S. Korr

Imaginez avoir une vengeance à assouvir. La vengeance est un plat qui se mange froid. Très froid voire glacial. Imaginez vous vous réveillant riche. Très riche. Une richesse qui arrive après des années de galère. Comment réagirez-vous? Garderez-vous la tête froide? Deviendrez-vous très dépensier? Testerez-vous l'humanité ainsi que la profondeur de votre ego?

Le boycott du bonheur est un recueil de nouvelles. C'est une descente aux enfers dantesque. Une fuite en avant sans fin. L'argent donne le pouvoir. Le pouvoir rend un ego démesuré. Un ego démesuré peut entrainer un humain dans la folie. Aux portes des enfers. Dans une chute sans fin dans les bas instincts humains. C'est un recueil où l'humain met à jour sa face diabolique. C'est un recueil où le sexe est en filigrane et sert d'exutoire à des sentiments indéfinissables. Plutôt, des sentiments inavouables et qui feraient honte au diable lui-même. Pourquoi agir ainsi? Pourquoi se laisser aller sans retenue?

Le boycott du bonheur annonce la fin des sentiments humains et le début des ressentiments. Il annonce la vengeance la plus noire. La plus froide. La plus inhumaine. Et c'est glaçant. Un tantinet dérangeant. Totalement impensable. L'humain décide d'une chose, s'y tient et s'y applique: le boycott du bonheur.

Même pour la France

Daniel, une vingtaine d'années à tout casser, est éleveur. Je n'en dit pas plus pour garde le suspens. Sachez juste que les événements de cette histoire se passent entre 88 et 91. Rien que ça, j'ai adoré, car j'ai eu l'impression de voir la jeunesse de mes parents à travers cette nouvelle. Et je suis d'autant plus concernée que j'ai grandit dans un petit patelin où tout un tas de ragots circule sur les habitants. Là est la force de cette histoire : non plonger dans la réalité à travers des personnages - principaux comme secondaires - bardés de détails. Leur psychologie, aussi, est très travaillée.

La fin ne manque pas de faire réfléchir le lecteur. Et je vous garantie que vous ne verrez plus jamais ce jeune homme timide qui travail de ces mains 12h par jour pour des clopinettes de la même manière.



L’Équarrisseur

Courte histoire durant laquelle on suit la fin de journée de Crépin, cinquantenaire bedonnant et vieux gars. L' histoire a la particularité de ne comporter aucun dialogue. Malgré tout, on suit l'homme à travers ses pensées, ce travail qu'il a toujours fait mais déteste, ce quartier qu'il a toujours connu, et ce bois, où il allait jouer enfant.

Tout du long, je me suis demandé où l'auteur voulait me mener (c'est presque à chaque fois le cas). La conclusion arrive de manière très abrupte, violente. C'est Hardcore-trash, comme j'aime parfois le dire. Le choc - sûrement le seul but de ce récit - est là, sans aucun doute.



Miséricorde aux Lycaons

Sans nul doute le récit le plus troublant, car on s'attache énormément aux deux protagonistes.

À une époque où seuls les plus riches possèdent une automobile et où les chemins de fer ne passent pas encore dans toutes les patelins, François Lejean nous conte une soirée hors du commun auprès d'un médecin de campagne. Les deux hommes accrochent et les langues se délient pour aboutir au secret final, le plus inavouable, qui tranche particulièrement avec le language précieux utilisé tout au long de l'histoire.

L'auteur nous prouve par cette nouvelle qu'il manie les mots et les tournures de phrases à la perfection, autant qu'il arrive à se mettre à la place de ses personnages. Si la révélation n'était pas décrite avec autant de détail macabres qu'à l'accoutumé, on pourrait presque penser que ce récit n'est pas de lui. Grandiose.



Dolly Trois Trous

Pour une fois, l'histoire se passe aux États-Unis. James vit dans une petite bourgade et appelle son ami, Joey, pour lui annoncer qu'elle est arrivée. Il lui propose de venir la voir avec son frère, Jess.

Qui est arrivé ? Ça, c'est le sujet de l'histoire. Je peux juste ajouter que trois marques de whisky en J sont de la partie, et que ça va faire dégénérer la suite.

Pour une fois pas dégueulasse, cette nouvelle est plutôt drôle et distrayante, et la fin prête à sourire.



Le Veaux à deux Têtes

Peu de mots pourraient décrire cette histoire. Moi, je m'y risque avec "abjecte" et "immorale". C'est vrai, l'auteur n'est pas du genre à rédiger des comptines pour enfant. M'enfin, là, il est parti nous chercher le rebu du genre humain.

Impossible pour moi de parler du récit sans spoiler. La seule chose que je puisse dire, c'est que ça m'a tellement retournée que j'ai mis deux semaines à me décider à le terminer. Ce qui est sûr, c'est que l'imagination de l'auteur n'a d'égale que la folie et la perversion des hommes.



Un Amour d'Été

Très courte - à peine une dizaine de pages - cette nouvelle nous montre qu'il en faut peu pour passer de niaiserie à effroi. Même le language soutenu du protagoniste ne saurait nous faire oublier l'horreur. Néanmoins, j'aime cette manière qu'à parfois l'auteur de raconter une histoire sans avoir besoin de citer ni le héro, ni ses proches.

On termine sur une note sombre qui laisse un goût amer et peu de place à l'espoir en son prochain.



Pour conclure

Ce recueil de nouvelles est le premier de l'auteur. Comme pour le troisième, que j'ai lu il y a quelques mois, la plume m'a totalement séduite. Je ne sais pas si Korr est aussi cynique et blasé que ses personnages, mais ce qui est sûr, c'est qu'il nous plonge dans chaque histoire avec un réalisme dérangeant. C'est aussi beau que terrifiant et je vous conseil de ne pas mettre cette œuvre entre les mains de n'importe qui !
Lien : https://audreygripping.wixsi..

Ce recueil de nouvelles est le dernier ouvrage que j'ai acquis à La Bouquinerie Nantaise. Le language est crus et un peu blasé, voir cynique. Le vocabulaire, familier et très varié. Je me suis personnellement délectée de la plume de l'auteur.



☁️ 𝕋𝕣𝕠𝕚𝕤 𝕛𝕠𝕦𝕣𝕤 𝕒𝕦 ℙ𝕒𝕣𝕒𝕕𝕚𝕤

Dans cette nouvelle, S. Korr nous plonge dans la tête d'un homme sur le point d'être jugé pour un crime que nous découvrons au fil de l'histoire. Le héro, un quinquagénaire, nous raconte les événements qui l'ont conduit dans la goêle de la cour d'assises. Si, au début, on s'attache au protagoniste, le prenant même en pitié, on se rend rapidement compte que son état mental est loin d'être stable. Jusqu'à ce qu'il pète les plombs et commette l'irréparable. Là commence ses "trois jours au paradis", comme il dit. Au grand damne de sa victime à qui il va faire subir les pires sévices. Les pensées de l'homme sont claires mais scènes les plus abjectes sont évoquées sans être détaillées. Et Dieu merci !



🚤 𝕊𝕦𝕔𝕖 𝕞𝕠𝕟 𝕪𝕒𝕔𝕙𝕥 !

C'est le récit le plus long. Raconté par un homme dont on ignorera le prénom jusqu'à la dernière ligne, cette histoire retranscrit les péripéties d'Émile, Hubert, Jean-Marc, Damien, et le narrateur (nommons-le ainsi !). Cinq amis de longue date, assez friqués pour se permettre à peu près tout et n'importe quoi sans craindre de représailles. Et ils se permettent d'être blasés par la vie, avec ça !

J'ai été tenue en haleine durant tout le récit. L'auteur distille des débuts d'intrigues pour les terminer quelques pages plus tard. On a tout le temps envie de savoir où la bande d'amis va nous mener. D'ailleurs, le suspens est maintenu jusqu'au bout quant à l'histoire des Chuteurs. J'espère un jour découvrir le fin mot de l'histoire.

Il y a aussi de petits détails qui ont retenus mon attention comme les fixettes du protagoniste sur l'âge et le ridicule, ou les groupes de rock cités.

Vient finalement l'anectode sur Gabin et Lino Ventura racontée par Jacob - un personnage haut en couleur tout à fait attachant - qui, bien qu'elle soit sans nul doute inventée, m'a beaucoup fait rire. De plus, cet homme nous sert un pamphlet bien sentit sur la condition des natifs de Polynésie (endroit où nos héros sont en vacances) et ça a de quoi vous remettre les idées bien en place. Comme tout le reste du récit, d'ailleurs.

Cette histoire m'a autant fait rire que choquée. Et pourtant il en faut ! Mais comme les héros n'ont aucune limite, ils vont vraiment très loin.

Les personnages sont plus vrais que nature, avec des défauts mis complètement en avant et sans aucune pudeur. Un bon rappel de la conditions humaine dans toute sa splendeur. Tout à fait fascinant !



🌌 𝕃𝕖 𝕔𝕚𝕖𝕝 𝕖𝕤𝕥 𝕞𝕒 𝕝𝕚𝕞𝕚𝕥𝕖

C'est l'histoire la plus horrible jusqu'ici. Après une tentative de suicide ratée et une reconstruction faciale partielle, le protagoniste (on ne connaître son prénom qu'à la fin) à décidé de changer de vie. Il a tout plaqué pour acheter un manoir dans le Finistère où il vit seul, caché de tout de tous. Il s'y reconstruit lentement, jusqu'au jour où il se rend compte que quelqu'un vient roder sur son terrain la nuit. Telle une allumette lancée sur un tas de paille, ce constat va changer sa vie. Pour le pire.

Seul récit où on a droit à du sexe détaillé, la scène en question est particulièrement horrible, si ce n'est dégueulasse. Orifices improbables, inceste et religion, descriptions dont je me serais volontiers passée... Le récit est court et heureusement ! Mais ça donne à réfléchir sur la santé mentale plus que douteuse de certains individus. Vraiment. Je dois avouer que j'ai lu ces quelques pages avec une espèce de fascination morbide dont beaucoup d'êtres humains font preuve sans jamais oser l'admettre.



🎩 𝕌𝕟𝕖 𝕥𝕖𝕥𝕖 𝕒 𝕔𝕙𝕒𝕡𝕖𝕒𝕦𝕩

Si la nouvelle précédente est sacrément dérangeante, celle-ci tient plutôt du risible. Pour le coup, le protagoniste est une femme et la pauvre va vivre les pires minutes de sa vie. Une vingtaine, à tout casser, mais ce lapse de temps va suffir pour réduire à néant tous ses beaux efforts. Cynthia, pour qui les chapeaux sont une passion, va pour la première fois dispenser une formation à une cinquantaine de salariés d'une grosse société. Mais c'était sans compter sur l'appréhension qui lui a noué les intestins toute la sainte semaine, et qui ont décidé de se relâcher au pire moment ! Le récit est court et le rire assuré, bien qu'une partie du récit en fera tiquer plus d'un. On est loin du raffinement mais on termine sur une bonne note, ce qui est vraiment plaisant !



✒️ ℙ𝕠𝕦𝕣 𝕔𝕠𝕟𝕔𝕝𝕦𝕣𝕖

Cette œuvre est le troisième et dernier livre de S. Korr. Plume incisive et cyniscme poussé à son paroxysme. Les éléments de décor et les infos sur les personnages sont amenés en temps voulu, par petites touches, avec tact et finesse.

J'ai également beaucoup aimé les références entre les récits. Les événements de la première nouvelle sont évoqués dans la seconde, et la troisième est, d'après une note de bas de page, la suite d'un autre récit publié dans un précédent ouvrage. C'est une chose que j'apprécie tout particulièrement.

Si vous voulez tenter l'aventure, assurez-vous d'être dans un bon état d'esprit et de lire ces écrits avec détachement. Dans le cas contraire, je ne donne pas cher de votre santé mentale !

Pour ma part, j'ai hâte de me procurer ses deux précédents livres.
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