Nous sommes les parents d'un tueur. Nous sommes les parents de Matthieu, 22 ans, grand, blond, gentil avec les membres de sa famille, seul, emprisonné, malade. Nous sommes aussi les parents de 2 jeunes filles extraordinaires, fortes, aimantes, drôles, intelligentes, courageuses. Ensemble, tous les 5, nous formons une famille. Une fois par mois, dans une pièce de six mètres carrés minable au milieu d'une taule, Matthieu, Margaux et Zélie rigolent ensemble. Ils sont heureux de se retrouver parce qu'ils s'aiment.
Un jour, dans 20, 25 ans, on ne sait pas, Matthieu sortira de prison. Ce sera un homme, mais il sera seul, il n'aura pas de femme, pas d'enfant, et nous ne savons pas aujourd'hui, s'il sera guéri. Nous ne savons pas si nous serons encore là, vivants et en assez bonne santé pour nous occuper de lui. Il aura 40, 50 ans, il sera encore, à jamais, notre enfant.
Nous sommes les parents de Matthieu Moulinas.
Nous sommes les parents de 3 enfants, dont l'un fait du mal.
Nous sommes vivants. Qu'on nous pardonne.
Matthieu a apporté la démonstration des limites d'un jury populaire. On demande à des gens qui ne sont pas psychologues ni médecins de juger de la santé mentale d'un garçon. Ils sont parents, ils ont une fille peut-être, ils sont horrifiés par ce que les victimes ont subi, et c'est normal. C'est leur émotion qui l'emporte. Alors ils ne retiennent pas que Matthieu est malade. C'est terrible pour lui, c'est dommage pour nous tous, et notamment pour la société, mais c'est comme ça et on ne peut pas leur en vouloir.
On nous a reproché d'avoir été trop protecteurs avec notre fils, toute son enfance durant. On reproche pourtant aussi facilement aux parents de démissionner trop vite en cas de problème. Matthieu présentait des difficultés de concentration et d'apprentissage, nous l'avons aidé à les surmonter dans son intérêt, sans nous demander si on était « trop » ou « pas assez ». Nous avons fait ce que nous pensions devoir faire pour lui, pour la réussite de sa scolarité. Au cours des deux procès, on nous a dit « trop aimants ». Qu'est-ce que ça veut dire ? Aimer son enfant, je sais ce que cela veut dire. Mais trop aimer ; je ne comprends pas.
Quoi qu'ait fait l'enfant, être parent, c'est pardonner et cultiver pour lui une réserve d'avenir.
Un jour, dans vingt, vingt-cinq ans, on ne sait pas, Matthieu sortira de prison. Ce sera un homme, mais il sera seul, il n'aura pas de femme, pas d'enfant, et nous se savons pas, aujourd'hui, s'il sera guéri. Nous ne savons pas si nous serons encore là, vivants et en assez bonne santé, pour nous occuper de lui. Il aura quarante, cinquante ans, il sera encore, à jamais, notre enfant.
Nous sommes les parents de Matthieu Moulinas .
Nous sommes les parents de trois enfants, dont l'un a fait le mal.
Nous sommes vivants. Qu'on nous pardonne.
Il était malade, on ne l'a pas vu. Mais enfin..Nous ne sommes pas médecins .
Quand les jurés sont arrivés au tribunal, au Puy-en-Velay, ils avaient déjà jugé Matthieu par ce qu'ils avaient vu, lu et entendu via les médias. Il n'avait jamais été question d'un enfant malade, seulement d'un monstre.
De notre amour inconditionnel, nous voulions faire le terreau dans lequel sa confiance germerait et l'aiderait à grandir droit et fort.
(...) me voilà hantée par l'image du Matthieu laid que les gens des tribunaux ont jugé. Moi qui l'avais toujours trouvé tellement beau, je l'ai vu laid à travers leurs yeux.
Nous sommes tous impardonnables ,certainement, aux yeux et au cœur des parents de cette enfant. Nous les comprenons. Nous ne nous pardonnerons jamais, qu'ils en soient bien certains, la mort atroce de leur fille. Leur chagrin nous hante. Pourtant, nous restons les parents du meurtrier d’Agnès. Et cela, cela au moins, qu'ils nous le pardonnent : notre fils, nous l'aimons toujours. Nous ne savons pas ne pas l'aimer. Nous n'essayons même pas. Ce serait peine perdue.