autour de l’alcool, les femmes, ou l’argent. Ne pensant pas pouvoir lui mettre à disposition les deux premières solutions, je tente la troisième option et tire de ma poche mon portefeuille. J’en sors un billet de cinquante et lui tends. L’homme me dévisage un quart de seconde avant d’éclater de rire. Je patiente, penaud et incertain, mais lorsque le vigile reprend son calme, je comprends à son regard que je ne passerai pas. Je décide pourtant de ne pas m’arrêter là. Je fouille dans mon portefeuille et cette fois en tire un billet de cent.

Il me disait souvent : « Tu sais, Gray, la vie continue, avec ou sans toi. Tu peux faire une pause, mais le temps que tu passes à attendre éloigne de toi toutes les possibilités que tu aurais pu saisir ».
Je crois que c’est lui qui m’a donné le goût de la philosophie, parce que franchement, à 14 ans, cette phrase n’avait pas grand sens pour moi. Aujourd’hui en revanche, presque six ans après, je sais qu’il avait raison. Mais j’ai fini de pleurer sur mon sort, je compte travailler dur pour obtenir mon diplôme. Aucune distraction ne sera tolérée, sauf Colin, de temps en temps, pour boire une bière.

Même dans mes rêves les plus fous, je n’aurais jamais imaginé vivre un tel moment de perfection. Elle ajoute du bain moussant à l’eau, tandis que je prends place dans la baignoire, dos contre la paroi. Kat pénètre à son tour dans l’eau et vient se caler entre mes cuisses. Je n’ose plus bouger, de peur de me réveiller seul et misérable dans mes draps froids. L’instant est parfait, si parfait que j’arrive à douter de sa véracité. Kat n’a plus rien à voir avec celle qui me repousse, au contraire, elle s’unit à moi et je ne parviens pas à envisager un seul instant que tout cela puisse prendre fin.

La jalousie parasite mes pensées, et tandis que Grayson ignore ma présence, la colère se fait toujours plus forte. Je tente de me raisonner, mais tout cela est peine perdue. Je fais alors la seule chose que je puisse faire pour soulager ma colère, je quitte l’appartement en prenant soin de claquer la porte avec force, ce qui, si j’ai bien entendu, a fait tomber un vase sur le sol et l’a brisé. Je rentre au cabanon en courant, et une fois chez moi, je suis en sueur. Mon souffle est court et je m’écroule sur mon lit. Au plafond, Kit me sourit, ce qui décuple ma colère.

Je respire son odeur qui apaise tous mes tourments. Je frémis de sentir sa peau contre la mienne. Mon cœur semble enfin s’accorder un rythme ordonné tandis qu’il battait au ralenti depuis un mois. La peur et la colère se volatilisent face au bonheur de la sentir contre moi, de retrouver celle qui me possède, face à l’amour qui explose dans mon être. Je savoure chaque seconde, tentant d’enregistrer chaque battement de son cœur, chaque frisson sur sa peau. Je suis heureux, heureux de la retrouver, heureux d’être en vie.