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3.19/5 (sur 8 notes)

Nationalité : France
Né(e) le : 20/02/1960
Biographie :

Avant d'être auteur, Pierre Crevoisier a été enseignant, journaliste, marin, architecte en information et créateur d'entreprise. Après une formation en psychopédagogie à l'Université de Fribourg, il passe rapidement au journalisme, du côté des médias audiovisuels: la radio, une agence de reportages, la télévision. En 1998, il entame un long voyage en mer, retourne sur les bancs de l'Université de Genève pour une nouvelle formation en éducation et technologies et change de métier. Il est engagé à l'Ecole Polytechnique de Lausanne. En 2009, il lance une start-up avant de revenir au journalisme, à la Radio Télévision Suisse. Il vit à Lausanne.

"Elle portait un manteau rouge" est son premier roman.

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Citations et extraits (7) Ajouter une citation
J'ai touché sa bouche. La mienne ne sera plus jamais la même après cette empreinte. C'était hier soir en été et la marque me brûle encore comme un fer incandescent. Elle penche la tête, mes lèvres se rapprochent, il y a les lumières au loin, leurs reflets sur le lac, la ville en murmure, tout cela en perspective derrière la courbe du menton, un vent léger, la focale de ma caméra intime, élargie pour tout saisir, pour tout capter, la distance, vertigineuse encore de plus en plus infime, sa lèvre inférieure se détache, éclôt délicatement, elle ferme les paupières, attentive toutefois au moindre déplacement des sens, donne le rythme, c'est elle qui dicte l'approche, sans mot dire, les mots n'ont plus leur place, je perçois son souffle, maintenant, l'haleine et l'odeur, cet instant de la perception où tout pourrait s'arrêter, se briser net si le nez refuse, mais il se tait, le nez, il hume, se fond, s'immerge, puis mes lèvres effleurent, se retirent, se rétractent à l'instant précis de la rencontre avec sa supérieure à elle, attendent une invite à poursuivre, alors le souffle s'interrompt, la ville se tait derrière, jusqu'à ce qu'elle imprime ce mouvement à l'ourlet et vienne placer, emboiter justement, la fine courbe à l'orée de ma bouche. Je ne vais pas plus loin. J'aimerais que cet instant s'arrête, que la vie elle-même s'achève à cette seconde, mes deux lèvres parcourant la surface humide de la sienne, enserrant la chair sensible, suçant, timidement d'abord, avant la morsure, la langue impatiente interdite de séjour sur ce territoire délicat.
Ni l'un ni l'autre n'a interrompu ce premier baiser avant un temps incommensurable ni n'a cherché à franchir d'autres frontières de nos intimités. Ce moment-là révélait tout et nous l'avons su immédiatement. Une fulgurance. Aucune parole n'a d'ailleurs été nécessaire après, longtemps après, lorsque la nuit a englouti toute chose alentour, nous laissant seuls avec la sensation d'avoir touché l'univers.
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Elle mesure chacun de ses gestes, s'approche du lit, choisit le côté du père, à droite, il est tourné en direction de la fenêtre, elle le distingue malgré le noir, exercée par tant de veilles à attendre et explorer la nuit. Il faudrait qu'il se retourne d’un quart de tour, afin qu'elle puisse atteindre aisément sa cible. Elle attend, se tapit dans la nuit, arrête de respirer un moment, ferme les yeux de toutes ses forces, lui ordonne de bouger, et il le fait, après un ronflement sonore, il le fait lentement, bascule sur le dos, place maintenant sa façade devant, comme elle le souhaitait. Avec une extrême lenteur, Agata soulève le drap, le glisse vers le bas, découvre petit-à-petit l'épaule, le torse, le ventre, la hanche, la cuisse et le sexe. Il est là, morceau de viande flasque, plus sinistre encore que dans son imagination. À quoi s’était-elle attendu ? Un truc dressé dans la nuit, suffisamment présent pour qu'elle puisse en distinguer la forme et les composants, à l'image des schémas des cours d'éducation sexuelle où l'anatomie, à défaut de poésie, a au moins le mérite d'être claire, accessible, distincte, pas comme ce machin flasque et difforme. Elle en lâche presque son couteau, respire un coup, perçoit même l'odeur âcre du pénis en sommeil. Elle se retourne et quitte la chambre. Elle se dit qu'il n'est pas facile de couper des couilles.
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La porte s'ouvre sur le vide. Je le sais avant de franchir le seuil. C'est la première fois que je mets les pieds chez mon frère en son absence. J'hésite sur le pas de porte, attends indéfiniment qu'une voix me dise, de l'intérieur, d'entrer, de faire comme chez moi, j'en ai pour deux secondes, j'arrive, sers-toi un café, tu connais la maison, le sucre se trouve sur l'étagère ─ il sait pourtant que je ne prends pas de sucre, mais il le répète comme chaque fois ─ c'est vrai tu ne prends pas de sucre, j'ai laissé un article pour toi sur la table de la cuisine, une voix, sa voix profonde, pour me dire n'importe quoi, mais une voix, pas ce silence insupportable. Rien ne se passe. Cette fois, l'absence est définitive. Mon frère Jacques est mort. La nouvelle m'est arrivée hier matin. Il y avait un flic derrière ma porte.
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Un venteur de moi. "Armand était un inventeur. Lorsqu'il l'exprimait ainsi, il aimait à insister sur la manière dont il articulait le mot, l'intonation employée pour prononcer chaque syllabe, fermant légèrement l'arrière de la voûte palatine pour le "in", qui devenait "un", le souffle donné au "ven", la lèvre inférieure à juste distance des incisives supérieures, avec l'air débouchant en trombe dans l'espace bucal pour conférer au son un vibrato plein et sonore. Puis venait la dernière, le "teur", presque sans importance, comme il aurait dit "moteur", pas trop fort, pas pétaradant, un cylindre doux, avec un "r" de terminaison qui roulait sur la fin en s'éloignant. En fait, si l'on écoutait attentivement le mot entier, on aurait entendu "un venteur".
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L'homme sans nez. "(...) Il ne s'arrête pas réellement, il se suspend, son corps part en vague, le haut se penche, le genou en fléchissement, la hanche s'articule, le bras tendu, la main ouverte, jusqu'à saisir une fleur, blanche, minuscule. Je la devine sans la voir. Plus précisément, c'est la présence des autres fleurs, la centaine d'autres qui éclate alentour, qui me dit que c'est l'une d'elles qu'il approche. J'aperçois le double geste, coordonné, précis, de la main et de la tête, l'une avançant vers l'autre, l'autre se rapprochant de l'une, le nez à la convergence des deux. Il y a une telle délicatesse dans l'approche que le temps s'interrompt, même le vent dans les arbres ne dit plus rien (...)".
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L'homme sans nez. "(...) Je cherche des yeux l'homme de tout-à-l’heure. Le cuisinier sans nez a disparu sous les arbres. De l’endroit où je suis, je n’aperçois que les clairs-obscurs du parc après la pluie. Je me lève, traverse le premier jardin. Les mille parfums de fleurs ont envahit le printemps. Passé les premières frondaisons, il est là, assis sur un banc de bois, le regard vertical, la tête en arrière, les yeux grands ouverts, les jambes sont tendues, les bras à la perpendiculaire du corps, elles embrassent le dossier du siège, tant qu’il donne l’impression d’être suspendu, tel un crucifié.

Je m’approche sans bruit.

- Vous aimez regarder sous les jupes des arbres? (...)"
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De ses amours passées, elle n'entretenait aucune amertume, sinon la certitude que les hommes se classaient en deux catégories, les salauds et les minables, et qu'elle devait savoir jouer finement avec eux.
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