Philippe Blanchon

Où nous en sommes ? Plutôt : où nous devrions être.
Considérer la littérature aujourd’hui devrait être :
considérer et le poème et le roman,
considérer qu’ils s’engendrent depuis plus d’un siècle
(bientôt deux)
que ce qui s’est fait de significatif dans l’ignorance de
[l’autre
est plutôt une exception (française).
Que la littérature va vers, creusant simultanément
les différences de l’un et de l’autre pour se rejoindre
du chœur aux solistes et réciproquement
puisque techniques distinctes se nourrissant
l’une l’autre (d’où nous partons).

extrait 2



                                              Céladon, mousse, prairie,
imprial, de la rivière à la mer, aux mers, Alysse,
attendant Ulysse, le devançant, la brune, la blanche,
sur le dos d'un cheval. Lui-même avec ou sans bois,
fardeau, porté et porteur, porteur d'eau que la nuit
fait reculer. Marée et champs musiciens, perles
égrainées - rire en bourgeon. (Cité faisant verser
l'empire, capitaines au loin, se tenant.)...

Le poème n’a qu’un désir
Celui d’être en un instant
Le vent poussant le devenir

revoir les nuits
soucieuses seulement
de leurs exactitudes
et de leurs répulsions
le jour n'est point
sans en rappeler les silences
et les cordes sur les murs

***

cette déchirure
te donne la distance
et l'évaluation exactes
du dialogue des étoiles
au ciel enfin présent

"Je me demande si je dois parler des choses dont je ne me souviens pas comme de celles dont je me souviens."

un morceau de mer
divers bâtiments :
la lumière qui l’a frappé à la sortie de la gare
est là plus intense
l’étonnant que cela soit possible

Du sable sur les quais. Les chevaux sous les ormes.
Ânesses, ânons. Le regard – le dos long des brunes
et la rose des filles clandestines ; ainsi leurs fils… Sur
la plage, les voies – les paires. Trèfles entre les dalles
en mesure, sonnent, ceux-là résonnent dans un calice
qui repart déjà vers d’autre mers ; loin la mort et pères
de leurs pères voient courbes et flots, arcs et marées,
cheveux déliés et les franges. Mignonnes bientôt
ne se fanent et les vents jamais ne cessent en fracas
en brise, verre absent, en volées fuguent les graines.

extrait 1


Les corps parcourus ont traversé vers un jour
se prolongent au ras de la mer : bleuet, cobald,
indigo, nuit, roi, minuit, horizon, pervenche, corail,
garance, cardinal, grenat, pourpre, amarante, cuivre,
argile, tourterelle, ardoise, perle, argent, céladon ;
tourterelle, ciel qui s'étire et se ramasse, perce et
bouche, purge et nourrit - Fleurs métaux après
les verts bus depuis l'enfance. Et de quoi a-t-on
accusé les capitaines indigents qui autrefois ont
déchargé les navires avant les postes sans prestige
avant l'astreinte à terre ?
…

Dans le rectangle qui se meut
avec une douceur qui le surprend
comme la fraîcheur de l’air
conditionné
Quentin est assis et voit les façades
les platanes s’éloigner.

Il est de ces retours, qui touchant l’absolu,
Font désirer la mort ou quelques attributs

Comme elle ne sourit pas
ses yeux semblent avoir été doux
semblent pouvoir l’être
mais leur clarté et leur grandeur
(étonnantes)
semblent t’aspirer…

Agir c'est aller au devant
de la fraîcheur
de l'amandier de l'abricotier
au tronc noir brillant de la nuit
fraîche qui accepte la mort
de Jan que Jacques agit
dans ce froid. Mary sommeille
elle seule est avec Jan
Jan n'appartient qu'à Mary
il ne sera le témoin de Jacques
comme depuis leur jeunesse
débardée depuis (… sans crainte
de l'emphase) mais la fraîcheur
a sur les nerfs de ces effets
emphatiques qui marquent
autant la lutte contre la nature
qu'une réalité autre.
La fraîcheur – pause accordée
au rêve – relance la machinerie
Jan peut s'éloigner Jacques
seul ni n'observe ni ne sera
plus observé – Lutte autre
la fraîcheur promet un autre
pour le passage. Jan : que
dire de ses secrets ne fut
que secret un visage des mains
tremblant ses paroles un visage
ses silences – Florence lui
pardonna le mal fait à Mary
voyant Jacques en frère de Jan.
La fraîcheur appelle à l'action
retour en soi pour la nuit –.