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Critiques de Pascaline Nolot (418)
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Gris comme le coeur des indifférents

Ce petit roman de Pascaline Nolot est grand par l’émotion qu’il suscite, grand par sa volonté de voir enfin cesser les violences faites aux femmes et grand encore par sa maîtrise et sa construction.

J’ai lu Gris comme le cœur des indifférents en subissant toutes les couleurs indiquées par l’autrice pour chaque chapitre. Du blanc au gris, je suis passé par le noir, le rose, le doré, le rouge, le mauve, le vert sans oublier un chapitre polychrome, pour finir par l’incolore.

Avec un talent d’écriture évident, Pascaline Nolot a su me captiver, m’effrayer devant la violence d’un père qui s’était donné toutes les apparences d’un homme bien. Hélas, il cognait, frappait, meurtrissait son épouse à la moindre colère, allant même jusqu’à la torturer.

Cette fille, nommée Lyra, 15 ans, est assise sur une chaise dans un couloir d’hôpital et sa mémoire travaille. Elle voit sa mère auprès d’elle pendant ces heures d’attente qui sont toujours le lot, la règle difficile à supporter dans ces établissements hospitaliers en manque d’effectifs et de moyens.

Des souvenirs douloureux remontent à la surface et prouvent une fois de plus, une fois de trop, que le pire était évitable. Même sa grand-mère, Grand-Ma, appelée aussi la Générale-Major, ne fait rien sous prétexte qu’elle avait bien déconseillé à sa fille d’épouser cet homme.

Quant aux voisins, bien qu’ils aient toujours tout entendu, ils préfèrent le silence, l’indifférence, surtout ne rien dire. Si sa mère est allée déposer plainte au commissariat, une simple main-courante a suffi. Les négligences, les oublis, les manques de courage se suivent, s’accumulent et l’insupportable, la révoltante liste des victimes des violences masculines ne cesse de s’allonger. 147 femmes ont été tuées par leur mari ou compagnon, en France, en 2022, 122 en 2021…

Jusqu’où faudra-t-il aller pour que ce scandale décide les autorités à agir enfin efficacement ? Pascaline Nolot, avec Gris comme le cœur des indifférents, tire la sonnette d’alarme à son tour. L’an passé, Luc Frémiot avait publié Non-assistance à femmes en danger, un livre que Sevlipp, sur Babelio, m’a fait connaître.

Pascaline Nolot tente de réveiller les consciences à son tour et la lecture de ce roman m’a pris aux tripes. Il faudrait que ce livre connaisse un écho retentissant dès sa sortie en librairie, le 2 mars prochain car les dégâts humains causés par ces violences faites aux femmes touchent aussi les enfants qui ne ressortent jamais indemnes après de tels drames.

Faut-il le préciser ? Cette violence n’est le fait que d’une petite partie de la gent masculine et il est justement important que tous les autres hommes prennent conscience de la gravité des faits pour qu’enfin cessent de tels agissements impardonnables.

Grâce à Babelio et aux éditions ScriNeo que je remercie, j’ai pu lire Gris comme le cœur des indifférents et j’aimerais vraiment que sa lecture permette d’endiguer efficacement ces violences qui ne doivent laisser personne indifférent.


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Rouge

A quoi pensez-vous si je vous dis que dans cette histoire le personnage principal est une adolescente portant une pèlerine à capuche, qu'elle va partir en forêt pour aller chez "grand-mère" et lui apporter une galette, et qu'en chemin elle va rencontrer non pas un mais trois loups ? Très certainement à un célèbre conte de Charles Perrault (ou des frères Grimm, qui en ont également écrit une version). Et vous n'aurez pas tout-à-fait tort...

Cependant, dans cette version-là, ce n'est pas le manteau qui est rouge, mais une partie du corps de l'héroïne, dont la moitié de son visage. Et comme si cela ne suffisait pas à la rendre disgracieuse aux yeux des habitants de son village, elle est également affublée d'une excroissance au-dessus d'un oeil. Ce qui suffit à la désigner comme la fille du démon, avec lequel sa mère aurait forniqué avant de passer à trépas en la mettant au monde. Autant dire que "Rouge" (ou "la cramoisie", son petit surnom) n'est pas vraiment la fille populaire dans son bled reculé. Le divertissement préféré des braves gens du cru : lui jeter toutes sortes de projectiles à la tête en l'agonissant d'insultes à chaque occasion, fêtes religieuses (!) ou célébrations diverses. On s'amuse comme on peut, surtout que la vie n'est pas toujours drôle dans ce coin frappé par une malédiction (toujours par la faute de Rouge et de sa mère, c'est pratique) : chaque jeune fille atteignant l'âge de la puberté doit partir, 7 jours après son premier sang, rejoindre une sorcière surnommée la Grand-mère qui vit au fin fond du Bois sombre, et lui apporter un panier garni. Pour ce voyage elle sera escortée par des loups, chargés de s'assurer qu'elle ne tentera pas de fuir. Et bien sûr aucune d'entre elle n'est jamais revenue...

Arrive le temps du départ pour Rouge, plutôt soulagée de quitter un endroit où presque personne ne lui a jamais témoigné autre chose que de la haine. Enfin si, elle a quand même un ami, Liénor, le beau gars du village qui au grand dam de sa mère passe beaucoup de temps avec la pestiférée. Et puis il y a le père François aussi, le curé du village, qui a tenté de la protéger un peu tout au long de son enfance. Ces deux personnages vont d'ailleurs réserver quelques surprises au lecteur...

La deuxième partie du récit nous fait suivre Rouge dans son périple jusqu'à chez la grand-mère, un parcours semé de rencontres en tout genre, dont un loup pas vraiment conforme à celui du conte que nous connaissons. Et celle de la fameuse grand-mère, assez surprenante également, et dont l'histoire constitue un vrai conte dans le conte. Une personnalité complexe, qui peut paraître détestable, mais qui a suscité en moi une certaine compassion malgré ses pratiques horrifiantes. D'ailleurs, en parlant de personnalités, la plupart des protagonistes ont de multiples facettes, que ce soit Rouge elle-même dont le caractère va s'affirmer en développant des côtés assez sombres, ou Liénor, pas aussi lisse qu'il n'y paraît (ni sa mère d'ailleurs), ou encore le Père François, dont la piété comporte quelques failles...

Je ne vous gâcherai pas le plaisir de la découverte et n'en dirai donc pas plus.



Cette lecture m'a surprise à plus d'un titre, déjà par sa noirceur, qui domine quand même dans presque tout le récit. Je ne m'attendais pas du tout à des personnages aussi cruels, comme ces villageois qui font d'une gamine leur souffre-douleur, ou cet aubergiste, Gauvain, époux de la mère de Rouge, son père potentiel tout de même, et qui ne lui témoignera jamais le moindre intérêt, sinon pour se réjouir de son départ.

Ce roman est classé en littérature jeunesse, je l'ai d'ailleurs lu dans le cadre du comité de lecture Ado dont je fais partie, mais pour moi il s'adresse à un lectorat plutôt averti, je ne le conseillerai pas en-dessous de 14-15 ans. L'écriture est agréable, le vocabulaire parfois un peu désuet mais adapté au contexte, l'histoire aisée à suivre malgré des chapitres "flashbacks" (en italique). Ceux-ci nous permettent de comprendre la genèse de l'histoire. Tout n'est pas complètement noir, on a quand même droit à quelques moments plus joyeux qui permettent de reprendre son souffle. De nombreux thèmes sont abordés, parmi eux la superstition, la différence (à différents niveaux), le narcissisme, l'influence de la religion et de ses représentants, le courage (ou son absence !), la complicité qui peut s'établir avec un animal, etc .

Je suis complètement rentrée dans cette histoire, j'ai souffert pour Rouge, j'ai eu envie d'exhorter Liénor à la soutenir davantage, j'aurai voulu démonter la tête à Gauvain et à une bonne partie des villageois, et j'aurai volontiers coupé les génitoires à quelqu'un d'autre...vous comprendrez pourquoi si vous m'emboîtez le pas pour faire un bout de chemin avec ce "Petit chaperon rouge et noir".
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Gris comme le coeur des indifférents

Un grand merci à Babelio et aux éditions Scrineo...



« Hier, Papa a frappé Maman ». Comme avant-hier peut-être. Demain sûrement... Les jours se suivent ainsi et se ressemblent. Teintant de gris ceux de Lyra. Aux yeux de tous, notamment de cette infirmière qui lui demande comme elle va, elle est certaine qu'elle est devenue la fille de la femme battue. Elle attend impatiemment sa grand-mère, assise sur ces chaises inconfortables, aux côtés de sa mère, elle aussi silencieuse. Seul le message, ponctué de points d'exclamation et lui informant de son retard, arrivera à les faire rire. Car comment oublier les raisons de leur présence dans cet hôpital aux couloirs blancs ? Comment oublier tous les coups portés à maman ? Comment oublier les douleurs, les insultes, les vociférations, la terreur qu'il fait régner au sein de son foyer ? Comment oublier ce père et cet époux qui n'en porte plus que le nom...



« Hier, Papa a frappé Maman. C'était un jour banal... ». Pas de point d'exclamation ou de surprise. Simple constat amer et coutumier. Comme une banalité de ce que Lyra, ses deux frères et sa maman subissent au quotidien. Des coups, des bleus, des cris, des insultes, des larmes... au bon vouloir de ce père qui tyrannise, au gré de ses humeurs, noires la plupart du temps. Cette attente, dans les couloirs de l'hôpital, interminable, sera, pour Lyra, l'occasion de se souvenir. Des coups bien sûr, des mains tendues qu'elle n'a pas su attraper, des rancœurs envers ceux qui savaient mais qui n'ont rien voulu entendre. Avec ses mots, simples mais qui vont droit au but, et son regard d'adolescente, Lyra raconte ce qu'elle vit au quotidien, ce que sa maman subit, ses désillusions et ce sur quoi elle ne peut poser des mots, comme si la réalité, tragique et impensable, lui échappait. Poignant, émouvant et réaliste, ce court roman de Pascaline Nolot, de sa plume incisive et percutante, aborde intelligemment cette violence faite aux femmes, le féminicide, l'indifférence...

Bouleversant...

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Gris comme le coeur des indifférents

J'avais découvert Pascaline Nolot avec un "conte revisité", un peu horrifique : "Rouge". Mais ici, on est dans un tout autre registre, bien plus profond et qui touche à un fléau à dénoncer encore et encore, la maltraitance au sein des familles et les féminicides toujours plus nombreux.

L'auteure a choisi pour biais de le traiter à hauteur d'adolescent, le public ciblé par ce court roman terriblement réaliste. Je trouve ce choix judicieux, parce que c'est justement à l'adolescence qu'on peut encore sensibiliser les filles au phénomème pernicieux de l'emprise, et les garçons à celui de la violence qui commence parfois par des remarques qu'on pense anodines, mais qui vont saper peu à peu les bases d'une relation amoureuse. L'inverse étant valable également, mais le phénomène est quand même plus courant dans le sens femme victime des violences infligées par un homme.



C'est Lyra, 15 ans, qui nous narre la triste histoire de sa famille depuis un couloir d'hôpital. On attend la grand-mère, une femme froide et antipathique dont la seule réaction quand elle a appris que papa avait encore une fois tapé Maman a été : "je lui avais dit de ne pas l'épouser. A présent elle doit assumer". Ca vous résume bien la personne...

Pendant cette longue attente, Lyra se remémore les épisodes qui ont jalonné ces dernières années, certains teintés souvent faussement de couleurs gaies, mais la plupart sombres voire sanglants. Les dix chapitres sont chacun dotés d'un titre reflétant leur couleur, la tonalité des souvenirs qu'ils évoquent. Parfois, un membre du personnel s'arrête pour demander s'il y a besoin d'aide, ou d'écoute, mais Lyra se ferme, préférant rester dans son monde intérieur. Elle pense beaucoup à ses petits frères, des jumeaux qu'elle s'est toujours efforcé de préserver de cette violence omniprésente à la maison. Elle pense aussi aux voisins, qui n'ont pas envie d'être dérangés, qui préfèrent se dire que c'est une simple querelle domestique de plus...

A ce père que le monde voit comme un héros, parce qu'il a un jour secouru quelqu'un de la noyade.

(A ce moment-là de ma lecture je n'ai pu m'empêcher d'établir un parallèle avec un homme bien réel, qui a fait partie de la vie de ma famille pendant de longues années. A sa mort, heureusement prématurée, la foule se pressait dans l'église, pleurant ce médecin dévoué à ses patients, la bonté et la compréhension incarnées à les entendre, qui ne faisait même pas payer les consultations à ceux qui avaient peu de moyens et se rendait au chevet de ses patients à toute heure du jour ou de la nuit. Ces braves gens ignoraient que le même avait fait vivre un enfer à sa famille, et que seule la décence interdisait à certains d'entre nous de manifester du soulagement.)



Pardon pour cet aparté, mais c'était pour souligner le hiatus qui existe bien souvent entre la perception que l'on peut avoir d'une personne et la réalité.



Pascaline Nolot a parfaitement cerné le "problème", et l'expose sans pathos inutile mais avec des mots qui sauront toucher les jeunes (et les moins jeunes aussi, du moins je l'espère). Sa conclusion, glaçante, donne toute la mesure de faits qui ne sont pas des faits divers (clin d'oeil à un autre livre récent sur le même thème), mais qui mettent en jeu des vies humaines, des vies de femmes, le nombre de féminicides étant en augmentation constante. On y trouve aussi des conseils pour celles et ceux qui se retrouveraient confrontés directement ou indirectement à des faits de violence familiale, ainsi que les numéros de téléphones à appeler le cas échéant.

Merci à Babelio, à Scrinéo et surtout à Pascaline Nolot de m'avoir offert ce livre, qui va touver sa place dès la semaine prochaine dans le CDI de mon lycée.
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Éliott et la bibliothèque fabuleuse

Voilà un roman de littérature jeunesse comme je les aime. Original, dynamique, ne prenant pas le lecteur de haut en l'infantilisant, un peu de magie, un héros qui n'en a pas forcément la carrure au premier regard, et la cerise sur le gâteau : les livres sont à l'honneur. J'ai donc, comme vous pouvez l'imaginer, passé un très bon moment avec Eliott et les membres de la BRB.



Après s'être endormi dans la bibliothèque de sa ville, Eliott découvre un univers secret, celui de la BEB. Un chat qui parle, des rats mécaniques, un bibliothécaire agent secret et le voilà plongé dans une aventure rocambolesque et quelque fois très dangereuse. Entre humour, péripéties et tracas de la vie quotidienne, nous plongeons dans un univers étrange et passionnant où les personnages de romans sont secourus, les voleurs de livres appréhendés et les pauvres ouvrages abîmes, conduits à l'hôpital. C'est frais, drôle, original et palpitant.



A cela, s'ajoute Eliott, un petit bonhomme qui adore lire et veut seulement vivre sa petite vie tranquillement. Mais voilà, Eliott est persécuté par Charlie... Le harcèlement à l'école est de moins en moins stigmatisé, surtout en littérature et c'est une très bonne chose. J'ai trouvé ici que la situation était réaliste malheureusement. Les adultes qui ne voient rien (ou ne veulent rien voir), le harceleur qui fait mine d'être un ange, la peur qui s'installe et qui empêche le harcelé de se défendre. Mais l'auteur enclenche un processus avec Eliott, quelque chose de positif. Ses missions avec la BRB lui montre qu'il est plus qu'un enfant martyrisé et qu'il a le pouvoir de changer les choses. La question étant : "Fera-t-il quelque chose ?". Et outre cela, je trouve vraiment très chouette de donner à la littérature ce pouvoir de permettre l'évasion mais aussi de trouver des solutions et ce courage qui nous manque parfois avec cette dose d'inspiration.



Un premier tome très réussi pour moi qui donne franchement envie d'une suite pour voir comment l'auteur pourra développer l'univers de la BRB parce que je suis franchement intriguée.
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Au nom de nos rêves

Un roman choral qui réunit 11 écrivains qui font parler des acteurs ( étudiants ou animateurs) d'une association d'aide aux étudiants en difficulté matérielle qui s'occupent en toute discrétion de l'Association Liens Publics qui fournit des vivres et un lieu pour se rencontrer.

En difficulté car les versements trop insuffisants de leurs parents ou d'une aide publique tardent à arriver ou ne suffit pas à les nourrir, les vêtir correctement.

Le confinement , qui a isolé les étudiants dans leurs chambrettes, a été catastrophique pour les liens sociaux dont ils ont besoin.

Gros souci pour cette association bien utile animée par Espérance ; le propriétaire des lieux veut vendre les locaux.

Nola, jeune étudiante qui a besoin d'aide pour boucler ses fins de mois, voit apparaître le nom de son grand-père en tant que propriétaire. Est-ce bien lui ? Il y a bien longtemps qu'elle ne l'a pas vu. Il a la réputation de ne penser qu' à lui et d'être très radin.

De page en page, d'auteur en auteur ou d'auteure en auteure, nous vivons avec ces jeunes et leur réalité pas toujours rose. Si en plus d'étudier dur et sec, on doit encore se batailler pour son bien-être, c'est bien difficile.

Et pourtant ça existe de telles situations. Les médias nous ont assez sensibilisés pendant le confinement.

Une très belle initiative à laquelle 11 écrivains ont participé en reversant leurs droits d'auteur à Linkee : la première association française de distribution alimentaire aux étudiants.



Merci à Babelio et aux éditions ScriNeo pour m'avoir permis de lire le roman. On peut le nommer " roman " car les onze auteurs ont fourni un travail de coordination pour nous livrer un récit qui a bien un début, une fin, des rebondissements et une suite logique après chaque prise de plume des écrivains.

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Éliott et la bibliothèque fabuleuse

Je remercie chaleureusement Rageot Editeur pour l'envoi, via net galley et en avant-première, de Éliott et la bibliothèque fabuleuse de Pascaline Nolot.

Pour échapper à la terrible Charlie de l’école, Éliott se cache à la bibliothèque. Il ouvre un bon livre et s’endort !

À son réveil, la bibliothèque s’est métamorphosée. Une organisation secrète, l’armée des rats mécaniques, pousse des chariots de livres malades dans les travées sous les ordres d’un chat autoritaire.

Mais le voilà accusé d’espionnage !

Pour ne pas voir sa mémoire effacée, il accepte d’effectuer des missions aussi dangereuses que palpitantes : archiver le Capharnaüm, sauver des personnages abandonnés par leurs auteurs, chasser le Gloutomot…

Éliott et la bibliothèque fabuleuse de Pascaline Nolot est un excellent roman jeunesse qui m'a captivé de la première à la dernière page.

Ce roman parle du harcèlement scolaire, et montre que ce n'est pas parce qu'on en parle à sa maman que tout va s'arranger ! Encore faut-il que celle ci croit son fiston.

Éliott est un jeune garçon très touchant qui pour fuir l'horrible Charlie (qui ressemble à un ange mais n'en n'ai pas un !) se cache dans la bibliothèque... et s'endors ! A son réveil il découvre de drôles de choses..

L'histoire est super bien trouvée, même si j'ai un petit goût de déjà lu car cela me fait penser à l'excellent roman jeunesse Le prisonnier de la bibliothèque de Xavier Armange où un jeune garçon est enfermé dans une bibliothèque durant un week-end et fait, lui, la rencontre d'auteurs célèbres.

Comme c'est un de mes romans jeunesse préférés, il me tardait de découvrir Éliott et la bibliothèque fabuleuse... et je n'ai pas du tout été déçue :)

Pas de célèbres auteurs ici mais un roman jeunesse plus actuel mettant en scène une bibliothèque, des méchants sous la forme de camarades, et des personnages surprenants comme des rats mécaniques et un chat.. chacrément mal luné par moment ;) .

Pascaline Nolot joue avec les mots, pour mon plus grand plaisir de lectrice. Je suis une grande enfant et je me suis régalée avec cette aventure surprenante.

Tout est fait pour plaire aux jeunes lecteurs et je trouve que ça fonctionne très très bien.

Je viens d'avoir un coup de cœur pour ce très joli roman jeunesse qui mérite un énorme cinq étoiles :)
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Rouge

Nous sommes ici sur une libre réécriture du Petit Chaperon Rouge dont les différents éléments feront leur apparition au fil du récit : la forêt, la Grand-Mère, le panier et la galette que les jeunes filles doivent lui apporter, le loup, Chasseur. Et Rouge évidemment, même si ce n’est pas sa grande capuche noire mais sa peau qui est d’écarlate. Une psyché enchantée complète le décor de conte.

En revanche, ce n’est pas une réécriture particulièrement légère.



Le roman s’ouvre sur un exergue signé Charles Perrault : « Rien au monde, après l’espérance, n’est plus trompeur que l’apparence. » Voilà qui résume à merveille ce récit. Rencontre après rencontre, Rouge découvrira que l’apparence n’est pas un indice de ce qui se cache derrière. Une thématique typique des contes : une figure avenante n’est pas forcément synonyme de bien, une physionomie repoussante n’est pas forcément synonyme de mal. Rouge en est l’incarnation même, mais, en dépit de cela, elle se laissera berner à plusieurs reprises. « Ne pas se fier aux apparences » pourrait être la morale de cette histoire et le dernier chapitre – qui m’a bien eue – est là pour enfoncer le clou.

« Rouge » est le qualificatif parfait pour ce roman de meurtres, viols, traîtrise et incendie. Les personnages sont globalement laids : violents, haineux, fourbes, menteurs, superficiels, avides. Et dangereux. A commencer par les hommes qui s’érigent en juges et prennent leur plaisir comme bon leur semble, aveugles à la souffrance qu’ils causent. Les thématiques sont d’actualité : le viol et le consentement, le harcèlement, la pédophilie… La Grand-Mère évoque même la faune qui change à l’instar du climat !



Rouge – la cramoisie, l’écarlate, la rougeaude, l’empourprée… – est victime de la superstition et de l’esprit étroit des paysans (mais l’histoire de la Grand-Mère nous montrera que la situation aurait été de même à la ville). On la croit fille d’un démon, capable d’actes sataniques, et, sans le pacte, voilà longtemps que son corps – à ne toucher sous aucun prétexte – aurait été brûlé ou lapidé. Mauvais coups, injures et humiliations font partie de son quotidien. Elle m’a beaucoup touchée par son courage, son désir d’obtenir coûte que coûte des réponses, son lien avec sa mère jamais connue. Elle qui a longtemps subi, elle s’est malgré tout donné les moyens de survivre en apprenant à lire et à subsister seule. Je ne peux rien en dire évidemment, mais j’ai trouvé son évolution très réussie tout comme l’évocation des sentiments qui l’agitent.



Alternant passé et présent, l’histoire se déroule en moult péripéties et révélations. Les interrogations affluent tant dans l’esprit de Rouge que dans le nôtre, attisées par les indices conférés par les flash-backs. L’on s’inquiète pour elle, ce qu’elle pourrait devenir aussi face aux épreuves qui s’enchaînent. Une seule chose m’a légèrement déçue cependant, un détail que je ne veux pas dévoiler, mais qui concerne la Grand-Mère : disons que je m’attendais à quelque chose d’un peu plus… profond, dirais-je.

L’écriture est magnifiquement soignée, évoquant un texte un peu daté. Le vocabulaire est choisi, peu usuel. La sylve plutôt que la forêt, la chaumine plutôt que la chaumière, la vénusté plutôt que la beauté… Les mots sont des perles délicatement, minutieusement agencées. Je me suis surprise à relire plusieurs passages à haute voix pour en savourer la poésie, la musicalité. En effet, les phrases recèlent fréquemment un rythme et des rimes très agréables à lire et à entendre.



Un texte puissant, aux sujets cruels et actuels. Une belle héroïne. Une langue qui apporte un peu de beauté dans le maelstrom de laideur formé par les événements narrés.
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Rouge

Je ne sais pas trop à quoi je m’attendais mais certainement pas à cela. Et j’en suis ravie ! Ravie et toujours en train de cogiter sur ce que j’ai lu la veille au soir. Sachez que ce roman, à l’instar des dernières publications de Gulf Stream (Moitiés d’âme, Blé Noir, Ce qui coule dans nos veines) est plutôt sombre mais reflète avec brio des préoccupations contemporaines en versant un peu dans l’horreur et beaucoup dans le conte merveilleux. Âmes sensibles s’abstenir donc, tout comme les personnes particulièrement sensibles aux scènes de viol. En dehors de cela, Rouge est une pépite de l’imaginaire et je compte bien vous en convaincre.



Rouge est une jeune fille dont l’enfance a été bercée de mauvais traitements, de moqueries, de rejets, jusqu’à son nom qui fut « vomis » et qui l’affublera toute sa vie durant de sa différence. Une marque cramoisie, du Diable dirons certains, de « pas de chance » diront d’autres, qui défigurent son visage et une partie de son corps. On l’a dit marquée depuis que sa mère, devenue folle pour avoir pactisé avec le Démon, l’a mise au monde. Elle est laide, et elle rappelle constamment à Gauvain, son père, qu’il a été cocufié par le mal. Rien dans son univers n’est joyeux en dehors de la compagnie de Liénor, un jeune homme particulièrement beau qui, au détriment de la vie de sa mère, s’acoquine avec la Cramoisie. Seule condition : pas le droit de toucher l’autre.



Dès le départ l’héroïne est donc martyrisée par la vie dans un village qui ne l’est pas moins, maudit par une sorcière, subsistant difficilement, et devant le tribut de jeunes femmes dès leur premier sang. L’ambiance est lourde, le mont Gris bordé d’une forêt inquiétante où se cache la Grand Mère accompagnée de ses loups. Vous l’avez la référence au Petit Chaperon Rouge ? Ce conte est l’un de ceux qui est le plus réécrit, il y en a eu des dizaines de films, des dizaines d’albums et romans et pourtant c’est celui-ci précisément qui pour moi est l’interprétation la plus juste et la plus sombre du conte de Perrault.



Lorsque Rouge a ses premiers sangs et doit partir tout le monde fête son départ dans une liesse qui lui donne mal au cœur et qui m’a particulièrement dégoûtée. J’étais mal pour elle, pour cette jeune fille qui n’a rien fait à personne et qui se retrouve accusée de tous les maux. « Ne t’avise pas de faire demi-tour » lui lancera son propre père au visage. Et Liénor ? Liénor ne la regardera même pas partir, le visage baissé. Honteux ? Coupable ? Ou juste lâche ? La suite de l’aventure n’est pas plus rose que les premières pages, je dirais même que cela devient beaucoup plus sombre. On rencontre Chasseur, la Grand-Mère, un miroir magique et une histoire de beauté à conserver. On retrouve des créatures qui pourraient être monstrueuses si les humains ne l’étaient pas davantage. En bref on suit Rouge sur son long chemin de croix bordé d’épines, on la suit dans sa vengeance, dans sa douleur, dans sa honte, mais toujours dans son coeur de battante, celui qui veut connaître la vérité pour enfin crier à la face du monde le nom du véritable coupable.



Ce roman est un véritable plaidoyer pour une morale qui n’a jamais été aussi juste : ne vous fiez pas aux apparences. Les gentils ne sont pas toujours les bons, les mauvais ne sont pas toujours exceptionnellement méchants. L’intrigue est menée d’une main de maître – maîtresse devrais-je dire – de bout en bout et je me suis laissée surprendre plus d’une fois, en bien ou en mal. Je ne vous dirais pas que je n’ai pas éprouvé de dégoût. Dégoût pour ce « merci » craché au visage d’une femme après l’avoir violée. Dégoût pour la cruauté sans nom dont font preuve les gens envers ceux qui ne leur ressemblent pas. Et puis il y avait de la rage aussi, beaucoup. Je ne dirais pas non plus que j’ai passé un « bon » moment de lecture, que c’est un roman à mettre entre toutes les mains. Mais ce qui est sûr c’est que Rouge est un roman qui secoue avec une héroïne qui nous ressemble beaucoup.



Certains passages m’ont semblé un peu plus long que d’autre notamment celui de la Grand Mère qui joue à la fois la figure de la « méchante », et la figure du guide lui donnant réponse et questions. Mais le tout est tellement bien écrit. Ce langage soutenu m’aurait presque fait pleurer de joie tellement ça faisait longtemps que je ne l’avais pas lu. Et ça collait tellement bien à l’ambiance que Pascaline Nolot a donné au roman, à mi chemin entre le conte cruel et l’horrifique. A mi chemin entre la morale et son absence. Je tire mon chapeau à tous les synonymes de Rouge : la Cramoisie, la Rougeaude, la rougeoyante, la vermeille, la… A chaque nouveau mot je souriais bêtement.



Enfin, les dernières pages sont à l’image de l’ensemble : surprenantes, défiant la « différence », rappelant de voir au delà des « apparences ». Cela aurait presque mérité qu’on s’y attarde davantage, quoique cela fait aussi le charme de ce personnage que l’on a mécompris…par les mêmes raisons que Rouge fut mécomprise. Alors, s’il y a bien des leçons que donnent ce roman je n’en retiendrai que quelques unes : soyez ouverts. Ouvert aux changements, ouverts aux autres, ouverts à vous-mêmes. Et surtout ne vous détournez pas. Ne vous détournez pas des larmes, des appels au secours, ne vous détournez pas de vous, ne vous détournez pas de ce qui fait de nous des êtres humains quand bien même les animaux le sont souvent plus que nous.



En résumé



Rouge est un coup de cœur magistral à la frontière du conte du Petit Chaperon Rouge magnifiquement et librement adapté, et de préoccupations toutes contemporaines : le consentement, la différence, la féminité, l’apparence… Ce roman est une véritable claque, sombre, cruelle, qui plonge héroïne et lecteur au cœur même du mal pour mieux lui faire apprécier la lumière et les aubes « rouge espérance ».
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Rouge

Rouge est une interprétation très libre du Petit Chaperon Rouge, un conte qui a subi différentes variantes. Il est d’ailleurs intéressant de constater que l’autrice se tourne bien plus vers les origines sombres du conte que vers la version épurée et enfantine que nous connaissons tous. Elle reprend ainsi les grands éléments de l’histoire, en exploite la symbolique première avec un talent qui force l’admiration, avant de se les approprier et de les relier à des thématiques encore, hélas, très actuelles.



Une héroïne malmenée dans un village maudit où la laideur n’est pas là où on le pense…



Alors si avec Rouge, ce sont les paillettes et l’amusement que vous recherchez, vous serez décontenancés, mais pas forcément déçus. Car malgré la dureté des thématiques abordées, le roman se lit tout seul sans jamais nous faire sombrer dans le désespoir. Cela tient au talent de l’autrice qui arrive à trouver un savant équilibre entre dureté, délicatesse, sensibilité et noirceur. À l’inverse de certains romans dans lesquels les drames sont empilés pour créer une émotion qui ne vient jamais, ici, tout ce que vit notre héroïne, Rouge, s’insère dans une trame complexe et parfaitement pensée qui, sous couvert de fiction, met les lecteurs face à la laideur humaine. Et je ne parle pas de cette laideur physique qui sert d’excuse à des villageois pour harceler, persécuter, malmener, violenter, haïr et ostraciser notre héroïne, déjà de toute manière condamnée par sa naissance. Non, j’évoque cette laideur tapie dans les cœurs noircis et dénués de compassion de ces hommes et femmes qui déversent leur bile sur une âme innocente.



On ne peut que s’offusquer et se demander pourquoi Rouge mériterait d’être maltraitée quand elle ne fait de mal à personne et qu’elle subit affronts et injures de villageois malveillants et cruels ? Mais enfermés dans la superstition, qui se confond ici avec la religion, ceux-ci ne doutent guère de leurs bons droits. Après tout, la mère de Rouge n’a-t-elle pas copulé avec le diable, enfantant une progéniture démoniaque marquée physiquement par le sceau du Malin ? Et puis, Rouge ne doit-elle pas payer pour sa mère responsable, selon eux, d’une terrible malédiction : les jeunes filles du hameau doivent ainsi être envoyées à la Grand-Mère quelques jours après leur premier sang, sous peine de terribles représailles.



Le sort que les villageois réservent à Rouge, autant par esprit de vengeance que par pure malveillance et peur de la différence, est difficile à supporter, mais la jeune fille affronte la situation avec beaucoup de courage et d’aplomb. Alors que sa mère, haïe par tous, est morte en couches, et que son supposé père refuse de la reconnaître, Rouge ne se lamente jamais. Elle trouve simplement quelques moments de joie et de bonheur auprès de son meilleur ami Liénor, dont la beauté lui permet quelques libertés, là où la laideur de Rouge la contraint à la soumission et la contrition.



Des personnages intéressants et des révélations permettant d’aborder des thématiques fortes…



Liénor est un personnage qui se révèle intéressant à plusieurs niveaux, notamment par son envie de protéger Rouge tout en contentant une mère hyper protectrice et étouffante. Une tâche ardue et quelque peu irréalisable qui suscitera une certaine incompréhension, voire un jugement peut-être un peu trop lapidaire de la part de Rouge. À travers ce meilleur ami, un peu un négatif de Rouge, l’autrice évoque, entre autres, l’amitié, le courage et la lâcheté, des notions simples en apparence, mais parfois plus compliquées qu’il n’y paraît. Si j’ai, en outre, été surprise par une révélation le concernant, j’avoue néanmoins une certaine frustration quant à ce personnage qui ne me semble pas avoir exprimé son plein potentiel.



Heureusement, aucune frustration pour Rouge qui est un personnage d’une remarquable complexité, dont l’évolution au fil des pages est réelle et probante. Entre la vie dans son hameau, bien que le terme de survie serait plus pertinent, son départ de Malombre pour l’antre de la Grand-Mère, et sa nouvelle existence avec son lot de découvertes, Rouge va connaître bien des tourments et des épreuves. Elle réalisera dans la douleur que beauté et bonté ne sont guère liées, et que la superstition est bien souvent l’excuse parfaite pour s’exonérer de ses propres péchés. À cet égard, j’ai été particulièrement écœurée par une révélation que Rouge espérait depuis longtemps, mais qu’elle n’était pas prête à affronter. Peut-on d’ailleurs l’être un jour ? À force d’être élevée dans cette idée, elle craignait d’être fille du Malin quand elle va se découvrir fille d’un monstre, mais sans corne ni queue fourchue celui-là.



À travers son roman, l’autrice évoque tout un panel de sujets forts : la malveillance, la méchanceté, la cruauté même, mais aussi la pédophilie, le danger des apparences et des faux-semblants, l’acceptation de soi, la manipulation, la trahison, la superstition dans ce qu’elle a de plus délétère, l’hypocrisie religieuse, le tabou et tout le folklore autour des règles, le viol… Je fuis en général cette dernière thématique, mais j’ai trouvé que l’autrice l’abordait avec beaucoup d’intelligence. Elle dénonce, avec force et sans concession, cette tendance odieuse et méprisable consistant à condamner la victime et à justifier le bourreau… Révoltant, mais tellement réaliste, on y voit également le processus poussant un violeur à se dédouaner de son acte pour mieux se considérer comme la vraie et seule victime.



Un roman sombre, mais pourtant captivant, alternant entre présent et passé…



Certaines scènes sont dures à vivre, bien que toujours justifiées par le contexte, et l’on peut parfois avoir l’impression que chaque parcelle de lumière est mouchée avant même qu’elle n’ait eu le temps d’éclairer le visage à moitié rougi de notre héroïne. Pourtant, on se retrouve captivé par le roman, désirant en apprendre plus sur les petits secrets et grands mensonges/illusions des villageois, sur Rouge et cette mère qu’elle n’a jamais connue et qui a fini par sombrer dans la folie…



Son histoire personnelle et familiale dramatique rend la jeune fille très attachante et touchante, d’autant qu’elle possède une vraie aura de combattante. Contrairement à d’autres contes où l’héroïne attend le prince charmant, ici le prince est un couard, et l’héroïne prête à affronter les choses, quitte à devoir souffrir et réaliser que sa vie est basée sur des mensonges. Il y a quelque chose de féministe dans ce conte où les seules personnes qui se démarquent du lot, sont finalement deux femmes, Rouge et la Grand-Mère. Dans une moindre mesure, même la mère de Rouge se révèle plus forte qu’il n’y paraît : son esprit a été brisé par une terrible épreuve, mais elle aura un soubresaut d’amour pour cet enfant tant désiré, mais obtenu dans la souffrance et la mort, et un dernier élan de haine pour le responsable de ses malheurs.



Au-delà du personnage fascinant de Rouge, on alterne avec curiosité et plaisir entre le passé et le présent grâce à des flash-back nous permettant d’entrer dans la tête de différents personnages. On écoute comme un enfant l’histoire de la Grand-Mère, un conte dans un conte offrant de nouveau une réflexion sur la beauté et l’asservissement qu’elle peut engendrer pour ceux qui finissent par exister seulement à travers son prisme. Car l’on peut autant souffrir d’être fort beau que fort laid, comme le découvrira Rouge, avant de peut-être commencer à apprendre à s’accepter. On se prend, tout comme notre héroïne, d’affection pour un loup qui renverse les codes du conte original, et qui se montre bien plus humain que la plupart des hommes du roman, tous ou presque mauvais, perfides, lâches et cruels.



Une écriture poétique et imagée qui s’adapte à merveille à l’ambiance des contes…



Quant à l’écriture de l’autrice, elle m’a complètement séduite. Elle dégage tour à tour force et sensibilité, douceur et cruauté, le tout enrobé d’expressions, d’images et de mots qui nous plongent en un instant dans l’ambiance si particulière des contes d’antan. L’autrice a un vrai don pour les mots et possède cette capacité à nous immerger dans l’esprit des protagonistes, même les plus poisseux. Mais ce qui m’a le plus surprise, c’est la manière dont elle arrive à développer une intrigue sombre qui heurte notre humanité, et à exposer des drames qui s’insinuent dans notre esprit et notre chair, tout en rendant son roman très facile et rapide à lire. Un paradoxe à l’image d’une plume qui joue avec maestria sur les faux-semblants pour nous envoyer en pleine face la laideur qui peut parfois se cacher sous la beauté la plus parfaite, et la magnificence derrière la supposée laideur.



En conclusion, en lisant mon avis, vous devez certainement vous dire que le roman est dur et implacable. Et il serait difficile de le nier, Il est cependant tellement plus que cela. C’est une réécriture intelligente, sombre, complexe et originale d’un célèbre conte, qui offre une multitude de réflexions autour de thèmes variés comme la cruauté humaine, le danger et le piège des apparences et des faux-semblants, les mensonges, la trahison, la superstition et les croyances qui emprisonnent, le viol, l’acceptation de soi… Mais là où l’autrice brille, c’est par la construction de son héroïne et la manière dont elle arrive à nous faire vivre de l’intérieur son évolution et les différents stades émotionnels qu’elle traverse, et ceci, sans jamais tomber dans le pathos. Forçant notre respect et notre admiration par sa résilience, son humanité et son courage, Rouge n’a pas besoin de lumière dans sa vie, même si elle ne ferme pas sa porte aux sentiments ; elle est sa propre lumière. Et c’est peut-être ce message-là qui me permet de classer Rouge parmi les contes qui apportent un réel message d’espoir sur la force de l’esprit, et la possibilité de trouver sa propre liberté même dans l’adversité.
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Éliott et la bibliothèque fabuleuse

Eliott est un garçon de 10 ans qui aime lire. Pour échapper à des camarades de classe qui le harcèlent, il se réfugie à la bibliothèque municipale. Un soir il s'endort de fatigue et ne se réveille qu'après la fermeture. Il découvre alors les secrets de ce lieu qui se métamorphose et se peuple de créatures étranges. Pour échapper à l'effacement de sa mémoire, il doit remplir trois missions.



J'ai passé un excellent moment de lecture à suivre Eliott au milieu de tous ces livres plus ou moins magiques. J'apprécie la fantaisie de l'auteur qui transforme notre regard et nous replonge dans le monde de l'enfance où tout semble possible. Elle nous conte le pouvoir magique des mots. J'ai particulièrement aimé le passage à l'intérieur du livre et les descriptions du paysage de mots et de lignes qui se créaient.

Les épisodes ne sont pas dénués d'humour ce qui est très agréable.

La réalité du monde d'Eliott est également bien traité dans l'ensemble et ses problèmes sonnent justes, hélas. le problème de harcèlement scolaire est au centre de cette histoire et donnera, je l'espère, de l'espoir et quelques solutions aux jeunes qui subissent ce genre de comportement. J'ai juste trouvé la maîtresse un peu trop naïve et incapable de voir ce qui se déroule réellement sous ses yeux. Tous ne sont pas ainsi, pour le coup ce personnage est bien trop caricatural.

Le livre en lui-même est superbement illustré par Antonin Faure.
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Rouge

J’ai eu la très belle surprise de découvrir ce roman en avant-première (il sort officiellement mi-avril) dans ma boite aux lettres en ce début d’année, merci Pascaline ! Je connaissais l’autrice pour ces livresjeunesse, ainsi que pour son roman contemporain Sur l’écorchure de tes mots. Elle propose ici une histoire fantastique bien plus sombre, conte cruel qui nous mène aux cœur d’obscurs superstitions et de tragiques événements.



Rouge est née avec une tache cramoisie qui lui couvre la moitié du visage, ainsi qu’une boursouflure près de la paupière. Sa mère, morte en couches, était folle. Catégorisée comme fille de Satan par les villageois de Malombre, Rouge est maudite, rejetée de tous, et quiconque voudrait la toucher prendrait le risque de se voir transmettre sa malédiction, voire sa pigmentation de peau… Repoussée par son père également, elle dort dans les écuries et subit chaque jour humiliations et violences de la part des villageois.



C’est un personnage très touchant, car elle parvient à continuer à se battre pour vivre, jour après jour, malgré les blessures physiques, mais surtout les coups moraux, qu’elle reçoit. Naïve et innocente, c’est très souvent avec l’énergie du désespoir qu’elle doit combattre les épreuves qu’elle traverse. Sa vie n’est que douleur et elle est condamnée à ne jamais connaitre de marques d’affection. Elle n’a qu’un seul allié : Liénor, un jeune garçon qui n’ose pas la toucher, mais qui apprécie sa compagnie.



Rouge n’est cependant pas la seule malédiction qui plane sur Malombre : depuis la mort de la mère de Rouge, la Grand-Mère, sorcière qui habite le Bois-Sombre, demande un tribut au village. Chaque fille qui saignera pour la première fois devra lui être livrée dans les jours qui suivent. Pourquoi ? Que deviennent ensuite les « bannies » ? Personne ne le sait. Le grand jour arrive pour Rouge, et les villageois la donnent sans remords (voire avec grandes effusions de joie…) aux loups de la magicienne, en espérant que la malédiction qui a commencé avec la mère finisse avec la fille.



Pascaline utilise des éléments qui nous rappellent le Petit Chaperon Rouge : la couleur rouge, le chaperon, le loup, le panier de victuailles, la mère-grand dans une maison au fond des bois… Ces clins d’œil au conte originel sont détournés par l’autrice et cachent des côtés bien sombres. Chaque être rencontré, aussi gentil et serviable qu’il puisse paraitre, cache de bien inquiétants travers. La plus grande leçon de cette histoire est « Ne vous fiez pas aux apparences, elles sont toujours trompeuses » ! On ne peut avoir confiance en personne.



Au travers de flashbacks, souvenirs ou visions, on observe les secrets les mieux gardés des villageois qui ont joué un rôle dans la vie de Rouge. On se rend compte que les personnes qui la traitent de monstre sont celles auxquelles le qualificatif irait le mieux. Les superstitions ont la vie dure à la campagne. Rouge va devoir apprendre qu’on ne peut pas sauver tout le monde, et qu’il faut parfois laisser derrière soi les gens qui s’obstinent dans leurs croyances absurdes.



Les thèmes traités par Pascaline dans ce récit sont essentiels, et tristement d’actualité : le harcèlement moral et physique, la notion de consentement, le viol, la satisfaction de plaisirs égoïstes qui passent par la souffrance des autres… J’y ai trouvé la plume de Pascaline très forte et très juste. Je pense que certaines scènes du livre pourraient choquer ou mettre mal à l’aise les âmes sensibles. Des réflexions sont mises en avant, mais surtout un véritable plaidoyer contre la culture de la culpabilisation des victimes est développé : victimes, vous avez le droit de vous sentir victimes et vous n’êtes pas coupables/responsables des actes odieux commis à votre encontre.



Vengeance, frustration, colère, tristesse, impuissance, dégoût… Un maelstrom d’émotions par lequel Rouge passe et duquel elle devra tenter de sortir pour avancer. Y parviendra-t-elle seulement ou s’y noiera-t-elle ? Nous lecteurs devons également traverser ce bouillonnement de sensations, qui va nous secouer et nous bouleverser tout autant que Rouge. Qu’aurions-nous fait à sa place ?



Ici se pose aussi la question du savoir : est-ce que toute vérité est bonne à entendre ? Rouge veut savoir qui est son père et aura à un moment le choix de savoir ou non ce qui est arrivé à sa mère. Ce choix va changer sa vie, mais aussi risquer de la détruire.



Je dois dire que j’ai beaucoup aimé découvrir le récit de vie de la Grand-Mère sorcière, un personnage honnête bien que cruel, qui met la beauté au-dessus de tout. J’ai aussi été très agréablement surprise par l’épilogue, qui propose un dernier retournement de situation auquel je ne m’attendais pas du tout !



Mon premier coup de cœur de 2020 : une héroïne victime des superstitions qui va se battre pour connaitre la vérité sur son passé et pour survivre, des clins d’œil tout en noirceur au conte du Petit Chaperon Rouge, des thèmes et réflexions importants chargés d’émotions fortes, portés par la plume très juste de Pascaline. Un récit qui secoue sa protagoniste, mais aussi le lecteur. Je recommande grandement !
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Rouge

Vous commencez à connaître mes goûts maintenant et vous savez probablement que je ne suis pas très fan du genre Young Adult. Pourtant, trois autrices font exception dans mes lectures : Nadia Coste (Le Premier), Cindy van Wilder (Les Outrepasseurs ou Memorex) et Pascaline Nolot. C'est la raison pour laquelle j'ai sélectionné Rouge dans la Masse critique Jeunesse et Young Adult de Babélio que je remercie au passage ainsi que les éditions Gulf stream pour l'envoi de ce Service Presse. de Pascaline Nolot, j'avais lu et beaucoup aimé ses deux parutions Jeunesse, aux éditions du Chat noir : Les larmes de l'araignée et Les orphelins du Sommeil. Rouge destiné aux plus de 15 ans est plus sombre mais m'a également beaucoup plu.



Rouge est une jeune fille de treize ans qui tire son nom d'une déformation physique. En effet, la moitié de son corps est recouverte par une tache de naissance cramoisie et elle possède une boursouflure au niveau de l'arcade sourcilière. Les habitants de son village Malombre la rejettent en raison de son apparence qu'ils jugent monstrueux et l'accusent d'être le fruit des relations adultères entre sa mère et un démon. Pire sa génitrice serait à l'origine d'un pacte qui pèse sur le village : lorsqu'une jeune fille a ses premières règles, elle doit quitter Malombre pour rejoindre la Grand Mère qui vit dans les bois. Mais nul ne sait ce qu'il advient d'elles par la suite.

Les villageois sont alors soulagés car Rouge ne devrait pas tarder à les quitter et avec elle, ils ont l'espoir que la malédiction prendra fin. Personne ne la regrettera, sauf peut-être le prêtre François qui l'a protégée pendant son enfance et son unique ami couvé par sa mère mais à la beauté solaire, Liénor.



La réécriture d'un conte...



Rouge est la réécriture du Petit Chaperon Rouge de Charles Perrault et des Frères Grimm : les personnages principaux du conte sont présents comme la petite fille couverte de son chaperon rouge, la Grand-mère, le Chasseur (présent seulement dans la version des Frères Grimm) et le Loup ainsi que quelques éléments de l'intrigue comme la promenade en forêt avec le panier rempli de victuailles pour rejoindre la Grand-mère, dans sa maison isolée. Pascaline Nolot se réapproprie le conte original et en change complètement les paradigmes. Oubliez ce que vous croyez savoir et méfiez-vous des apparences : la grand-mère n'est pas aussi bienveillante que l'on pourrait croire, le chasseur n'est pas le héros que l'on connaît et le loup, pas aussi mauvais qu'il n'y paraît! Seul Rouge conserve son rôle d'héroïne puisque Pascaline Nolot renoue avec les toutes premières versions du conte (Notamment celle d'Egbert de Liège, de puella a Lupellis - La petite fille sauvée des louveteaux) dans lequel le Petit Chaperon Rouge prend son destin en main et se sauve elle-même.



... dur et violent...



Dès les premières pages du livre, le ton est donné puisqu'une femme se fait dévorer vivante par des loups! Et je peux vous dire que je ne m'y attendais pas du tout! Certains passages sont assez difficiles et violents. Cette violence est d'ailleurs symbolisée par l'omniprésence de la couleur rouge que ce soit sur la couverture (le titre, la quatrième de couverture et la gouttière sont de cette couleur) mais aussi dans le texte.



- Rouge est victime de harcèlement moral de la part des villageois et le champ lexical de cette couleur est très développé : ainsi, Rouge est surnommée de « Cramoisie », « la Rougeaude », « L'empourprée », etc... de part, sa tâche de naissance qui lui recouvre la moitié du corps, Rouge est ainsi mise à l'écart du village, insultée, on la dit porteuse d'une malédiction (si on la touche, on risque de devenir rouge comme elle), elle aurait été lynchée plusieurs fois si la jeune fille n'avait pas été sous la « protection » du prêtre François.

- le rouge est également la couleur du sang perdu lors des premières règles (Dans le cadre de la malédiction qui pèse sur le village, chaque jeune fille qui a ses premières règles doit partir et rejoindre la Grand-mère qui habite dans les bois : elles sont donc « punies » et condamnées à l'exil. Cela m'a fait penser que dans certains coins reculés du Népal, certaines femmes doivent quitter leur domicile pendant leur règle car elles sont considérées comme « impures »). Ou la couleur rouge représente aussi le sang versé lors de meurtres rituels (ceci m'a rappelée la Comtesse Elizabeth de Bathory qui au XVIème siècle, en Hongrie, a été tristement célèbre pour avoir séquestré et tué des jeunes filles. Je n'en dirai pas plus pour ne pas spoiler une partie de l'intrigue).

- Enfin, le roman aborde le viol (subi par la mère de Rouge) et d'une tentative de viol sur le Petit Chaperon Rouge. J'aurais l'occasion d'y revenir dans la dernière partie.



... mais qui est au coeur de débats actuels.



Enfin, Pascaline Nolot possède un parti pris très fort et son roman s'en fait l'écho. J'en ai déjà parlé dans ma première partie mais Rouge est un ouvrage féministe :



- Les femmes prennent leur destin en main : Rouge reprend le contrôle de sa vie non seulement en découvrant son passé et celui de sa mère mais aussi grâce à l'éducation par les livres qui lui donnent des connaissances sur les plantes et elle apprend à se défendre seule (par l'apprentissage du tir à l'arc ou de la magie).

- le roman dénonce aussi les violences faites aux femmes et on ne peut pas dire que les hommes aient le bon rôle (d'ailleurs, si je dois faire une seule critique sur ce roman, je regrette qu'il n'y ait pas un seul personnage masculin qui soit positif) : deux sont des violeurs (ils n'admettent d'ailleurs pas qu'ils le sont puisqu'ils rejettent la faute sur les femmes) tandis que les autres sont lâches (L'aubergiste a abandonné sa femme quand elle est tombé malade).

- Enfin, je voulais juste terminer sur une petite phrase glissée à la fin du roman qui n'a l'air de rien comme cela mais qui répond à la polémique débutée par J.K. Rowling  sur la transsexualité et sur le rapport entre sexe et genre.

« L'absence d'épanchement rubis entre ses cuisses ne lui posait point trop souci. Ce n'était pas la physiologie qui définissait une femme... » (p. 311).



En conclusion, j'ai beaucoup aimé le roman Rouge qui est une relecture du conte du Petit Chaperon Rouge. Certes, cette nouvelle version possède quelques scènes difficiles (meurtres, viol, tentative de viol, harcèlement moral, etc...) mais par ce biais, ne dénonce-t'il pas aussi les travers de notre société tout en s'inscrivant dans les débats actuels (féminisme et le mouvement #metoo, la lutte contre le patriarcat et la culture du viol, la transphobie, etc...)? Rouge est un roman fort et engagé que je ne peux que recommander.
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Gris comme le coeur des indifférents

« Cramponnée à son évier, ma mère est devenue si pâle qu'elle semble sur le point de s'effacer. (...) Nous devrions appeler les secours, les pompiers ! Nous ne le ferons pas. C'est la règle ; c'est comme ça. »

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Aujourd'hui, pourtant, Lyra est à l'hôpital avec sa mère. Encore une fois, le père est entré dans une folie furieuse, violente, cette « fureur mal dirigée » dont il est coutumier. En attendant l'arrivée de sa grand-mère, la jeune fille de quinze ans cogite, repense aux dernières années, aux derniers mois, où elle redoutait de trouver en rentrant chez elle sa mère meurtrie, baignant dans son sang.

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Ce récit vise les 13-18 ans, d'après les indications de l'éditeur. J'ai débord déploré un soupçon de mièvrerie, avec l'inévitable amourette à sens unique.

Mais si l'auteur nous endort, c'est sans doute pour mieux nous secouer ensuite...

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Ce court roman est indispensable pour sensibiliser collégiens & lycéens aux violences conjugales - exprimant parfaitement la terreur, la crainte des représailles, l'inertie administrative qui les accompagnent...

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« (...) depuis janvier, 82 féminicides, 82 parties au ciel. Qui se souvient d'elles ? Qui les pleure, à part leur progéniture amputée ? Ce décompte morbide, poignant, que certains jugent vain, sert - je l'espère - à ne pas les effacer alors même qu'on ne les avait ni abritées ni vraiment écoutées. » (p. 92) *

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* Elles sont 109 femmes à avoir perdu la vie sous les coups de leur partenaire, leur conjoint, leur concubin ou leur ex en 2022, d’après le collectif Féminicides par compagnons ou ex.

source : https://lesjours.fr/obsessions/feminicides-2023/ep1-feminicides-2023/

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■ 3919 - Violences Femmes Info

■ 119 - Service National d'Ecoute de l'Enfance en Danger

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Merci à Babelio & Scrineo pour cette MCS.
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Rouge

Rouge comme l’amour, car j’ai apprécié cet ouvrage revisitant le conte du Petit Chaperon Rouge. J’avais entendu du bien de ce livre et, curieuse, j’ai souhaité découvrir cette adaptation sombre, engagée et insolite. Pascaline Nolot fait de nombreux clins d’œil à l’œuvre originelle, reprenant par exemple l’idée de manteau écarlate, mais recouvrant ici la peau de la petite fille, la forêt dangereuse, le loup, le panier de victuailles à ramener, la Grand-Mère et le Chasseur. On notera également d’autres éléments, comme un miroir magique, qui rappellent d’autres contes classiques. Cette réécriture libre n’a cependant rien de beau : ce qu’il arrive à la demoiselle est éprouvant, tandis que les personnages sont généralement laids à l’intérieur, individualistes, violents, haineux et vils. Certes, certains d’entre eux ont un doux visage toutefois, cette histoire prouve bien qu’il ne faut jamais se fier aux apparences…



Rouge de colère. Tel a été mon sentiment face au comportement des habitants de Malombre. Ces derniers vont faire vivre un enfer à Rouge, l’héroïne. Car, dans cette bourgade, les superstitions sont légion : cette tache vermeil qui défigure la jeune fille fait peur. Elle incarne le Malin ! Quiconque la touchera recevra le châtiment divin ! Cette tache de vin va rendre la vie dure à Rouge qui, en plus de vivre à l’écart ou d’être rejetée, va alors se voir subir toute sorte de sévices aussi bien physiques que psychologiques. Pourtant, malgré les humiliations ainsi que les violences quotidiennes, l’adolescente va tout de même se montrer courageuse. Elle reste dotée d’un caractère fort et ose parfois se rebeller, en particulier aux côtés de Liénor, son seul ami (mais qui n’ose pas la toucher non plus). Rouge vit tout de même un véritable vide affectif, d’autant plus que son père la repousse et que sa mère, accusée d’être folle et d’avoir forniqué avec le diable, est morte. C’est dur… On ressent de l’empathie pour elle… Cela n’arrêtera pas l’héroïne qui, après le premier tiers du livre, va devoir quitter son village pour aller dans les bois. Elle en profitera alors pour enquêter sur ses origines, en particulier sur sa génitrice. J’avoue que la demoiselle m’a impressionnée ! Malgré son côté parfois ingénu, elle est très débrouillarde, réfléchie, brave et entière. Les sévices ne l’ont rendue que plus forte.



Alerte Rouge ! Les aventures de cette jeune paria sont immersives. La plume fluide, travaillée et poétique de l’auteure est très agréable. En dépit du quotidien révoltant de Rouge, on se sent bien dans ce conte. On a envie d’en savoir plus, en particulier sur la face cachée des citoyens. Car, en plus de se ranger aux côtés de la bannie, la narration va parfois faire des flash-back en se plaçant du côté des personnages secondaires comme le Père François, le géniteur Gauvain, Liénor, la mère de celui-ci, la Grand-Mère, etc. On se rend alors compte que, le véritable monstre n’est pas cette fille démoniaque, mais plutôt son entourage aux multiples secrets… Les Hommes sont généralement des êtres ignobles, superficiels, égoïstes, dangereux et retors : ils suivent leur plaisir, ignorant la souffrance engendrée, notamment des Femmes qui sont souvent abusées… Certains individus m’ont plus marqué que d’autres, en particulier le prêtre ou la sorcière. Cette dernière est, certes, cruelle comme les autres toutefois, elle demeure une personne lucide, franche et intéressante ! J’ai adoré son rôle dans l’intrigue.



Rouge de honte, car je n’ai pas vu venir toutes les révélations ! Si j’ai saisi les cachoteries de la plupart des habitants, je ne pensais pas que l’épilogue m’offrirait une telle claque ! Quelle chouette surprise ! Pascaline Nolot m’a bien eue. « Rouge » fait partie du PLIB et je compte bien l’ajouter à mes 25 titres sélectionnés ! Cette œuvre a tout a fait sa place car, en plus de proposer un univers fantastique sombre et original, elle aborde une pluie de thématiques actuelles… N’hésitez pas à découvrir les péripéties de cette rougeaude au cœur sincère et vaillant !
Lien : https://lespagesquitournent...
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Rouge

Énorme coup de cœur pour cette magistrale réécriture du Petit Chaperon rouge !



Qui est cette fameuse Rouge ? Quel mystère entoure sa naissance ? Que signifie la tache qui recouvre la moitié de son visage ?

Ma curiosité a été piquée bien avant de commencer la lecture et je n'ai pas été déçue.

Je n'ai pu lâcher ce livre car, outre une écriture vraiment très agréable, l'autrice nous gâte avec de nombreuses révélations et ce jusqu'à la dernière page.

Tous les ingrédients du conte de fées cruel sont réunis et mis au service de cette histoire sombre et passionnante à la symbolique très forte.



À lire sans aucune hésitation !
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Au nom de nos rêves

C’est vrai qu’on passe souvent à côté de gens dont on ne connait rien, dont on ne se doute pas du tout de la tragédie de leur vie, ou tout simplement des grosses difficultés qu’ils rencontrent.

Pour moi, c’était le cas en ce qui concerne les étudiants en situation précaire, ceux dont les parents ont toutes les peines du monde à financer les études et qui doivent impérativement trouver un petit boulot pour s’acheter de quoi manger !



C’est pendant le confinement que leur situation a été révélée, car beaucoup ont perdu leur travail – dans les cafés, dans les boutiques etc.- , et en Belgique, la télévision a relayé leur problème.



Mais c’est surtout avec cet ouvrage, un petit roman narré par 11 voix (et 11 auteurs et auteures), que je me suis vraiment rendu compte de l’énormité de leur cas.

Ces jeunes en détresse (et souvent aussi en détresse psychologique) sont heureux de connaitre l’association « Liens publics » et de bénéficier de son aide. Celle-ci se charge de les ravitailler, mais aussi de les maintenir en contact, de créer des échanges. La solidarité n’est pas un vain mot, ici ! Car pendant le confinement, terrible pour certains d’entre nous, beaucoup d’étudiants isolés et/ou sans le sou ont sombré.

Et puis soudain, le drame : le propriétaire veut vendre leur local. Ces jeunes vont se révéler à eux-mêmes…



Merci à Babelio pour son opération Masse critique privilégiée, j’ai découvert ainsi 11 récits ma foi fort bien écrits, ainsi que l’association Linkee, contre le gaspillage alimentaire et pour la redistribution aux plus démunis, à laquelle les droits d’auteur seront intégralement versés.



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Au nom de nos rêves

Je remercie chaleureusement les éditions Scrinéo et Babelio pour l'envoi, dans le cadre d'une masse critique privilégiée du roman : Au nom de nos rêves.

Nola vit dans une chambre de bonne. Marwan travaille la nuit pour payer ses études. Célian ne sort plus de chez lui depuis le confinement.

Entre angoisse et précarité, leur seul refuge est l’association « Liens publics », un espace de solidarité et d’espoir pour les étudiants. Benjamin et Espérance, les bénévoles, y apportent réconfort, repas et soutien.

Jusqu’au jour où Roger, le propriétaire du local, vend le local. Alors que l’association risque de disparaître, ils décident de se battre ensemble pour la défendre.

Parviendront-ils à sauver ce lieu qui les unit ?

Au nom de nos rêves est un ouvrage collectif écrit par 11 écrivains qui ont décidé de reverser leurs droits d'auteur à Linkee : la première association française de distribution alimentaire aux étudiants.

Je trouve l'initiative excellente surtout vu l'augmentation du coût de la vie. Il est évident que cela devient compliqué pour tous, à commencer par les étudiants qui ont été fort touchés suite à la COVID et continuent à l'être.

Nous découvrons des jeunes gens touchants, qui font face à des difficultés, notamment pour se nourrir.

Heureusement, une association est là pour eux. Son nom : « Liens publics ». Elle encourage l'entraide et surtout apporte solidarité et espoir à des jeunes qui n'en n'ont pas toujours.

Quand l'association risque de ne plus exister car le local va être vendu, les jeunes décident de s'unir pour défendre « Liens publics ».

Nola monte au créneau, elle n'est évidemment pas la seule. La différence avec ses camarades est qu'elle se rend compte qu'elle connaît très bien le propriétaire du local.. Assez pour le faire changer d'avis ?? Pas sur, malheureusement..

Au nom de nos rêves est un roman qui parle de la précarité des étudiants, de l'entraide, de la solidarité, de l'amitié aussi.

Un joli livre écrit à 11 voix et 22 mains, ce qui ma foi ne se sent pas trop. J'ai été surprise car l'ensemble est assez homogène, ils ont réussi à avoir certes chacun leur style mais c'est fluide. On ne se dit pas tiens là c'est pas le même auteur que là !

Je n'ai pas eu de coup de cœur tout en appréciant ma lecture. J'ai passé un bon moment en compagnie de tout ce petit monde.

Une bonne surprise qui mérite quatre étoiles :)
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Rouge

Quelque chose ne tourne pas rond sur les hauteurs du mont Gris. Tandis que la jeune femme qui donne son nom au livre subit les foudres des habitants de Malombre, le hameau miteux semble frappé par une incompréhensible malédiction. Comment tout cela va-t-il finir ?



Rouge est un roman de fantasy sombre qui plonge ses racines dans le terreau des contes de fées – à l’époque ancienne où ils se faisaient volontiers cruels et sans concession pour leurs lecteurs –, auquel il apporte les éclats de la modernité post-metoo.



Servi par un style généreux qui confère une beauté toute baudelairienne à l’horreur (un cadavre sera ainsi décrit comme une « charpie rubis sur son linceul de nacre ») mais qui s’attache aussi à détailler les méandres psychologiques et moraux de ses personnages, baignant dans une ambiance crépusculaire tisonnée par un perpétuel étincellement de colère, mais qui ne s’interdit pas de petites touches de tendresse et d’humour, et aussi éclairée, au bout de la route, par les tremblotantes lueurs de l’espoir, Rouge apparaît comme un livre puissant, un livre nécessaire (qu’il fallait écrire, qu’il fallait publier ; et maintenant, qu’il vous faut lire).



N.B. : à noter également le soin apporté par les éditions Gulfstream à l’objet-livre (on se souvient à cet égard de Moitiés d’Âme d’Anthelme Hauchecorne paru il y a quelques mois avec sa couverture rehaussée de pierreries semi-précieuses et noix de pécan), qui restitue parfaitement l’ambiance véhiculée par le texte.
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Rouge

♨️Chronique♨️



« -Quelle sorte de monstre es-tu donc? »



La monstruosité m’interpelle. Parce qu’elle est multiple, accessoire, aléatoire. Elle peut frapper tout un chacun, mais souvent détermine une personne ou une destinée. Rouge, c’est cette enfant née avec une tache de sang sur le visage. Son histoire est teintée de malignité et de superstition, mais cette marque c’est le signe qu’il fallait à sa communauté pour lui faire subir toutes sortes de brimades ou actes odieux. C’est elle, qu’on a désignée monstrueuse, c’est elle, qui porte le poids du péché, c’est elle, la fille du malin. Même son prénom, Rouge, est une condamnation.

Or, la monstruosité est partout, multiforme, prétexte. Elle peut frapper une victime, pour déculpabiliser le monstre lui-même. Il fait changer de camp, la définition même du mot, en appuyant ses dires sur toutes les structures édifiées du patriarcat. C’est leurs fautes à elles, les femmes, si on frappe, viole, tue. C’est leurs fautes à elles, si le Mal s’insinue en eux. C’est leurs fautes à elles, si les monstres sortent des bois…



« -Tu…Ça Va? Tu tiens le coup? »



Alors Rouge, est-ce que tu tiens le coup? Est-ce que toutes ces horreurs qu’ils te disent, qu’ils te font, qu’ils insinuent, vont t’anéantir ou te rendre plus forte? En plus, la malediction de Malombre plane et la Cérémonie du Premier Sang va accélérer ton destin puisqu’ils rêvent tous de te voir partir avec les loups, rejoindre la Grand-mère, au fond des bois…

Vous avez bien compris, à mon avis, que Rouge, c’est une réécriture du conte Le petit Chaperon Rouge, mais une réécriture sombre, gothique, troublante…J’ai été enchantée par cette reinterpretation féministe et puissante, cette façon de redessiner les ombres et les reflets, de donner corps et pouvoir au Petit chaperon rouge et sa grand-mère, de chasser le doute et de mettre en lumière la vraie monstruosité.



« Je dus vite me rendre à l’évidence et admettre la vérité: je ne pouvais échapper à mon reflet. »



Le miroir est un objet qu’on retrouve très souvent dans les contes. Il en devient magique, puisqu’il raconte des vérités. À l’heure d’aujourd’hui, où l’apparence est obsession, est-ce qu’il ne serait pas nécessaire d’avoir, en nos mains, la psyché Aurègne de Grand-Mere? Est-ce que, plus que l’apparence, la tolérance et le respect vont devenir, enfin, un règne établi? Est-ce qu’il ne serait pas de bon ton, de se délester des préjugés de naguère, pour affronter, avec bienveillance, nos propres reflets?

Je dois me rendre à l’évidence et admettre la vérité: je ne peux pas échapper au coup de cœur. Non seulement parce que c’est captivant, mais plus qu’une histoire au saveurs nostalgiques, les messages très actuels et les intentions qu’elles véhiculent m’ont profondément bouleversée. C’est une héroïne fabuleuse et Rouge, sera ma couleur du jour, comme un soutien sororal, à cet incroyable vent de liberté qui souffle depuis Bois-Sombre…
Lien : https://fairystelphique.word..
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