Quand on a débouché sur la route, la cloche de l'église voisine a sonné huit heures. Trois cents mètres plus loin, la cloche d'une autre église a tinté à son tour.
« Voilà pourquoi faut jamais se fier à l’Église », avait-il maugréé [...].
- [...] c'est un des plus beaux endroits au monde, il n'y a rien de pareil en Europe.»
Je referme l'atlas et le glisse sur le tableau de bord. On dirait que ce voyage offre à mon père l'occasion de se prendre pour un guide touristique.
«Surtout pas en Angleterre, continue-t-il. La campagne là-bas est jolie, au début, mais tape-à-l’œil.» Il me regarde en souriant. «Comme une putain, avec trop de rouge à lèvres et de la lingerie bon marché. En plus, tout se ressemble : aucune différence entre Bath et Édimbourg. [...]»
L'océan est d'un bleu grisâtre, chaud et trouble comme l'eau du bain de quelqu'un d'autre. Il n’existe pas de crayon couleur «océan Indien», et je crois comprendre pourquoi.
Il me vient à l’esprit que mon père a passé sa vie entière, du moins toute sa carrière de photographe, à déformer la réalité au lieu de la documenter. Et que son travail s’est davantage attaché à ce qui n’apparaît pas sur les images, plutôt qu’à ce qu’on y montre.