L'aube: c'est toujours le même manège
heures d'étoiles pâlissantes
de lunes songeuses
heures des platanes en méditation
ici et là des chapelets de lueurs
des coude à coude de maisons
leurs tabliers de jardin
noués à la sauvette.
Les grilles, les routes, les trottoirs
semblent grandis dans le silence.
Les sons ne cessent de monter
les volets ouverts résonnent
les arbres bourdonnent d'oiseaux
le bassin gargouille
et tout un concert de vent
bruit dans les feuillages
tandis que claquent des pas
vite effacés par le roulement d'un train
qui file vers une destination inconnue.
( Revue Arpa)
ICI C’EST LA FÊTE…
Ici c’est la fête des tilleuls, des buis verts,
des colverts nichés dans les hautes herbes.
Dès les premières lueurs de l’aube
les abeilles font chanter la glycine.
Tout un blanc de verger tremble.
Le jour est une escale nouvelle.
Le vent est revenu
poussant des jérémiades
comme le chat en rut du voisin
qui affole si bien nos nuits.
A la pointe du jour
dans les champs trempés de lumière
heures ferventes de joie
corneilles chuchotant leurs secrets
vite envolés à la lisière de spins.
L'hiver, le nu, l'oubli.
La pluie coulant à seaux
mène de petits canaux sonores
le long de la terrasse.
Le ciel retient la promeneuse par la manche.
Parfois dans le bois
comme dans un jeu de quilles
de vieux arbres tombent sur les fougères,
apeurant les corbeaux qui abandonnent
leurs cris à travers l'air,
nous laissant une morosité dans le cœur.
Un souffle, un courant d’air
joue avec les rideaux
éveille le jardin assoupi,
une échappée, une respiration
une orangerie de senteurs
nous inonde
se jette à notre cou.
L’air transparent
comme une toile abstraite
cherche à préserver en notre mémoire
son pouvoir de vie.
Des traces glissent
au pas de course :
abandon des étoiles
au petit matin
bruit époumoné
d’un train de passage
bouffonneries de nuages
prenant le frais sur le carreau
tandis que la joie délirante
d’un ciel bleu claque des doigts.
Un jour de plus à aimer.
Est-ce le vent
qui cause à notre oreille?
tambourine à la porte
caresse la chair du jour?
Suivre les rires des enfants
dans le pré d’herbe grandie
quand la vie promène sur les vitres
le profil couronné de l’été
Cette nuit des oreilles attentives
se sont relayées à écouter l’océan
les vagues rivaliser d’ardeur
les éclairs se quereller jusqu’à l’aube
où de grands oiseaux venus prêter leurs cris
martèleront longtemps encore
nos nuits silencieuses.
Heure après heure la nuit :
vol d’étoiles, destin de lune
sur les portées glacées des vagues
se meut un rituel de rouage.