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Critiques de Miaojin Qiu (14)
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Dernières lettres de Montmartre

Voici un livre atypique. Sa noirceur n'a d'égal que la quête d'absolu qui y est renfermée. Je souhaite commencer par la préface signée Hélène Cixous, dont voici un extrait : « Mais j'avais sous les yeux le mince volume de la passion-selon-Zoë, en personne, au moment de la mue. En ce printemps-là, à Paris, Zoë ne pense qu'à écrire, elle nourrit sa ténuité insatiable d'un pêle-mêle de livres. Il arrive que je sois tentée de trier le bon grain de l'ivraie, mais le signifiant est plus fort que tout, l'ivraie et aussi lis vrai, et Zoë avale bien et mal également, dans une de-hiérarchisation que commande le désir. L'amer est aussi son miel. » Très érudite, Hélène Cixous est ici surtout délicate et juste envers cette « brillante chercheuse-fureteuse chinoise qui suivait à la course [s]es séminaires au CIPH (Collège international de philosophie) » et tout comme la traductrice Emmanuelle Péchenart qui éclaire notre lanterne grâce à une note finale, elle entend elle aussi, « saluer Zoë, ultra vivante ».

Une autre remarque préliminaire pour rappeler le caractère éminemment fragmentaire du texte annoncé par un avertissement au lecteur en ces termes : « Si ce livre est publié un jour, les gens qui auront occasion de le lire pourront commencer par n'importe laquelle de lettres qui le constituent. Il n'y a pas de continuité nécessaire entre elles, si ce n'est celle des dates auxquelles elles ont été écrites. »

J'ai, pour ma part, choisi la lecture linéaire. Je vais surprendre en disant qu'on est aussi amené à rire tout au long de cette lecture, comme lorsque dans la septième lettre du 2 mai 1995, en marge du débat télévisé entre Jacques Chirac et Lionel Jospin on lit : « Xu, je suis une artiste, voilà ce à quoi j'aspire, parvenir à l'excellence dans mon art (comme ce que j'ai lu dans les yeux de CHIRAC à la télévision, je suis sûre qu'il a longtemps travaillé ce regard et cette maîtrise du dirigeant, d'ailleurs, c'est probablement depuis son plus jeune âge qu'il ne cesse de tendre intérieurement vers l'objectif qu'il s'est fixé dans la vie). Dans mes réalisations, je vais explorer les profondeurs de l'existence, appréhender l'humain de la vie et la vie, parvenir à les exprimer à travers mes recherches et ma création artistiques. Rien de ce que je réaliserai en dehors de cela n'est important, si une de mes œuvres peut atteindre l'objectif auquel je ne cesse de tendre intérieurement depuis le début de mon cheminement artistique, alors je n'aurais pas vécu en vain. » (p. 76-77) Et plus loin, p. 84-85 « ce sentiment d'une souillure que j'ai vécue de l'intérieur tandis que je m'effondrais, j'espère vraiment pouvoir l'exprimer dans un roman, d'une manière aussi hautement symbolique que Kôbô Abe dans La face d'un autre, ce serait vraiment le couronnement de l'amour que tu m'as porté. »

La narratrice, Zoë, a beau avoir le cœur brisé, sa lucidité et son envie de s'en sortir (ou plutôt « d'y arriver », selon ses propres mots) sont admirables et la lecture de ce livre qui s'apparente aussi à un journal intime offre de belles surprises sur le Paris de 1995 ou les films de Theo Angelopoulos (voire le cinéma en général) pour ne donner que quelques exemples.

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Dernières lettres de Montmartre

Voilà un livre très atypique : il mêle les genres, proposant comme son titre l'indique des lettres, mais qui semblent incluses à certains moments dans un roman. Un roman qui peut aussi s'interpréter comme une auto-fiction.On trouve également des bribes de dossiers. L'auteure brouille les pistes.



Pour l'identité de celle -ou celui, car la limite entre masculin et féminin est bien floue- qui raconte, un vertige aussi pour le lecteur: elle change à plusieurs reprises...Comme pour mieux montrer combien chacun multiplie ses " moi" intimes.



Que reste-t-il, après lecture, de toute cette confusion? Une impression étrange, dérangeante. Surtout quand on apprend que l'auteure s'est suicidée, à vingt-six ans, juste après avoir écrit ce livre. De suicide, il est justement question dans les lettres. " Avec cette décision de me suicider sont venus une lucidité, une clairvoyance , une détermination, un soulagement que je n'ai jamais ressentis auparavant."



Les lettres s'adressent à Xu, une femme que la narratrice aime toujours, mais dont elle est séparée. Les tourments de la passion non partagée sont décrits avec beaucoup d'émotion, les sentiments transcrits souvent poétiquement. Les réflexions métaphysiques m'ont intéressée, sont profondes. Notamment sur la fidélité, le rôle que chacun s'attribue sur terre, les relations compliquées avec les autres.



Mais l'aspect confus, les répétitions d'idées, et le côté excessif, exalté du personnage m'ont gênée. Je ne regrette pas, néanmoins, d'avoir découvert l' auteure, originale et complexe, merci à Babelio et aux éditions Notabilia de m'avoir proposé ce livre.On s'interroge sur ce qu'elle serait devenue, si elle n'avait pas décidé si jeune de tout quitter...
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Dernières lettres de Montmartre

Je remercie Babelio pour cette opération Masse critique privilégiée ainsi que les éditions Notabilia pour leur envoi.



En tant qu'objet, ce livre offre un confort de lecture agréable : couverture sobre et explicite, douceur des pages d'un écru léger, typologie plaisante à l'oeil. Mais bien évidemment, là n'est pas le plus important.



Dernières lettres de Montmartre de la Taïwanaise Qiu Miaojin est un ouvrage étrange et perturbant. Au début, j'ai cru avoir affaire à un roman épistolaire dans lequel l'auteure dévoilait son amour perdu pour la femme adorée, Xu. Mais le doute s'instaure au fil des pages. Qiu Miaojin brise tout concept de narration linéaire et opte pour un parcours syncopé et labyrinthique déroutant. Se définissant comme artiste à la recherche de l'excellence, elle parle du roman qu'elle rédige et l'on finit par comprendre que ce roman, c'est ce qui se construit sous nos yeux, lettres après lettres, alors qu'elle vit à Paris pour suivre un cursus de 3è cycle.



A la confusion littéraire s'ajoute celle des genres. La narratrice s'adresse à la femme qu'elle aime et qui l'a quittée, Xu, repartie à Taipei, laissant son amante à Paris. Parfois la narratrice devient narrateur, je se transforme en il sous le nom de Zoé et renforce le trouble lié à l'identité sexuelle de l'auteure.



Le roman parle pour beaucoup de l'histoire d'amour perdu de la narratrice. Il émane de ses écrits une soif d'absolu et d'idéal qui, vu de l'extérieur, ne peut que conduire à la désillusion, la perte de l'être aimé et à de profondes souffrances. Quand on sait que Qiu Miaojin s'est suicidée peu de temps après avoir rédigé ce roman, le 25 juin 1995, peu après son vingt-sixième anniversaire, chaque date en haut de chaque lettre qui le compose sonne comme un compte à rebours mortifère. le suicide est d'ailleurs très présent dans le corps du texte, tout comme la mort en général.



Qiu Miaojin use de l'introspection et de la philosophie pour définir ses conceptions de l'amour, de la fidélité, de la pureté, ... Ce qui caractérise tous ces concepts, tels qu'elle les considère, tient en un mot: absolu. On sent dans le texte une âme à la fois forte et vulnérable, une flamme qui brûle trop vivement pour le monde tel qu'il est pour ne pas finir par se consumer trop rapidement. Car c'est bien à la réalité qu'elle se heurte et nombre de ses souffrances viennent de ce sentiment d'être exclue par ses aspirations plus élevées, trop hautes pour être tenables.



Qiu Miaojin met beaucoup d'émotions et de poésie dans son écriture (bravo à Emmanuelle Péchenart pour sa traduction et pour sa postface éclairante). Je suis heureuse d'avoir découvert cette auteure, je me suis intéressée à son histoire comme à ses réflexions très argumentées. Cependant, j'ai éprouvé un malaise certain à lire ses Dernières lettres de Montmartre.

Sa pensée et ses sentiments trop exacerbés, les arguments répétés encore et encore à Xu sur la valeur de l'amour qu'elle lui porte et que celle-ci dédaigne, aveugle à sa beauté, ses contradictions dans ses aspirations, tout ceci a fini par peser sur mon esprit. La désespérance qui imprègne le texte est une spirale qui peut vite saper le moral du lecteur, une fois accepté l'aspect fragmentaire et déconstruit du texte.



Une expérience littéraire inédite, d'une réelle beauté et d'une grande force évocatrice mais mûe par une énergie noire et douloureuse. Une deuxième lecture me permettrait certainement de mieux comprendre l'oeuvre... mais pas tout de suite.
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Dernières lettres de Montmartre

Intrigué lors des premiers chapitres par ces écrits épistolaires, relatant des souffrances amoureuses, mon intérêt s'est assez vite émoussé au fil de la lecture. Cet amour homosexuel lesbien me touche beaucoup dans ce qu'il a d'authentique et de passionnel, mais je n'ai jamais réussi à vraiment entrer dans cette intrigue. Je me suis perdu dans les lieux : Paris, Tokyo, Taïwan… , les références culturelles : Angelopoulos, Yourcenar… dont je n'ai pas réussi à faire les liens. La rupture amoureuse de cette jeune fille me touche beaucoup et elle parvient à nous faire ressentir son désarrois admirablement. Je compatis à cette souffrance. Mais j'y ai trouvé beaucoup de longueurs, et le thème récurrent de la rupture sentimentale a fini par me lasser. J'ai fini le livre en diagonale, y cherchant jusqu'au bout quelque chose réveillant mon intérêt. Sans succès !

On apprend que cette jeune auteure, dont c'est un livre posthume, s'est suicidée à 26 ans.
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Dernières lettres de Montmartre

Ce roman est composé de plusieurs lettres écrites par une jeune femme à sa bien aimée. Zoë de son prénom aime Xu corps et âme. Elle raconte cet amour, cette passion, sa fragilité et ses limites " Jamais je n’ai adoré et jamais plus je n’adorerai à ce point qui que ce soit sur terre, aucune vérité ne pourrait être aussi éclatante pour mon corps et mon âme, c’est aussi la clef d’une énigme, et le fait le plus joyeux qui soit jamais advenu dans mon existence. " Cet amour doit être pur, entier, parfait... aux yeux de la narratrice Zoë, seulement elle se rend compte après quelques conquêtes, que sa sexualité colorée d'éternité, est insatisfaite : " Dans les différentes relations que j’ai entretenues, je crois que mon éros, jusqu’à présent, n’a jamais connu la satisfaction. Le fait me saute soudain aux yeux et cela me fait mal, mal, terriblement mal." Zoë aspire à une union entière des êtres, sexuelle et spirituelle. " C’est à cause de mon « insatisfaction »... que Xu, qui avait fait serment de chercher corps et âme à me satisfaire, m’a abandonnée de la façon la plus brutale qui soit, sans s’inquiéter de l’horreur et du désastre où j’allais sombrer..." Cet amour avec Xu et pour Xu a pris fin après trois ans de vie commune. Et c'est toute la tragédie de Zoë qui va donner place à des envies de suicide, de mort.



A savoir, l'auteure est née en mai 1969 à Taiwan et s'est suicidée en juin 1995. Qiu Miaojin a vécu quelques années à Paris pendant lesquelles, elle a suivi les cours au Collège international de philosophie avec l'exceptionnelle Hélène Cixous.



Très troublant ce roman qui déjà interpelle de par sa forme : des lettres, sont elles épistolaires, autobiographiques, romanesques ? Tant de questions qui resteront en suspens. La traductrice nous dit que nous pouvons les lire dans n’importe quel ordre. Pour ma part j'ai suivi le roman de façon linéaire, je ne pouvais faire autrement.



Intense, oser parler de la sexualité sans sa forme aussi complète, exigeante. D'aborder la trahison, le pardon, la souffrance, le suicide ... la mort ... l'Amour et l'abandon. Oser parler du corps et de l'âme, tout cela dans une langue forte, puissante, chargée d'émotions, cause peut être de toutes nos blessures, nos souffrances, notre mal d'être.
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Dernières lettres de Montmartre

Tout d'abord, je remercie Babelio pour cette opération Masse critique privilégiée ainsi que les éditions Notabilia pour leur envoi.

La thématique de ce récit : la narratrice sans nom (tantôt femme ou homme), s'adresse dans une série de lettres à son amante Xu qui l'a quittée. Elle y parle entre autres de son désarroi, de sa vie à Paris, de ses rencontres dans le milieu universitaire, et de sa sexualité.

"Dernières lettres de Montparnasse" est un roman déroutant dans sa construction. Ce dernier fait davantage penser à un récit épistolaire car il est découpé en une série de lettres numérotées, mais l'histoire ne suit pas forcément de fil rouge bien établi. La narration passe du "Je" féminin au masculin. Le thème récurrent de ce livre est l'abandon de la narratrice par la femme aimée et la violence du désespoir qui la submerge. Les mots sont forts, presque dérangeants, surtout lorsque l'on garde en tête que l'auteur mit fin à ses jours à l'âge de vingt-six ans. On est plus dans de l'auto-fiction que dans un véritable roman. L'écriture, quant à elle, est ciselée, élégante, et précise, restituée sans aucun doute par un travail de traduction remarquable. J'ai été touchée par le désespoir de la narratrice. Toutefois, les thématiques et idées redondantes développées par l'auteur, n'ont pas réussi à me captiver sur le plan littéraire. J'ai abordé cet ouvrage davantage comme un témoignage, que comme un objet de pure fiction. Il faut signaler le joli travail de maquette fait autour de ce livre : une couverture sobre, épurée, et un papier doux rendent la lecture de cet ouvrage très agréable.
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Les carnets du crocodile

Impossible d'aller au delà d'une dizaine de page. La traduction qui semble littérale rend la lecture plus que laborieuse...J'abandonne !

Impossible d'aller au delà d'une dizaine de page. La traduction qui semble littérale rend la lecture plus que laborieuse...J'abandonne !
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Dernières lettres de Montmartre

Je vous présente aujourd'hui un livre assez particulier de part sa forme : épistolaire, sans pour autant me faire penser à d'autres fictions du même registre que j'ai pu lire par le passé. Une plume maîtrisée qui contribut à l'originalité et à la singularité de ce texte.



Cet ensemble de lettres s'adressent à une femme nommée Xu dont l'auteur des lettres, Zoë, est amoureuse. Ce livre est très dur à lire car il est principalement question d'un amour à sens unique, ce qui est toujours très douloureux, le tout reste intéressant grâce à la poétique de l'auteur mais je ne recommanderais pas ce livre à quelqu'un qui n'a pas le moral.



De belles réflexions parsèment toutes les lettres, car Zoë, porte un regard assez clair et presque froid sur la vie ce qui peut expliquer son geste, malgré sa volonté de trouver une solution. Une lecture qui n'a pas été toujours plaisante mais toujours très intéressante.
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Dernières lettres de Montmartre

En vingt lettres ou presque, nous découvrons l'histoire d'amour qui a lié la destinataire des missives et leur rédactrice. À la chronique du quotidien se mêlent le récit du passé, le décorticage minutieux de la romance et des critiques artistiques.

À la lecture de ce roman m'est venue à l'esprit la chanson de Gainsbourg "Les amours perdues" et son refrain: Car les amants délaissés ne peuvent oublier. Comme si l’auteur avait voulu écrire sa tristesse pour prolonger encore la relation.

Le fait que ces lettres ne soient pas un échange de correspondance mais une écriture à sens unique donne l'impression de lire un journal intime. Je me suis même parfois perdue, je ne suis pas certaine que la destinataire soit toujours la même personne.

Plus qu’un roman d’amour j’ai lu une histoire de tristesse et de douleur sans que cela provoque un rejet car elle semble universelle et transposable à chacun.

Je remercie Les Éditions Noir sur Blanc et Babelio pour cette lecture
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Dernières lettres de Montmartre

En à peine une vingtaine de lettres, l'auteure - narratrice de ce roman fait vivre sous nos yeux l'enchantement, la destruction, la douleur, l'exaltation d'une passion amoureuse. Elle-lui, prénommé(e) Zoé exprime à la fois ses émotions exacerbées, ses sentiments contradictoire et ses tentatives d'analyse auprès de Xu, sa correspondante, son amoureuse, enfuie à Taipei. Elle dissèque sa passion, ses rencontres amoureuses, ses émois sexuels, sans retenue, sans tabou.

Et quand l'auteure donne la parole à Xu qui à son tour épanche ses sentiments, on a l'impression d'un gigantesque ratage, comme si l'amour de Zoé était trop exigeant, trop passionné, excessif en tout.



Faut-il lire ce livre de façon linéaire et parvenir à la fin annoncée et tragique ? Faut-il aller de l'une à l'autre de ces lettres, comme le suggère la narratrice elle-même ? Quelle importance ? Se laisser porter par les accents douloureux de cette voix, y rencontrer un sourire rare, entendre cet ultime murmure ou ces derniers cris, avant la fin tellement prévisible...



Miaojin Qiu est une auteure qui a marqué la littérature taïwanaise et reste une référence littéraire ainsi que l'expression d'un combat pour la cause LGBTI.

Une intéressante préface d'Hélène Cixous et un commentaire très utile de la traductrice.

Merci à Babelio et à la maison d'édition Notabilia pour cette découverte dans le cadre d'une Masse critique privilégiée.



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Dernières lettres de Montmartre

La thématique: voir la 4 eme de couverture ou les étiquettes attribuées par les lecteurs Babelio: journal intime, tragédie, roman, autobiographie, fiction, roman épistolaire , sexualité introspection, obsessions, suicide , spiritualité, relations amoureuses, amour, films , autofiction, philosophie. Ajoutons suicide de son auteur peu après la dernières lettre écrite. Et bien sur les précédentes critiques donnent une vue plus argumentée et moins sèche.



Je propose pour cette critique de partager quelques thèmes / axes : en aucun cas ils n’ont la prétention d’être définitifs!: juste la perception de Nayac.



Axe 1 : le suicide de son auteur (Zoé dans le roman) après avoir achevé le roman peut soulever un questionnement: l'intérêt du livre et de sa publication ne risque t’ elle pas de s’estomper si le suicide n’avait pas eu lieu? (ou pour le dire autrement, cette fin tragique ne conduit elle pas à négliger le livre). La clef que je vous propose est de laisser ce fait de coté ou plutôt de la considérer comme un révélateur de la véracité, de la puissance des sentiments exprimés par l’auteur (même si elle insiste elle même pour indiquer qu’il s’agit d’un roman… mais qui retrace son amour de Xu).



Axe 2 ( cette apparence structurée et analytique est à prendre non comme une tentative de rationalisation de l’irrationalisable, mais comme un petit écho aux titres et sous titres inclus par la romancière dans son texte): une partie de la popularité de ce roman à sa sortie à Taiwan tenait au caractère inédit d’un roman ayant en thématique un amour lesbien. La aussi questionnement possible: une fois cet élément historique indéniable passé, le roman mérite t il toujours de s’y intéresser? Je vous propose de répondre oui: le mal être d’un amour déçu n’est pas spécifique à un genre.



Ce roman est une introspection violente, acérée, une recherche de lucidité (recherche des fautes commises, regrets des erreurs - “C’est ma faute!, je n’ai pas su m’y prendre”…)… qui n’arrive pas à apporter le moindre soulagement.

Dans son questionnement Zoé entreprend de définir l’amour (soif d'appartenir à d’autres?, échange et don mutuel?,.... ), bribe par bribe, et cette tentative est un des intérêts du roman… très autobiographique.



C’est aussi une complainte : le rejet de Xu, qui considère Zoé (selon Zoé) comme une “calamité, une bête furieuse”, la trahison de Xu, le refus de la rupture, et les espoirs fous associés (“Xu, ce n’est pas que tu ne m’ aimes pas, tu es d’ailleurs incapable de ne pas m’aimer”).



Enfin, ce roman (“un petit territoire de mots” , jolie définition!) est un questionnement sur l’absence de communication au sein d’un couple pourtant passionnel: la lettre (en fait les lettres) vingt révèle en contrepoint les sentiments de Xu… qui apparaissent comme souvent éloignés de ceux pressentis par Zoé malgré son introspection profonde et répétitive.



Une autre caractéristique, est de ne proposer au lecteur aucune description des protagonistes: des portraits par les sentiments, exprimés dans des lettres.



Pour autant, la lecture de ce roman est exigeante, et peut rebuter.

Bien au delà de l’ordre (ou du désordre des lettres) des lettres , il faut parfois plusieurs chapitres avant de comprendre si l’auteur de la lettre en cours est Zoé (l’auteure du roman) ou Xu.

De même l’absence d’intrigue (l’épilogue est connu avant l’ouverture du livre), de rebondissements peuvent désorienter. Pour moi cette absence a été plutôt une aide à “rentrer” dans cette description du mal être amoureux en évitant la “distraction” d’une histoire.

Enfin la répétition, le “ressassement” écrit même la traductrice, de ses refus de la rupture devient excessif vers la moitié du livre, même si l’on prend l’attitude de les considérer comme des formes d'accumulation de l’impression à donner au lecteur. Bref lecture au calme nécessaire sous peine de relégation rapide du livre dans la pile purgatoire: “ à finir plus tard quand j’aurais le courage”...



Tout ce qui précède est très axé sur l’intellect. J’aimerais y ajouter un dernier point plus superficiel (?) dans la mesure où il tient à la “texture” de ce livre. Un papier agréable, une première page intégralement rouge, une couverture réussie : un peu dinosaure à l'ère des tablettes ? ….. Peut être, mais le récent sondage publié par Babelio indique que nombre d’entre nous goûte ce plaisir sensible du livre pris en main!



Si ces perspectives vous “parlent”: alors n’hésitez pas, lisez ce livre (et inversement!)

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Les carnets du crocodile

J'ai arrêté un peu avant la moitié du livre, car je ne veux plus me forcer à aller au bout de chaque lecture.



Je suis mitigée. Il y a des moments que j'ai appréciés, où j'étais emportée par les mots. Mais hélas, beaucoup d'autres, où je n'arrivais pas du tout à m'intéresser à ce que je lisais. Où j'étais ennuyée ou juste indifférente. La curiosité et certains moments m'ont fait insister un peu, mais au final, je n'ai vraiment pas réussi à ressentir pour Laz quelque chose d'assez profond pour rester jusqu'au bout.



Ça reste une œuvre que je conseille, pour celles et ceux qui hésiteraient.
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Dernières lettres de Montmartre

Abandonnée par son amoureuse Xu, rentrée à Taïwan, Zoë lui écrit depuis Paris où elle poursuit ses études. Au fil d’une vingtaine de lettres qui lui reprochent férocement son indifférence, Zoë rappelle à Xu leur histoire commune et évoque sa vie parisienne marquée par de vibrantes découvertes artistiques et littéraires.



Publié en 1996, un an après le suicide de son autrice, Dernières lettres de Montmartre est un récit complexe et ambigu, entre autofiction et roman épistolaire, porté par la voix impulsive d’une narratrice qui ressasse les souvenirs fragmentaires d’une passion dévorante. Zoë, en quête d’absolu aussi bien dans sa quête esthétique qu’en amour, est un personnage déroutant, oscillant entre violence et fragilité, mais dont l’immense force vitale marque profondément. A travers elle, Qiu Miaojin signe une histoire d’amours lesbiennes à la fois sombre et incandescente, qui fouille les mécaniques du désir et de son anéantissement.
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Dernières lettres de Montmartre

Quel meilleur moyen de résumer ce livre si singulier ? Qiu Miajoin, l'autrice de ce texte, en a fait un mélange entre réalité et fiction, correspondance épistolaire et journal intime, en a mélangé l'ordre des lettres, explique qu'elles peuvent être lues de façon aléatoire, ou bien linéaire. Le livre se plaît à nous perdre, à nous jeter dans la confusion, entre le mélange des noms, des genres, les différentes relations amoureuses, entre l'amour et la haine, l'obstination et la résignation. Qiu - aussi appelée Zoë -, échange avec Xu, son grand amour, une jeune femme qui l'a à la fois comblée et trahie, qui semble lui avoir arraché son cœur, son âme. Et c'est à partir de cela qu'elle raconte, sa vie à Paris, exilée loin de chez elle, ses passions intimes ou artistiques, ses voyages, ses amies et amoureuses, son ambition littéraire.



Je ne le cache pas, l'aspect décousu du livre m'a quelque peu perdue. Parfois intense, parfois traînant en longueur, parfois sautant du coq à l'âne, il est tout en rebond, en évocations diverses, en réflexions profondes et en force. L'autrice se livre à vif, s'éviscère presque, se laisse aller à quelques rêveries et états d'âme - en tout cas elle se livre, dans tous les sens du terme. Et en même temps, ce n'est pas tant au lecteur ou à la lectrice, et cela donne parfois l'impression de donner dans le voyeurisme, de lire ce qui ne nous est pas adressé.



Le thème principal, donc, est l'amour. Un amour brisé, un amour profond, parfois dérangeant, probablement "pour la vie" - si l'autrice ne s'était pas suicidée quelques mois après la fin de se livre, ce qui ne manque pas d'être terriblement troublant, tant il y est fait mention au cours des lettres. L'amour entre deux jeunes femmes, un amour immature, cruel, fusionnel, déjà perdu, déjà lointain, déjà abandonné au profit d'un autre amour, plus sensuel, plus viscéral. L'amour lesbien, au milieu des années 90 et dans une culture qui le cache encore beaucoup. L'amour lesbien toujours questionné par les personnes hétérosexuelles, qui en font une phase, une lubie, un détour.



Qiu Miaojin explore aussi l'humain, dans sa beauté et dans ses vices, dans ses contradictions, dans ses absurdités, de même qu'elle s'observe elle-même, dans son parcours, dans ses tourments, dans ses sentiments, dans ses erreurs, dans ses relations. Il est aussi question, donc, de genre, d'orientation sexuelle, de sexe, même. C'est à la fois candide et mature, innocent et déjà désabusé. En milieu de parcours, elle amène même quelque souffle de spiritualité, de valeurs pures et ancestrales, un idéal à atteindre. Entre l'Europe et l'Asie, les mœurs changent, aussi. De même que les langues diffèrent, offrent une autre façon de voir les choses, un autre point de vue, parfois douceur ou rigidité.



Très sensible, à fleur de peau, à la fois brutal et délicat, ce livre, dernier témoignage de l'autrice qui est une sorte d'icône LGBT à Taiwan, dont on ne sait pas tellement où s'arrête l'autobiographie et la fiction, offre un grand moment de bouleversement, celui que peut vivre une jeune fille lesbienne esseulée dans un pays étranger, rêvant de réconforter et d'élever les gens autour d'elle. Avec une excellente préface, très bien écrite, et de nombreux éclaircissements de la traductrice en fin d'ouvrage.
Lien : https://lecombatoculaire.blo..
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