Monika Feth et Antoni Boralynski : Monsieur Toutencouleur
Olivier BARROT, au
jardin des Tuileries, présente le livre de
Monika FETH et Antoni BORALYNSKI, "Monsieur TOUTENCOULEUR", édité chez Actes Sud Junior
Maman avait toujours eu besoin d'écrire. pour "supporter le quotidien", selon sa propre expression. A l'époque, elle le ressentait peut-être encore davantage, parce qu'en plus du quotidien, elle devait supporter mon père.
- On n'est que des fourmis ! On s'affaire, on s'active dans tous les sens, et peu importe si on se fait faucher, parce que toutes les autres continuent à s'affairer, à s'activer sans nous.
- Chut ! fit Merle en me fourrant du pop-corn dans la bouche.
Elle avait raison. Rien dans la vie n'était assuré. Il fallait rire et manger du pop-corn, tant qu'on le pouvait
Elle se faisait l'effet d'une marionnette. Comment arracher les ficelles alors qu'elle avait les mains liées ?
Il ne comprenait pas qu'on puisse parler sans arrêt. La plupart des gens ne distinguaient pas l'accessoire de l'essentiel, vous mitraillaient de mots stupides et médiocres.
« Et qui protégera l'homme de l'homme ? »
Au cours de la réunion matinale, le patron avait évoqué à plusieurs reprises "notre meurtrier". Bert avait beau savoir qu'il s'agissait d'une formule creuse, employée sans réfléchir par quantité de fonctionnaires de police, il s'était retenu de se ruer sur lui.
"Notre meurtrier." Une expression aux accents redoutablement familiers. En revanche, personne n'aurait jamais osé évoquer "nos mortes". De quel côté étaient-ils?
Le visage dans le miroir était celui d'une étrangère. Elle avait un peu peur de cette jeune femme aux yeux tristes et sérieux. Et elle l'enviait. Car cette inconnue était en sécurité dans son monde, de l'autre côté du miroir.
C'était affreux de lire cet article. De savoir qu'il allait déclencher chez les gens ce frisson, mélange d'effroi et de bien-être, qui se produisait lorsqu'on apprenait une mort tragique - parce qu'on était sain et sauf et qu'on se contentait d'en lire le récit. Comme au spectacle, dans une loge. En sécurité. De là-haut, on ne distinguait pas le danger. Tout restait parfaitement ordinaire.
Au moment de repartir, je me retournai une dernière fois. Le drap recouvrait à nouveau le corps nu et sans défense de Caro.
- S'il vous plaît, mettez-lui quelque chose. Elle est tellement frileuse !
L'homme en blouse verte hocha la tête.
Sans objecter que les morts n'avaient plus jamais froid.
Je le pensai de moi-même. Et ce fut bien pire.
" Le monde est décidément un lieu froid et hostile " (Imke)
" Pas de travail sans sueur. L'ordre simplifie la vie. Ne remets pas au lendemain ce que tu peux faire le jour même. On ne récolte qu'ingratitude en ce bas monde. Ce qu'on n'apprend pas jeune, on ne l'apprend jamais. " (Grand père de Georg)