Le calligraphe initie son acte créateur selon le souffle que rythme sa respiration. Et si l'énergie vitale de la nature ne guidait sa main de démiurge, papier, pinceau, pigments demeureraient inertes. Et de même qu'il est impossible de revenir sur une respiration, le trait ne peut-être ni repris ni corrigé. Le premier trait détermine tous les autres, en les subordonnant à la structure de l'idéogramme dont le papier va conserver l'empreinte.
(Maître Akeji)
Les brumes d'été
Ont effacé les cordages,
Et la barque flotte.
Mais c'est au bord du reflet
Qu'apparaît la forme vraie.
Budô den-sho
Chant de cigales
Près des huttes du hameau
Dans la nuit venue -
A part le souffle du vent,
Personne, aucun visiteur.
Kokin waka-shû
Nuées irisées
Sur l'immensité de l'eau,
Le soleil descend,
Signe que ce soir la lune
Intensément brillera.
(Man.yô-shû)
Zone Critique a édité un article à propos d'un film sur le calligraphe de cette oeuvre, Maître Akeji https://twitter.com/ella_blue8/status/1473375273345339398?s=20
Un célèbre maître zen, à qui l’on demandait le sens de sa pratique, répondait ceci : « Un peintre n’a pas envie de parler de son travail. Le critique d’art se permet d’en parler, mais pour le peintre c’est dans la représentation que se cache sa vie, il n’a aucune envie de s’étendre sur le sens de son travail. Pour lui, la toile est en elle-même un tout et n’a pas de signification ». Voilà ce que fait Akeji : une œuvre totale, confondant le commun et l’esthétique, la nature et l’artifice, la voie des dieux et la voie des hommes. Corentin Leconte et Mélanie Schaan témoignent donc tout en douceur, avant qu’il ne soit trop tard.