Apprendre la patience. Rester calme, ne pas faire n’importe quoi, parler à n’importe qui ou descendre n’importe où, et par exemple dans l’un de ces gros bourgs que le Transsibérien a fait surgir de terre et qui faufilent le rail comme les boules d’un collier - maisons de bois aux cheminées fumantes, silhouettes qui traversent des jardins soignés, chiens qui aboient derrière des palissades -, il doit renoncer à ces gares isolées, à ces villages faciles à fouiller où il se ferait aisément repérer. Patience Aliocha, patience ! Le jeune homme s’approche de la vitre, son regard passe outre son visage reflété : dehors compacte et ténébreuse, océanique, la forêt sibérienne est là, et s’y enfoncer serait comme pénétrer l’eau noire avec des pierres au fond des poches, et Aliocha veut vivre.