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Citation de enkidu_


A l’inverse de l’âme croyante qui se définit par la présence de Dieu en elle comme sa propre affirmation, l’âme de Sade, cachant son exaspération foncière sous une conscience athée, se définit de prime abord comme sa propre négation. Il s’agit pour cette âme d’oublier sa blessure secrète, ce à quoi elle ne parvient qu’en aliénant Dieu, son Créateur et Juge ; car Dieu, comme l’image de la vierge, est le rappel douloureux de la virilité maudite. Elle se détourne donc de l’éternel, de son fond divin, pour se livrer tout endère à la rêverie, à une contemplation rêveuse du temps qui raine les êtres et les choses, dans l’espoir de l’oubli et de ia destruction de son souvenir essentiel. Ainsi la conscience athée née de l’âme blessée de Sade cherche à en renier l’immortalité avec l’existence de Dieu, tout en obéissant au chagrin de cette âme reniée. Cette conscience, en étouffant le remords pour obtenir l’oubli, voudra déprécier purement et simplement ce que l’âme aura vécu antérieurement ; et, dans le mouvement de sa rêverie, elle s’imaginera être libre, en recommençant à projeter un acte (déjà projeté, voire accompli jadis), dont il ne reste en apparence nulle trace en elle ; alors qu’en réalité, si elle recommence à le projeter et croit le pouvoir recommencer impunément (à l’instar du personnage fictif qu’elle conçoit à cette fin)31, c’est que l’acte antérieur n’ayant pas été sanctionné moralement, exige d’être agi une nouvelle fois, l’âme ayant un besoin secret mais absolu, d’avoir commis cet acte et ne pouvant en avoir l’acquit de conscience qu’en en ayant assumé la responsabilité ; tant et si bien qu’à se proclamer irresponsable par l’organe de sa conscience athée, l’âme de Sade n’en éprouve que plus fortement le besoin de s’affirmer dans un acte coupable.

C’est pourquoi une même situation délictueuse que ce rêveur imagine ne cesse pas de se représenter à son esprit : le temps vide de leur contenu les actes délictueux du passé et laisse subsister l’image des choses auxquelles ces actes se rapportent ; l’image des choses et des êtres devient une présence provocatrice d’actes nouveaux dont le projet ne parvient pas à épuiser la provocation.
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