Citations de Nicolas Walzer (18)
Dans le monde musical de la pop, les chansons sont écrites et choisies pour l'artiste par d'autres et sont jouées pour un public hétérogène non pour un public de subculture. Mais dans le rock, il y a une éthique de la propre expression qui implique un lien intime entre la personne et la musique.
L'opinion publique (...) juge les métalleux avant tout comme des délinquants. Elle confond délinquance et déviance, marginalité sociale et subculture marginale.
Ce sont les paroles comme expression poétique ou appel aux armes qui sont le plus important dans le folk ou le style folk rock. Pour la pop, comme style musical, et pour les jingles publicitaires, c'est la mélodie qui compte. Pour le metal, le son en tant que tel -son timbre, son volume, son feeling- est l'essentiel, ce qui le définit comme puissant et lui donne toute sa signification.
La volonté du chanteur est de donner l'impression à l'auditeur qu'il est en contact avec l'enfer et que le bruit qu'il entend provient des ténèbres.
Comme tout mouvement extrême, le black metal attire également une importante portion de désœuvrés intellectuels, de démagogues ou de mythomanes, qui voient dans ce mouvement non pas la musique et l'art, mais une manière d'extraire la part malsaine de leur être.
Leur passion, par son sentiment tribal, induit une tolérance par le partage esthétique qu'elle propose. Autrui est différent car il est heavy métalleux ou death métalleux, mais il appartient tout de même à ma tribu. Je le fréquente dans les festivals metal et après tout, il partage le même type d'émotion esthétique que moi. Il y a des groupes qui nous transportent, le sien est de heavy metal, le mien est de black metal mais la volonté de transcendance est la même. Qu'importe que mon voisin soit noir ou arabe, du moment que du metal lui coule dans les veines, je pourrais toujours parler avec lui. A l'inverse, s'il est comme moi, de la même région, du même village, mais qu'il écoute Madonna, je ne vais rien pouvoir lui dire, rien partager avec lui, hormis des banalités.
Les concerts sont des moments de dépense somptuaire qui équilibrent et amenuisent la violence quotidienne, conséquence du stress ou des tensions interpersonnelles.
Pour le cas d'une musique, il est frappant que les acteurs parlent de leur découverte avant tout en terme physiologique alors que le simple plaisir musical semble secondaire.
La jeunesse d'aujourd'hui qui comporte très peu de satanistes est pourtant largement avide d'imaginaire satanique. Ce Satan culturel est une béquille pour se construire, pour explorer les limites de l'existence. Satan est l'Adversaire qui construit une identité à cette jeunesse, le Diviseur qui la rassemble et l'Accusateur qui lui sert de porte-parole. Au-delà de ces fonctions en apparaît une autre qui les résume toutes: celle de Séducteur. Car celui par qui le scandale arrive est d'autant plus séduisant depuis l'apparition d'une société de masse homogénéisante. (p.176)
Le moment artistique qui particularise cette jeunesse [les métalleux] ne doit pas faire oublier le moment quotidien dans lequel elle n'est justement pas différenciable d'une autre. L'homme d'aujourd'hui est multidimensionnel. (p.186)
Le christianisme est vigoureux dans ce pays [la Pologne], l'attaquer, même symboliquement, provoque de vives réactions au contraire de la France qui ne semble pas choquée par la profanation de tombes chrétiennes. À l'inverse, la moindre inscription sur un édifice juif ou musulman soulève immédiatement un tollé dans les médias, les ministres s'empressent de faire des déclarations officielles... (p.185)
On fait souvent bien plus le Mal en voulant absolument, farouchement, faire le Bien... sans accepter la réalité telle qu'elle est, en la forçant à être ce qu'on voudrait qu'elle soit. (p.184)
Plutôt qu'être contre la religion, les métalleux ont leur propre barrière entre le sacré et le profane. Ils mobilise davantage un sacré de transgression. [...] Ils ont conscience du caractère sérieux du sacré et de sa faculté hygiéniste, d'ordonner la vie. (p.144)
Métalleux et goths apparaissent comme des "rebelles". Mais derrière cette rébellion envers le christianisme se cache en réalité un ressentiment envers la société moderne dans laquelle il est de plus en plus difficile de trouver des repères. (pp.126-127)
Une religion est avant tout en rapport avec une ou plusieurs organisations plus ou moins structurées ou hiérarchisées. Sans cela, on ne peut que parler de religiosité en maniant un terme encore plus flou dans l'esprit du public, que celui de religion. (p.88)
Satan est une force de frappe qui permet à ses adeptes d'acquérir une lisibilité polémique parmi l'offre ésotérique. (p.49)
En affirmant le rôle prépondérant de la liberté individuelle, de l'insoumission face aux dogmes, de la part animale obéissant aux pulsions naturelles de l'être humain, le satanisme laveyen cristallise les goûts de cette époque en s'attaquant aux fondamentaux du christianisme. (p.26)
Dans notre lecture, il n'existe donc pas de satanisme antique, médiéval, moderne ou contemporain, le satanisme apparaît seulement en 1966. Avant cela, régnaient des pratiques qui mélangeaient imaginaire satanique, sorcellerie, culte du diable, paganisme, possession... (p.22)