Ici le temps va à pied, prévient le panneau. De Tautavel au Val de Dagne, il n’y a qu’un pas pour redevenir ce premier homme. C’est ce qu’a recherché l’écrivain Joseph Delteil (1894-1978) qui vécut son enfance à Pieusse, à côté de Limoux. Villar-en-Val, son village natal, lui consacre depuis 1994 un sentier extraordinaire et de1989 à 2012 une fête, la grande Deltheillerie, grâce au poète Philippe Forcioli, Patrick Vialette de l’ONF et Magali Arnaud, maire du village, qui souhaite aménager la maison natale du poète en résidence d’artiste.
Cloué aux poteaux de couleurs, les mots de Delteil se croquent comme les mûres sauvages et les prunelliers qui bordent le chemin.
Franchir la frontière cathare
Nous voulons vous parler d’un pays qui n’est qu’un accent de rocailles, une inspiration de vent, une fête d’illusions, un florilège de lumières et des vagues vertes de collines arrêtées par le soleil. Habité par à peine 10 000 âmes, ce quadrilatère complexe de 2000 km2 repré- sente un bon tiers du département de l’Aude et une frange des Pyrénées-Orientales. Il est encadré par le fleuve Aude à l’ouest, l’autoroute A61 au nord, la Méditerranée à l’est et le fleuve Agly au sud.
La balade d’un Indien mort
Manhattan,
D’abord une image en noir et blanc.
Il a neigé depuis des cris d’oiseaux suffoquant.
Verrezano Bridge, je m’assois sur ton même banc,
Des fumées clapotantes envahissent le park.
Il tombe des taxis trop secs le long de mon bras.
Time Square, la grande parade de la godasse,
Mille bruits érigent une tempête
Sur des regards mûrs de n’avoir jamais écouté ;
Et la foule oscille à se faire faucher
De Wall Street à Harlem.
Plus de trois siècles d’incertitude ;
La grande peau de l’Hudson River
Qui ronronne et se déchire.
À son doigt l’anneau de la liberté,
Pris au piège,
Comme les ferries, les paquebots migrateurs.
Ne reste que la poussière des conquêtes
Perdues dans la masse des panneaux indicateurs,
Des murs en briques, des escaliers de secours,
Au pied des blocs sombres et carrés où des détritus S’épanouissent de partout comme un appel hurlant.
Trop de portables pour s’appeler vraiment.
Les trains de nuit
Qui pourra me dire
Cette pureté qui nous ensevelissait ?
Qui connaît le pourquoi des gestes ?
Qui connaît la fuite inébranlable des choses ?
J’ai accompagné la meute des trains de nuit
Qui jappent au souvenir des lunes rousses.
En prononçant l’espace de ton nom,
Ils déchirent la lumière, transpercent mon image.
Nous cherchons des murs à tagger. Nous avons vingt ans. Dans un an déjà, nous serons vieux. Nous sommes bien plus hauts que la réalité même pour les mieux ancrés.
Nous sommes de la vieille clameur hostile. Des débutants sombres au profil de l’oubli, chaque nuit nous défaisons et refaisons les ruines de notre éducation.
Dans la haute vallée
Rien n’est encore oublié
Serment honneur repaire
Transportent leur cortège de guerre
Deux chevaliers chevauchent
Sur leurs chemins de vent
Chabert de Barbaira reproche
À Olivier de Termes le sang
Bientôt tous les faydits sortiront du maquis
Pour vous suivre en bataille
Bientôt mille chevaliers
Tous piaffant de vaillance
Ranimeront la cause
Ils n’ont plus rien à perdre
Ils fendront les armures
Ébrècheront remparts
Lanceront mors et dards
Noms sanglants sous l’azur
À votre cœur vicomte
Nous planterons grande joie
À votre cœur vicomte
l’allégresse et l’honneur
Frotte, aiguise et lustre, mon ami
Ton épée, ton écu et ton heaume
Entends au loin venir l’ombre
Serre, embrasse et chante ta mie
Avant qu’ils ne t’assiègent en nombre
Combien de chevaux, de harnais, d’armures
Pour encercler Minerve ses hauts murs
Au-delà des gorges la réponse
Chemine parmi catapultes et pierrières
Elle a pour nom Malvoisine
L'étang de Marseillette est aujourd'hui le domaine de la pisciculture avec une trentaine de bassins de poissons d'ornements. C'est surtout devenu une vaste rizière. Mais l'heure flâne. Les ciels s'empourprent. Voici poindre la tour de la belle demeure de Laurent Malis.