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Critiques de Maurice Corcos (8)
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L'anorexie mentale : Déni et réalités

L’anorexie est une maladie très médiatisée et pourtant mal comprise et souvent caricaturée. Cette maladie exerce indéniablement une fascination sur le grand public, sans doute liée à son côté extrême, mais la plupart des gens ne vont s’attacher à en découvrir que les aspects les plus spectaculaires largement exploités par la fiction, ce qui est mal vécu par les malades eux-mêmes et a, à mon avis, des effets néfastes et contre-productifs. Il est donc intéressant de s’y intéresser de façon plus scientifique et factuelle. L’ouvrage de Maurice Corcos s’inscrit dans cet objectif.



« L’anorexie mentale – déni et réalités » dresse un panorama complet des connaissances sur cette maladie. L’ouvrage va donc dépeindre les symptômes, les données épidémiologiques, les conséquences, les traitements utilisés ainsi que les différents modèles de compréhension développés au cours des recherches. L’ouvrage est très intéressant et très documenté, faisant état des différentes hypothèses de compréhension, des différentes pistes de recherches, avec leurs résultats et leurs limites.



Ce qui est frappant à la lecture de l’ouvrage, et sans doute encore plus pour quelqu’un comme moi qui connait intimement la maladie, c’est que malgré toutes les données existantes, malgré toutes les découvertes sur les aspects génétiques, neurologiques et biologiques, l’anorexie reste encore une énigme, de l’aveu même du corps médical. Les paramètres sociaux, environnementaux, biologiques et génétiques s’imbriquent de façon complexe, rendant la compréhension de la maladie finalement assez incomplète. On parvient à en dessiner les contours, de façon floue, mais on ne touche pas encore au cœur du phénomène. Même moi qui vit la maladie dans ma chair et mon esprit, j’ai cette impression. A force d’introspection et de lectures sur le sujet à dessiner les contours de ma maladie, comme elle dessine les contours de mon corps, mais son cœur me demeure un mystère. Ce mystère fait partie de son étrange séduction, entretient le phénomène de dépendance à la pathologie.



Ce livre est une somme malgré son petit format, faisant état d’un panorama complet des connaissances médicales sur le sujet. Ceci dit, il ne fournira pas de pistes aux malades pour comprendre le cœur même de sa pathologie ni ce qui pourrait l’aider à en sortir. D’ailleurs, cet ouvrage ne s’adresse pas aux malades mais sans doute davantage aux professionnels de santé pour leur permettre d’appréhender cette maladie trop souvent caricaturée. Pour les malades, adultes (je déconseillerais cette lecture aux adolescents, l’évocation des conséquences de la maladie pouvant avoir un effet de renforcement du déni), le livre permet de découvrir les mécanismes concrets, biologiques, neurologiques, à l’œuvre et est donc intéressant mais c’est une lecture que je complèterai par d’autres approches plus spirituelles, philosophiques ainsi que pratiques.

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Abécédaire de l'anorexie

L’auteur est médecin psychiatre, et ceci est un gage d’une compétence sur un trouble qui n’est en rien une maladie. En effet l’anorexie, pathologie de l’alimentation, est avant tout un comportement émotionnel se manifestant généralement à l’adolescence (mais pas toujours).



À travers quatre-vingt entrées, Maurice Corcos permet de mieux approcher l’anorexie dans toutes ses dimensions. Certes il n’existe pas d’anorexique type mais des pistes conséquentes sont fournies là afin que l’entourage du souffrant perçoive plus rapidement quels sont les signes qui doivent permettent de s’interroger sans culpabiliser sur une possible responsabilité propre, puis de réfléchir sur ce qui est dire et ne pas dire à l’adolescent et enfin à l’aider à sortir de son cycle en posant si besoin des règles.



Notons qu’une dizaine de pages sont consacrées à ce qui peut être qualifié de contraire à l’anorexie, à savoir la boulimie. Parmi les autres points développés, on relèvera les questions de l’automutilation, de la jouissance, du déni de séparation, de l’aménorrhée, de l’agressivité, de contes significatifs…



Comme personnage historique souffrant d’anorexie sévère, est présentée Sissi l’impératrice d’Autriche sujette à de nombreuses fictions. On apprend là d’un côté le caractère désastreux de sa nuit de noces qu’elle subit à l’âge de seize ans et les qualificatifs simiesques qu’elle attribuait au dernier tsar et à la dernière impératrice de Russie.

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Qu'est-ce que l'alexithymie ?

L'alexithymie, « incapacité à exprimer ses émotions », est un concept psychologique utilisé désormais tant en neurobiologie qu'en psychanalyse pour définir une pathologie dont la validité clinique est prouvée dans de nombreux troubles somatiques et psychiques, et notamment en corrélation très forte avec les addictions – d'où une grande partie de mon intérêt. Cet essai de psychologie clinique, extrêmement dense, s'adresse à un lectorat de spécialistes, et sa lecture est particulièrement ardue. Il tend à faire pencher la balance de la définition de la pathologie davantage vers son côté psychanalytique voire métapsychologique et philosophique que du côté neurobiologique, ce qui contribue encore plus à la complexité du texte. Enfin, si les cas d'alexithymiques souffrant d'addictions sont souvent cités, il n'y a pas d'analyse spécifique les concernant.

Je retiens de cette lecture un faible nombre de connaissances, hormis des éléments de définition assez clairs, dont certains ont fait l'objet de ma sélection de cit. Deux idées-phares émergent cependant, qui me semblent très importantes :

1. la caractérisation de l'alexithymie comme maladie sociale, liée à la « culture du narcissisme », de la consommation et de la performance : l'alexithymie constitue une stratégie adaptative contre l'anxiété sociale et le stress.

2. le corps constitue dans ce livre l'origine des affects, et ceux-ci, avant même le verbe, fondent le processus de sémiotisation. le défaut au niveau de la perception, de la transmission et de l'élaboration des affects-émotions qui constitue l'alexithymie part donc du corps et, d'un point de vue psychanalytique, a pour origine le « non-échange des émotions mère-enfant » et pour conséquence une certaine « fissure psychosomatique » ainsi que la « mentalisation ».

Dans le dernier chap. intitulé : « Données évolutives et incidences thérapeutiques », les spécificités de la prise en charge psychothérapique de ces patients, comparés aux névrotiques, psychotiques etc. sont établies.
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Qui a peur de la maladie mentale ?

Du Manuel Statistique et Diagnostic des troubles mentaux (DSM), en tant que profane, je ne connaissais que l'anecdote juteuse que, jusqu'à une certaine édition, l'homosexualité y figurait encore comme psychopathologie, jusqu'à ce que les lobbys gays l'en fassent disparaître provoquant une fracture durable de la communauté psychiatrique américaine sur le sujet... J'ignorais même que nous en étions à la 5ème mouture. Cet essai, très dense, mûr d'une solide culture littéraire outre que médicale, dresse un procès implacable contre ce manuel qui s'apprête à révolutionner à la fois la manière d'établir le diagnostic des maladies psychiatriques, et surtout de les soigner. Cette critique révèle les impensés politiques implicites derrière ce « traitement » de la psychose, qui, tout en feignant la neutralité théorique, inscrit au contraire la pseudo-rationnalité néolibérale et surtout les intérêts de l'industrie pharmaceutique au cœur même de la psychiatrie, et en chasse le résidu de rapport discursif et humain entre patient et praticien, hérité à grand-peine d'une tradition psychanalytique en perte de légitimité – en tout cas aux États-Unis. Le Manuel, sur une base statistique essentiellement critiquable, multiplie la liste des pathologies, et par cela, de manière vertigineuse, le nombre de patients, jusqu'à la limite asymptotique où chacun serait un psychotique qui s'ignore et est susceptible de recevoir une béquille chimique ; par le biais d'un croisement de comorbidités basé sur les symptômes uniquement, de manière automatique, jusqu'à la limite asymptotique où la pensée médicale deviendrait superflue, il préconise une ou plusieurs molécules psychoactives pour chaque cas répertorié ; il décrète l'inutilité de la clinique, et notamment de l'anamnèse, et établit par exemple que la durée admissible d'un deuil est de 15 jours, au-delà duquel délai tombe le couperet de la pathologie dépressive ; en prétendant éviter les erreurs de jugement des médecins, il les prive de l'enjeu du contact avec la folie des patients éventuellement angoissant dans ce qu'elle peut avoir de projectif et d'« impliquant » en termes de relations transférentielles ; par sa diffusion même auprès du grand public et ses échos jusque par la publicité télévisuelle, il prône l'auto-diagnostic voire l'auto-médication des troubles mentaux et comportementaux. Enfin, il crée une norme aux implications de contrôle social (par le truchement des assurances maladie) et au potentiel discriminatoire absolument effrayants, surtout par la perspective d'un traitement préventif, sur des postulats biologiques et par anticipation (cf. « risk syndrom for psychosis »), qui n'a pas encore été accepté mais dont la logique du Manuel prépare le terrain.

Par-delà les aspects techniques, c'est donc là une réflexion de style foucaldien sur la folie dans la société néolibérale qui nous est offerte, non pas à partir d'une perspective historique mais, hélas, de la plus stricte actualité. Par cette dénonciation, l'ancienne polémique entre psychanalyse (avec ses méthodes psychothérapiques) vs. psychiatrie médicamenteuse semble déjà d'arrière-garde, cette dernière, après avoir gagné la bataille, se retrouvant elle-même confrontée à un ennemi bien plus redoutable et aguerri.







Table :



- Une pensée sous contrôle



- Une Bible inhumaine



- La mort de la pensée clinique



1. Fini de penser/classer. Voici le classer = penser



2. Vous n'associerez plus mais corrélerez, et enfilerez des comorbidités comme autant de perles sur une personnalité absente



3. Vous n'aurez plus d'histoire(s) puisque c'est la fin de l'histoire... Vous ne douterez plus et gagnerez votre bataille contre le temps... Et donc contre la mort



4. Déculpabilisez-vous... Vous obéirez aux ordres de la machine statistique



5. Réjouissez-vous, vous redeviendrez médecin ! Et qui plus est médecin populaire !



6. Vous préciserez, pour mieux les éliminer, les « zones grises » oubliant de relire Primo Levi



7.Vous participerez à la conquête de nouvelles maladies... comme d'autant de moulins à vent, grâce à la fourniture, clef en main, d'une petite bible et d'une immense pharmacopée



8. Vous deviendrez les nouveaux agents de la régulation sociale



9. Au moins vous aurez réussi à enfin parler anglais et, à défaut d'être devenu américain, vous pourrez enfin le paraître



10. (…) « La dixième raison, c'est qu'il n'y en a que neuf... et pas dix »



11. En fait oui, il y a bien une dixième qui devient donc la onzième. Vous apprendrez à détester certains livres et à sécher le linge.

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Les jardins de Babylone, tome 1 : Vertiges ..

Ouvrage très dense à l'image de ces deux citations finales, en parallèle.

" Je suis mise en pièces par le souvenir.(...) J'ai souvent eu le sentiment que la corde allait se rompre et que je ne serais plus capable de gouverner mes pensées".

Journal de Mary Shelley.

" En moi gronde une ville

Grouille la foule dessaoulée

Ses envies au hachoir

À moi s'agrippent des grappes de tyran

Des archanges aux blanches canines

(...) je voudrais t'aimer comme un seul homme

(...) avoir l'amour en bandoulière."

A.Bashung

Ici se tissent des réflexions sur l'amour oui mais au delà, le vertige de l'amour, à travers des oeuvres variées, théâtre, littérature, cinéma, musique, peinture, sculpture. Un fil passe de l'un à l'autre, il nous embarque dans un questionnement très riche.

Un patchwork, Roméo et Juliette, l'amour/haine, qui a-t-il dans un nom ?le chaos, le plein/ le vide, Mary Shelley, l'amour passion, la haine, Camille Claudel, la souffrance. le fil noue chaques réflexions ouvre d'autres possibilités avec une multitude de références en ricochet.

Colette et Proust, la mère, l'enfant, l'enfance, le temps et l'espace. Une autre vision d'oeuvres magistrales.

La Lolita de Vladimir Nabokov, de la nymphe à la nymphette, la sexualité et le complexe d'Oedipe. Les intervenants sèment, certains plus que d'autres, des réflexions psychanalytiques, pas toujours maîtrisées pour un lecteur non initié, mais avec beaucoup de références pour approfondir.

le point final avec les mots d'Alain Bashung qui clôture ce " Vertige de l'amour" avec force.

Merci beaucoup Masse critique pour cette riche découverte, ces " jardins de Babylone" sont vraiment une collection à suivre.

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De René Magritte à Francis Bacon

On dit que les oeuvres reconnues comme étant les plus belles sont les productions de personnes à l'esprit torturé. La souffrance nous force à lutter et à dériver notre pulsion destructrice de son objet initial vers des activités valorisées socialement (artistiques, intellectuelles, morales). C'est la sublimation. Retranscrire sa souffrance pour la combattre.
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Les jardins de Babylone, tome 1 : Vertiges ..

Avant tout, je remercie Babelio et les éditions l'esprit du temps pour l'envoi de ce livre.

Je dois avouer que j'étais embêtée pour en faire une critique après l'avoir terminé. Je n'ai pas de connaissances particulières en psychologie/psychanalyse et je ne connaissais pas la moitié des oeuvres présentées.

Cette lecture a pourtant été très intéressante. J'ai appris beaucoup de choses et découvert des oeuvres sous des angles auxquels je n'aurais pas forcément pensés. L'analyse de Roméo et Juliette, étant l'oeuvre que je connaissais le mieux, a été assez éclairante en ce qui concerne les thèmes mentionnés. Les apports sur la vie et l'histoire de Mary Shelley en lien avec son écriture de Frankenstein étaient presque fascinants.



Même si certaines parties me semblaient avoir été cherchées un peu trop loin, c'est une lecture que j'aurais envie de recommander.
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Les jardins de Babylone, tome 1 : Vertiges ..

Merci à Masse Critique et aux Éditions L'Esprit du Temps pour l'envoi !

J'étais très curieuse de lire les Vertiges de l'amour même si je n'avais aucune connaissance sur la psychanalyse.

Ces essais ne sont pas tous facile d'accès: j'ai été plusieurs fois perdue et la lecture de l'analyse de Lolita qui a été très fastidieuse. Je n'ai pas toujours réussi à comprendre quel était le fil conducteur d'ailleurs. Je n'ai pas vrailent compris ce qu'était une nympette par exemple.

A l'inverse, je me suis délectée à la lecture de l'analyse de Roméo et Juliette. Grâce a ces textes, j'ai pu aussi découvrir une partie de la vie de Mary Shelley, Colette ou encore Camille Claudel. Même si je n'ai pas pu comprendre l'intégralité des textes, le plus important selon moi est d'avoir pu découvrir ou re-découvrir avec plaisir des oeuvres et des artistes talentueux !

J'ai maintenant envie d'ecouter tous les albums d'Alain Bashung, voir les sculptures de Camille Claudel, visionner Vertigo d'Hitchcok ou encore lire Frankenshtein de Mary Shelley.



Finalement, j'aurai du mal à résumer rout ces textes en quelques lignes, tant il est difficile de résumer l'Amour dans chaque oeuvre.
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