Romain Molina

« Certains joueurs refusaient de venir en sélection [irakienne] car ils pensaient à la punition s'ensuivant si nous ne sortions pas vainqueurs. Si tu penses à la punition qui t'attend, tu perds ton jeu, ta passion, l'amusement du football : tu perds tout ! [...] Lors d'un match de qualifications à la Coupe du Monde contre le Kazakhstan à Bagdad, on est parti directement du stade à la prison car on avait perdu. » Obeid s'arrête un instant, puis explose de rire : « Je n'étais pas capitaine ce jour-là, heureusement, hein ? On a dormi deux ou trois nuits là-bas, puis on a été libéré. Comment je peux expliquer une chose pareille ? Mieux vaut en rire aujourd'hui ... »

Il y a toujours des affaires chez nous, ça n'arrête pas... Malheureusement, le public n'est pas au courant de tout, parfois car il ne s'y intéresse tout bonnement pas. C'est pourquoi le football est aussi puissant : c'est une échappatoire. Les gens voient ce qui se passe sur le terrain et défendent vaille que vaille leurs dirigeants, qui utilisent parfois leur poste pour d'autres aspirations.

Je ne veux pas rentrer à Southend, qui de toute façon ne me paye plus depuis l’été. Or, j’avais fait plaisir à mes parents l’été précédent en leur achetant une maison en Tunisie, leur rêve. Je n’ai donc plus d’argent, et plus de salaire. Ma ligne téléphonique est coupée, je n’ose même pas utiliser ma carte bancaire. Seul mon agent est au courant. Il essaye de me trouver des clubs. Je vogue d’essai en essai, de train en train, payés par les clubs intéressés. On insiste là-dessus, comme sur les repas. L’un de ces clubs n’a pris en charge qu’un seul repas par jour. Vu que je ne veux rien demander, je mange seulement le soir pendant une semaine. Mentalement, je suis au fond du trou.

Dans l'anonymat complet d'un petit club isérois de DHR, l'US Guiers, l'un des meilleurs joueurs d'Asie du Sud-Est joue chaque dimanche après une semaine de dur labeur comme fromager. « C'est fou quand on réfléchit. [Pen Phath] était l'un des joueurs favoris des fils du roi Sihanouk, une star en Thaïlande, les gens chantaient son nom, puis il est arrivé ici sans que personne ne se doute de tout ça » détaille son fils. « Quand j'étais petit, on allait en vacances en Thaïlande et les gens l'arrêtaient encore pour demander des photos ou un autographe. Je ne comprenais pas tout, mais je voyais bien qu'il était quelqu'un d'important ici. [...] Il jouait, entraînait, mais devait aussi travailler. Il a tout fait en France : barman, agent de sécurité au Castorama d'Aulnay-sous-Bois, préparateur de commande dans une usine... Il compilait deux jobs pour acheter une maison en campagne et quitter la cité afin que je puisse grandir dans un coin plus tranquille. »

L’été, un agent propose à un pote et moi un essai à Pedras Rubras, en troisième division portugaise. Tout est prévu. Sauf que quand on arrive à l’aéroport, personne n’est là pour nous récupérer. L’agent qui devait venir nous a posé un lapin. On n’a pas trop d’argent sur nous, donc on prend un petit hôtel. Au bout de deux jours, on n’a plus d’argent. Pour manger, on doit voler… On ne sait pas où dormir, on ne sait pas quoi faire : impossible de rentrer sans argent. Ma mère parvient à récolter les fonds, qu’elle nous envoie par Western Union afin que nous puissions prendre l’autocar pour Paris. La veille du départ, on dort dans la station de bus. Ça a duré une semaine et je n’ai jamais eu aussi peur de ma vie. C’était la galère, la vraie.

Si le football se résume pour certains à des millions et à la manipulation grotesque des clubs, agents et conseillers en image, il ne s’agit que d’une niche, pas de la réalité. L’essentiel de la profession n’est pas faite de strass, encore moins de liasses de billets.

J’ai couru après mon argent toute l’année. Ils calculent pour faire en sorte de ne pas avoir trois mois de retard et éviter que les joueurs puissent casser le contrat à la FIFA. Le premier mois, on est payés. Le second, il y a du retard et on a 50 %. Le troisième mois, pareil. Au fil de la saison, ils s’arrangent pour casser des contrats avec ceux ne jouant pas et trouvent des solutions avec les titulaires. Or, ils ont besoin de moi et je parle le grec, donc c’est plus compliqué pour eux. Ils me disent quand même souvent : « Demain, demain, demain ! » Parfois, ils me disent qu’il fait beau, que ça va, tranquille (rires). Au final, je ne perds qu’un mois de salaire.

Trop souvent, on confond le leadership avec les longs discours. Non, ce qui fait un leader, c'est de savoir parler au bon moment, quand c'est nécessaire. Mais les paroles ne servent à rien si elles ne sont pas corroborées par les faits. Un leader doit donner l'exemple.

Dans l'histoire récente de la Celeste, il y a eu la main de Suárez, la panenka du Loco Abreu et il y aura désormais la blessure de Cavani.

Le 12 juin 2001, l'avocat des oligarques, Stephen Curtis, finalise le fameux payement de 1,3 milliards de dollars de Roman Abramovitch à Boris Berezovsky. Il est aidé par un autre avocat britannique, Stephen Moss, qui opère comme conseiller juridique de Badri. Ce tour de passe-passe, connu comme l'accord de Devonia, mériterait un livre à lui seul.